L’historien et chercheur Nabil Mouline lance «Basmat al-Tourath», la toute première série animée consacrée au patrimoine matériel et immatériel du Maroc. Cette série met en lumière des lieux, des figures et des traditions emblématiques du pays, avec une approche à la fois accessible et rigoureuse.
L’histoire est un territoire disputé, un champ de bataille où se décide la manière dont les peuples se perçoivent et dont ils veulent être perçus. Le patrimoine, loin d’être une simple archive du passé, est un enjeu politique et identitaire qui conditionne l’avenir. C’est avec cette conscience aiguë que l’historien et chercheur au CNRS, Nabil Mouline, lance Basmat al-Tourath (L’empreinte du patrimoine), la toute première série animée consacrée au patrimoine matériel et immatériel du Maroc. Basmat al-Tourath ne se présente donc pas comme une simple entreprise de vulgarisation, mais comme un acte de restitution historique, un outil stratégique face aux défis contemporains de l’appropriation culturelle et des batailles mémorielles. Pour donner à ce projet toute son ampleur, Pr. Mouline s’est associé à Mustapha El Fekkak, alias Swinga, l’un des plus importants vulgarisateurs du monde digital marocain. Ensemble, ils ont décidé de proposer un format qui allie rigueur scientifique et puissance narrative, afin que chaque épisode soit une véritable expérience immersive.
Un rendez-vous hebdomadaire pendant le Ramadan
Chaque vendredi soir du mois de Ramadan, un nouvel épisode viendra explorer un aspect fondamental du patrimoine marocain. Le premier, consacré à Tinmel, a révélé au grand public le rôle essentiel de ce village du Haut Atlas dans la formation de l’Empire Almohade, véritable superpuissance médiévale qui a régné sur une vaste partie du monde islamique. Cette approche immersive a permis d’ancrer Tinmel dans l’imaginaire collectif non plus comme un simple site archéologique, mais comme un foyer religieux, intellectuel et militaire ayant bouleversé l’histoire régionale. « Les trois prochains épisodes aborderont des sujets tout aussi fascinants, mais leur thématique reste volontairement tenue secrète afin de maintenir le suspense et l’impatience du public. Cette stratégie vise à transformer Basmat al-Tourath en un véritable rendez-vous culturel incontournable, un moment de découverte et de réflexion partagé par les Marocains, où qu’ils se trouvent», explique M. Mouline.
L’histoire, un enjeu de pouvoir
Si «Basmat al-Tourath» suscite un tel engouement, c’est parce qu’elle répond à une nécessité impérieuse: redonner aux Marocains la maîtrise de leur propre histoire, face à des tentatives récurrentes d’appropriation culturelle. Les querelles sur l’origine du caftan, du couscous ou de certaines traditions ne sont pas de simples différends folkloriques traduisant des affrontements plus profonds sur la légitimité et l’hégémonie régionale. Derrière ces débats, ce qui se joue c’est la cristallisation de l’ipséité, cette conscience de soi comme entité unique et distincte. « Basmat al-Tourath » ne se limite pas à raconter le passé, elle le met en valeur comme un héritage précieux, un élément essentiel de l’identité collective à préserver et à transmettre. Le Maroc, fort d’une continuité historique remarquable, a la responsabilité de faire connaître et reconnaître son patrimoine, en veillant à ce qu’il soit fidèlement représenté et pleinement apprécié.
Au-delà de la mise en valeur du patrimoine, cette série se veut également un outil de transmission. «En mettant en lumière la richesse et la diversité du patrimoine marocain, ce projet contribue également à son rayonnement au-delà des frontières. Le patrimoine est un vecteur essentiel d’influence culturelle et en valorisant son identité historique et civilisationnelle, le Maroc renforce à la fois sa cohésion nationale et son attractivité sur la scène internationale », relève M. Mouline. «Basmat al-Tourath» est bien plus qu’une simple série, c’est une démarche de transmission et de sensibilisation, un engagement en faveur d’une histoire vivante et partagée.