Mal-être
Après le temps de la revendication, après le temps de la manifestation doit venir le temps de la proposition, de la discussion. La question que me renvoient nombre de responsables est «dialoguer avec qui ?» D’où mon appel à cette jeunesse à se structurer, à s’organiser : au sein d’associations, d’organisations de jeunesse, par la création d’un parti politique, pourquoi pas?!… les solutions existent !
Bien sûr j’aborderai le sujet du mouvement Genz 212 dans cette chronique, mais plus largement je voudrais parler de la jeunesse, de notre jeunesse !
En fait les manifestations de ces derniers jours ont été quelque part la partie visible du mal-être de nos jeunes.
Nul ne pourra m’accuser de «surfer sur la vague», comme le font tant d’opportunistes, puisque je vous parle de notre jeunesse depuis tant et tant d’années…
Je précise bien évidemment que je veux parler de la jeunesse qui veut bâtir, qui cherche à proposer, non de celle qui casse, ni des manipulateurs de toute espèce… À ce sujet d’ailleurs il serait terriblement indécent qu’une jeunesse sincère, avec de vraies aspirations, soit poussée en première ligne pour assouvir les agendas de certains…
En fait je voudrais me concentrer sur l’aspect perspectives que nous révèle ce mouvement de protestation, qui fait éclater au grand jour ce que la jeunesse ressent, dans son ensemble.
Les manifestants de bonne foi -que sont les premiers à être sortis dans la rue sont plutôt issus de la classe moyenne- ne sont pas en rupture, ils sont dans une volonté d’inclusion, ils ne sont pas candidats à l’immigration et veulent vivre dans leur pays.
En fait ils inscrivent leurs revendications dans les pas du discours de SM le Roi : «Il n’y a de place ni aujourd’hui ni demain pour un Maroc avançant à deux vitesses».
On peut dire que le détonateur a été le décès des 8 Marocaines -Allah yrahmou- à l’hôpital d’Agadir, et les demandes de système de santé et d’éducation dignes de ce nom ainsi que de justice sociale qui ont suivi, sont celles de l’ensemble de la population.
Puis sont venus s’ajouter les jeunes des classes populaires qui, eux, sont porteurs d’un mal-être quelque peu different, alimenté directement par leur vie au quotidien.
Et là je voudrais rappeler ce que je remonte du terrain depuis tant d’années, comme autant d’alertes restées sans réponse.
Je ne reviens pas sur la formation ni sur l’emploi ou plutôt le chômage, mais sur les humiliations, le vide de leur vie, l’abandon, le manque «d’encadrement» dont ils sont victimes : terrains de proximité devenus un système de quasi-racket, maisons de jeunes obsolètes, centres culturels de proximité fermés, loisirs inaccessibles – qui, par exemple, parmi ces jeunes peut jouer au padel, qui peut assister aux concerts de nombre d’artistes, partir en vacances…
De plus il faut bien que quelqu’un le dise: le rapport conflictuel avec nombre de représentants de l’autorité locale (pas tous Dieu merci) au quotidien, qui s’apparents à de la hogra, est mortifère… J’entends déjà les sarcasmes de certains qui diront que je tombe dans l’accessoire… et pourtant !!!! Connaissent-ils la chape de plomb que tout cela fait peser sur l’esprit de nos jeunes, si tel était le cas ils ne traiteraient pas mes propos à la légère.
J’entends bien souvent dire en ce moment qu’il ne faut pas céder (céder quoi mon Dieu) à «cette jeunesse irresponsable», égoïste, fainéante, qui ne voit que le verre à moitié vide, qui nous fait honte devant le monde entier, etc. je viens même de lire sur une publication: jeunesse ignorante !!!! J’en pleurerais…s’il existe bien sûr ce genre de profils – tout comme chez les adultes d’ailleurs – comment peut-on en faire une règle générale.
Ce n’est pas moi qui viendrais en soutien aux casseurs, aux voleurs, aux sans foi ni loi et je serai toujours partisan de la sécurité et de l’ordre pour tous nos compatriotes face à ceux qui sèment la terreur, mais ne nous laissons pas aveugler par cette minorité qui viendrait masquer le profond patriotisme de l’ensemble de notre jeunesse, son amour pour notre Nation, sa confiance en SM le Roi.
Ce sont ces jeunes-là qui méritent notre écoute : je pense sincèrement que le message des manifestants a été entendu (je parle des «troupes» car après tout nous ne connaissons pas les leaders.)
Après le temps de la revendication, après le temps de la manifestation doit venir le temps de la proposition, de la discussion.
La question que me renvoient nombre de responsables est «dialoguer avec qui ?» D’où mon appel à cette jeunesse à se structurer, à s’organiser : au sein d’associations, d’organisations de jeunesse, par la création d’un parti politique, pourquoi pas ?!… les solutions existent !
Je voudrais aussi profiter de cet espace pour répondre à certaines chaînes de télévisions étrangères qui nous donnent des leçons à longueur d’antenne : ne connaissez-vous pas vous-même ce genre de manifestations depuis bien longtemps ? Alors de grâce un peu de pudeur dans vos commentaires…
Un mot pour finir, je voudrais donner mon point de vue sur l’organisation de la CAN et de la Coupe du monde par notre Pays : ceux qui préconisent leur annulation soit ils n’ont pas compris que ces grands événements vont dans le sens de leurs revendications, soit ils sont les instruments de ceux qui rêvent de nous en déposséder.
Je m’explique : la CAN et la Coupe du Monde sont d’énormes opportunités pour notre pays et d’ailleurs leur cahier des charges prévoit obligatoirement une mise à niveau du système de santé du pays hôte!!!! Pourquoi ne le dit-on pas ???
Ce sont aussi de formidables opportunités pour notre jeunesse : en termes de formation, d’emploi, de missions, de volontariat, d’ouverture… mais, car il y a un mais, encore faut-il que notre jeunesse soit associée dès maintenant à ces grands événements, que nos jeunes se les approprient, pas en spectateurs mais en acteurs, en partenaires.
J’ai dû répéter 100 fois que nombre de jeunes lorsque je leur parlais Coupe du monde ou CAN me répondaient «Ahmed, hadchi machi dyalna».
Nous y sommes puisque des jeunes en sont arrivés à demander leur annulation, quelle erreur de jugement !
Oserai-je vous redire ce que j’écris depuis des mois : de formidables perspectives sont à notre portée. Repérons, recensons, formons ces centaines, ces milliers de jeunes dont nous aurons besoin : stadiers, médiateurs, secouristes, encadrants des fans zones, accompagnateurs des jeunes supporters dans les navettes, les bus…guides, traducteurs, artistes de rues, etc.
Le Maroc est à l’aube de profonds changements, nos jeunes demandent à en être artisans et bénéficiaires !














