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à bâtons rompus avec Khadija Idrissi Janati, présidente de Ifrane Forum: «Il faudrait favoriser la création d’une offre adaptée aux réalités africaines»

© D.R

Une nouvelle édition de Ifrane Forum, Sommet africain du commerce et de l’investissement, est prévue du 6 au 8 décembre à Ifrane. L’événement cette année se tiendra sous le thème  «Construire des champions économiques africains». L’objectif étant de poursuivre la réflexion et les actions, déjà entamées, sur les enjeux et défis de la transformation économique et sociale de l’Afrique. Dans cet entretien, Khadija Idrissi Janati, présidente du forum, revient sur la particularité de cette édition qui réunira plus de 200 participants issus de 25 pays d’Afrique.

ALM : Comment se présente cette nouvelle édition d’Ifrane Forum 2023?
Khadija Idrissi Janati : L’édition 2023 d’Ifrane Forum s’annonce particulière. D’abord, par son thème «Construire des champions économiques africains» orienté vers le secteur privé et son rôle dans le développement des sociétés et des économies africaines. Ensuite son timing, après l’opérationnalisation de la Zone de libre-échange africaine et dans un contexte où les alliances régionales s’imposent comme un outil performant pour trouver de nouveaux marchés. Enfin, par la qualité et la diversité des intervenants que nous accueillons qui incluent des chefs d’entreprises, des diplomates, des dirigeants d’agences gouvernementales, des hauts responsables d’institutions africaines, des présidents de fédérations professionnelles, des experts et consultants.

Nous poursuivrons ainsi la vocation d’Ifrane Forum de réunir les actrices et acteurs politiques, économiques et sociaux du continent et de la diaspora pour engager des réflexions approfondies autour de thématiques en relation avec le développement du commerce et de l’investissement en Afrique, alignées de manière cohérente avec notre engagement pour contribuer au développement durable du continent.

L’accent sera mis cette année sur la construction des champions économiques africains. Comment expliquez-vous le choix de cette thématique ?
Cette année, nous avons décidé d’axer les débats, comme vous l’avez souligné, sur la construction des champions économiques africains. Un choix motivé d’abord par deux éléments. Le premier est le constat clair que le continent voit depuis plusieurs années, naître et grandir des entrepreneurs aux parcours remarquables, qui ont réussi à créer des entreprises et les faire grandir pour créer des centaines d’emplois et créer un impact significatif aussi bien sur le plan socio-économique, environnemental que technologique.

Toutefois, ces entreprises restent des exceptions et ne dépassent pas les 15% du tissu économique africain, qui reste constitué en grande majorité de petites entreprises qui n’arrivent pas à briser le plafond de verre, en termes de chiffre d’affaires et d’emplois créés. Le deuxième est l’expérience marocaine du début des années 2000, qui a permis de faire émerger des champions nationaux tels que le Groupe OCP, Bank of Africa, Al Mada, Maroc Telecom qui, grâce à des stratégies ambitieuses et courageuses, ont pu grandir sur le marché local et se développer à l’international, notamment en Afrique, ouvrant ainsi la voie à d’autres entreprises qui ont suivi, à l’image de Saham Assurances, Addoha et d’autres. Explorer les chemins pris par les grandes entreprises africaines et les choix faits par leurs dirigeants, afin d’informer, convaincre et inspirer, telle est l’ambition de l’édition 2023 d’Ifrane Forum.

Quels seront les principaux défis que vous comptez souligner durant cette manifestation ?

Le thème choisi fait émerger plusieurs défis que doivent relever les entreprises africaines, tout en profitant des opportunités qu’offre le continent. Pour rester dans votre question, les défis sont nombreux. Certains sont d’ordre stratégique, notamment la grande disparité entre les économies du continent rendant difficile, mais opportune, la création de synergies ; le jeune âge de la Zlecaf ne lui permettant pas encore de jouer le rôle de catalyseur du développement des échanges commerciaux intra-Afrique pour lequel elle a été pensée, la perception de l’Afrique comme continent instable qui rend difficile de sécuriser les investissements réalisés et le manque d’harmonisation et de complémentarité entre les économies du continent. D’autres défis sont d’ordre opérationnel comme le manque d’infrastructures, la difficulté logistique et les barrières à la libre circulation des biens et des personnes entre les pays du continent. Les débats tenteront d’explorer ces défis, comprendre leurs sources et identifier les pistes de solution.

Selon vous, quelles sont les actions à mettre en avant pour renforcer la contribution du secteur privé au grand chantier de développement ouvert au niveau continental ?
Le secteur privé est un véritable moteur de croissance. Il joue, en effet, un rôle primordial dans la promotion du développement durable des économies en générant des emplois, en créant de la richesse et en contribuant à l’amélioration des conditions de vie des populations. Ainsi, pour renforcer de manière durable le tissu économique en Afrique, il faut s’attaquer aux difficultés auxquelles font face les entreprises africaines. Le premier frein est l’offre de financement qui ne correspond pas aux besoins des entreprises, avec des procédures souvent trop lourdes pour des PME africaines qui représentent 90 % des entreprises africaines, ou des conditions d’accès jugées très restrictives.

Il faudrait donc favoriser la création d’une offre adaptée aux réalités africaines. Le second est le cadre législatif dans les différents pays du continent, qui nécessite une harmonisation et un rapprochement pour faciliter le développement des entreprises extramuros et favoriser l’émergence d’un marché africain intégré.
Le troisième est la création d’un environnement favorable aux affaires, autrement dit, mettre en place des politiques qui encouragent l’investissement privé, la croissance des entreprises et facilitent la création de nouvelles entreprises. Le dernier frein est l’encouragement du commerce intracontinental en facilitant les échanges commerciaux entre les pays du continent en supprimant les barrières tarifaires et non tarifaires et en encourageant la coopération régionale. Ce sont, à mon sens, quelques chantiers les plus urgents sur lesquels nous devons travailler pour renforcer la contribution du secteur privé au développement.

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