Le taux de remplissage des barrages est d’environ 37% avec des réserves d’eau destinées à l’irrigation agricole qui ont atteint 5,2 milliards de mètres cubes cette année. Le retour à des cycles agricoles durables dépendra encore, dans les prochaines années, d’une gestion stratégique de l’eau et d’une résilience renforcée face aux effets du changement climatique.
Un taux de remplissage des barrages de 37% est une amélioration claire comparativement à la campagne précédente où le taux ne dépassait pas 30%. C’est ce qui ressort des propos du ministre de l’agriculture, Ahmed El Bouari, récemment, lors d’une séance de questions orales à la Chambre des conseillers. Le ministre a rappelé que la campagne agricole actuelle avait commencé sous de bons auspices, avec des pluies précoces en octobre ayant touché la majorité des régions du pays. Malheureusement, cette dynamique a été freinée par un déficit pluviométrique prolongé entre novembre et février, marqué par une répartition très inégale des précipitations selon les zones. Mais à partir du mois de mars les choses vont changer grâce à des pluies plus abondantes et des chutes de neige qui ont profité à plusieurs régions agricoles. Selon les chiffres avancés par le ministre, le cumul pluviométrique enregistré jusqu’au 5 juin 2025 s’élève à environ 302 millimètres. Cela reste inférieur de 23% à la moyenne des trente dernières années, mais représente une progression de 14 % par rapport à la campagne précédente.
D’après M. Bouari, cette amélioration a permis un progrès visible du couvert végétal. Ce qui veut dire de meilleurs rendements pour les cultures d’automne, mais aussi un coup de pouce positif pour les cultures printanières comme les légumineuses et les oléagineux.
Le ministre a également souligné que cette dynamique contribuerait à améliorer l’état du cheptel, affaibli par plusieurs années consécutives de sécheresse. Par ailleurs, l’agriculture n’est qu’un paramètre d’ajustement dans l’allocation des ressources en eau des barrages. Ce qui fait que depuis plusieurs décennies à cause de la baisse des apports d’eau aux barrages, l’agriculture irriguée est le secteur qui est le plus lourdement impacté par les restrictions allant jusqu’à l’arrêt d’irrigation, notamment le périmètre de Doukkala.
Même le périmètre irrigué de la plaine du Gharb, pourtant bien pourvu en eau, s’est vu imposer des restrictions sévères ces dernières années à cause des règles d’allocations de l’eau donnant la priorité absolue à l’eau potable au moins pour 2 années sans restriction.
Renforcer la résilience des systèmes d’approvisionnement en eau potable et l’irrigation
En effet, la demande en eau agricole à partir des barrages est estimée par les documents de planification de l’eau à 5 milliards de m3, alors que les volumes effectivement utilisés pour l’irrigation à partir des barrages ne sont que de 2,7 milliards de m3 en moyenne sur la période de 30 ans, soit 50% des besoins. En situation de pénurie d’eau comme c’est le cas ces 6 dernières années de sécheresse, les fournitures d’eau à l’irrigation ont enregistré une forte baisse et les volumes d’eau affectés aux périmètres irrigués n’ont pas dépassé 1,65 milliard de m3 en moyenne, soit à peine 30 % des fournitures d’eau à partir des barrages.
Afin de renforcer la résilience des systèmes d’approvisionnement en eau potable et l’irrigation, le Programme national d’approvisionnement en eau potable et d’irrigation (2020-2027) a adopté une approche équilibrée permettant de concilier la sécurisation de l’eau potable et la pérennisation de l’eau pour l’irrigation à travers la poursuite et le renforcement de la gestion de la demande (amélioration de l’efficience et promotion des techniques d’irrigation économes en eau) ; l’augmentation de l’offre hydrique (recours massif au dessalement de l’eau de mer, en mobilisant 1,7 milliard de mètres cubes pour alléger la pression sur l’eau destinée à l’irrigation). Grâce à ces programmes le déficit hydrique dans les périmètres irrigués sera soulagé et la pression sur les ressources en eau souterraines sera réduite. Tout cela à travers la réduction du déficit hydrique enregistré dans les périmètres irrigués, ce qui contribuera à renforcer la résilience de l’agriculture face aux changements climatiques et renforcer la contribution à la souveraineté alimentaire. Il y a aussi l’adoption d’un mix hydrique diversifié d’eau souterraine, eau superficielle et eau dessalée dans les zones affectées par le stress hydrique.
Il convient de rappeler les priorités stratégiques affirmées et réaffirmées par SM le Roi pour faire face à ces défis comme la mise à jour des leviers de la politique nationale de l’eau pour répondre à l’accroissement des besoins et des contraintes; l’accélération des grands projets d’interconnexion des bassins hydrauliques ; l’accélération de la réalisation des stations de dessalement et enfin le développement des projets d’énergies propres pour assurer une gestion durable des ressources énergétiques. Ceci étant, et malgré les signes encourageants, les autorités et les professionnels restent prudents. Le retour à des cycles agricoles durables dépendra encore, dans les prochaines années, d’une gestion stratégique de l’eau et d’une résilience renforcée face aux effets du changement climatique.