Chroniques

Aux européennes, le triomphe annoncé de l’extrême droite !

Mustapha Tossa Journaliste éditorialiste

En plus des raisons liées à la personnalité propre de Jordan Bardella, le Rassemblement national est promis à un avenir radieux lors de ces prochaines européennes pour cause d’une concurrence affaiblie par les divisions et un manque flagrant de lisibilité de son programme et de sa démarche.

Il n’y a pas un seul jour qui passe sans qu’un institut de sondage ou une maison chargée d’étudier l’humeur des Français n’annonce une performance inédite de l’extrême droite aux prochaines élections européennes du 7 juin. À tel point que pour ses opposants politiques, la question n’est pas de savoir comment l’empêcher de réaliser ce triomphe annoncé mais comment limiter les dégâts et sauver la face face à ce qui s’apparente déjà à une Bérézina électorale.

La principale icône de cette euphorie dans les rangs de l’extrême droite est le jeune Jordan Bardella. Nommé à la tête du Rassemblement national par Marine Le Pen, la fille de son père, pour qu’elle puisse se consacrer à la présidence du groupe parlementaire du parti, Jordan Bardella ne s’est pas contenté d’un rôle de pot de fleurs ou d’une présidence honorifique chargée de garder et de gérer les affaires courantes de la maison en attendant la présidentielle de 2027 pour laquelle Marine Le Pen est déjà officiellement candidate.

Devant ce succès personnel de Jordan Bardella qui, d’après les sondages, commence à s’imprimer auprès des Français, y compris les jeunes, il a été nommé tête de liste du Rassemblement national pour les prochaines européennes. Dans les milieux de l’extrême droite, Jordan Bardella commence à soulever une véritable ferveur populaire, voire une forme d’adoration comme le montrent ses nombreuses sorties qui se distinguent toujours par un embouteillage de selfies et de célébrations. Situation dont était privée Marine Le Pen pour cause d’une forme de cordon sanitaire idéologique qui l’empêchait d’accéder à cette forme d’interaction avec le public.
En plus des raisons liées à la personnalité propre de Jordan Bardella, le Rassemblement national est promis à un avenir radieux lors de ces prochaines européennes pour cause d’une concurrence affaiblie par les divisions et un manque flagrant de lisibilité de son programme et de sa démarche. La gauche par exemple s’est longtemps tâtée dans une valse d’hésitations avant de choisir de ne pas faire une liste commune mais plutôt de partir en ordre dispersé, Raphaël Gluksmann pour le Parti socialiste et Place publique, Manon Aubry pour la France insoumise et Marie Toussaint pour les écologistes.
Mais la grande hésitation dont aurait bénéficié le Rassemblement national est à trouver dans la stratégie du parti d’Emmanuel Macron, Renaissance, qui avait trop tardé à nommer une tête de liste pour cause de bisbilles gouvernementales liées au remaniement et à la nécessité de redistribuer les responsabilités au sein de la majorité gouvernante. Pressé par le calendrier, le président de la République a été contraint de choisir une inconnue du grand public, Valérie Hayer, pour le présenter dans cette course européenne de juin prochain. Une candidate par défaut avec un manque évident de notoriété n’est pas de nature à garantir le bon résultat dont la majorité présidentielle a besoin pour pouvoir se relancer et rêver de meilleurs lendemains.
Avec sa fougue de jeune premier qu’aucune caméra ne parvient à dompter, Jordan Bardella avait annoncé la couleur dans le cas où les performances promises à son parti se réalisaient. Il demandera à Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale pour organiser des législatives anticipées que l’extrême droite compte utiliser comme le véritable tremplin vers les présidentielles de 2027.
Il est vrai qu’un des enjeux majeurs de ces élections européennes est d’installer une atmosphère de victoire favorable à l’extrême droite qui aura par la même occasion cassé le fameux plafond de verre qui l’empêchait de rêver d’accéder au pouvoir. Dans l’hypothèse fort probable où le parti présidentiel Renaissance subit une lourde défaite, Emmanuel Macron ne pourra pas faire l’impasse sur les conséquences de ce scrutin. Et dans l’hypocrisie fort probable aussi d’une grande percée de l’extrême droite, il n’est pas certain que les ambitions du jeune Jordan Barrella seront de se contenter à gérer dans l’immédiat l’usufruit de cette victoire.
Aujourd’hui devant le succès médiatique de Bardella, certains barons de cette extrême droite pourraient être tentés de profiter pour enterrer définitivement les années Le Pen dont le nom, l’héritage malgré les opérations de maquillage politique servaient de repoussoir devant de nombreux Francais. Paradoxalement, ces élections européennes pourraient être à la fois le triomphe de l’extrême droite et en même temps sans doute le crépuscule de son icône historique Marine Le Pen.

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