Chroniques

Tebboune, la France et le Maroc !

Mustapha Tossa Journaliste éditorialiste

à défaut d’avoir réussi à convaincre, sous la menace et la pression, Paris de revenir sur sa décision de reconnaître la marocanité du Sahara, le régime algérien l’accepte et n’en fait plus une condition de normaliser ses relations.

La récente sortie médiatique du président algérien Abdelmadjid Tebboune a donné lieu à une volte-face algérienne bienvenue sur les ressorts de la crise entre Alger et Paris. Depuis l’été dernier, les relations entre les deux pays ont entamé une escalade sans précédent. En cause vue d’Alger, la reconnaissance par la France de la souveraineté du Maroc sur son Sahara.
Depuis ce tournant français, le psychodrame algérien a débuté. Retrait spectaculaire de son ambassadeur à Paris, communiqués incendiaires du ministère des affaires étrangères, conférences disruptives du ministre algérien des affaires étrangères, Ahmed Attaf, déclarations guerrières et menaçantes du président Tebboune. Rien n’a été laissé pour signifier à Paris la mauvaise humeur algérienne sur le nouveau positionnement français sur le Sahara.
Alger ne se limite pas au déclaratif diplomatique intempestif. Le régime algérien prend aussi des décisions destinées à incarner cette mauvaise humeur politique. Comme l’arrestation arbitraire de l’écrivain Boualem Sansal au prétexte de l’époque que ce dernier ait commis des déclarations rappelant des vérités historiques sur l’appartenance des régions de l’ouest algérien à l’empire chérifien et que sans les ciseaux de la France, puissance coloniale, le Sahara oriental serait marocain aujourd’hui.
Le régime algérien prend aussi la décision de fermer encore plus le robinet des laissez-passer consulaires et refuse de manière ostentatoire d’accueillir ses nationaux expulsés par la France, même ceux qui détiennent des passeports algériens biométriques valides. Le tout enrobé d’une guerre médiatique contre la France et particulièrement contre son ministre de l’intérieur Bruno Retailleau, devenu sa bête noire. Sans parler que de l’aveu même des responsables français, la coopération sécuritaire entre les deux pays est au point mort.
Ce raidissement algérien aux allures de capharnaüm, pour reprendre l’expression de Tebboune, avait un seul objectif. Faire pression sur la France pour qu’elle revienne sur sa décision sur le Sahara. Tous les moyens ont été utilisés pour parvenir à ce but. En vain. Dans toutes les discussions informelles entre Français et Algériens, Paris avait fait savoir que sa décision sur le Sahara marocain était irréversible. Et que si le régime algérien veut trouver une issue à cette tension entre les deux pays, il faut qu’il écarte définitivement cette hypothèse de sa négociation avec Paris.
C’est ce que Tebboune semble avoir compris lors de sa récente sortie médiatique. Pour minimiser le niveau de cette crise entre la France et l’Algérie, il affirme qu’elle a été créée de toutes pièces. Oubliant au passage que c’est la réaction sanguine et épidémique de son régime qui a plongé la relation entre les deux pays dans cette dangereuse tension. Il poursuit en affirmant que la bonne relation entre Paris et Rabat ne dérange nullement le régime algérien et qu’il est de notoriété publique que la France a toujours soutenu l’option de l’autonomie. Ces deux affirmations annulent de facto les raisons de la colère algérienne.
Pour de nombreux observateurs, à défaut d’avoir réussi à convaincre, sous la menace et la pression, Paris de revenir sur sa décision de reconnaître la marocanité du Sahara, le régime algérien l’accepte et n’en fait plus une condition de normaliser ses relations. C’est une forme de reddition en rase campagne devant le refus français de reculer. Le régime algérien n’est pas à son premier essai dans ce domaine des reculades après avoir investi dans la menace.
L’exemple espagnol est parlant. Alger avait créé une crise sans précédent avec Madrid avant de revenir à la normale, en payant toutes les pénalités d’usage, sans que l’Espagne ne change de position sur le Sahara.
L’actuelle attitude de Tebboune à l’égard de Paris est révélatrice d’un véritable changement de stratégie à l’égard de Paris. Sans doute le fruit de deux facteurs. Le premier, l’arsenal de la réponse graduée promise par Retailleau, notamment en ce qui concerne l’imposition des visas sur les dignitaires du régime algérien et la possibilité d’examiner leurs biens mal acquis en France, a été très dissuasif.
Le second est l’impossible marche arrière de la diplomatie française sur la reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur son Sahara et qui a rendu vaine, toute tentative de chantage et de menace. Ce double constat algérien a donné lieu au rétropédalage de Tebboune qui ne fait plus de l’affaire du Sahara marocain le point cardinal de son bras de fer avec Paris.

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