Le football, sous l’impulsion des télévisions et d’Internet, devient pendant ce Mondial allemand le terrain de jeu favori des statisticiens, bien que les chiffres y soient beaucoup moins significatifs que dans d’autres sports d’équipe. Qui aurait pu dire, en 1970 encore, combien le roi Pelé avait touché de ballons pendant la finale de la Coupe du monde ? Combien il avait fait de passes courtes ? Quel était son pourcentage de passes longues réussies ? Combien de tacles gagnants il avait à son actif, et quel était son pourcentage de ballons sauvés par rapport aux ballons perdus lorsqu’il subissait un tacle ? Personne. Et d’ailleurs, aurait-on dit à l’époque, quel intérêt ?
Cette année, la Fifa (Fédération internationale de football), avec la société informatique Deltatre, fournit tous ces chiffres, en temps réel pendant le match, pour le moindre remplaçant entré en jeu à la 85e minute de n’importe quel match, depuis le premier tour jusqu’à la finale.
Voulez-vous connaître les performances du Togolais Richmond Forson, qui évoluait cette saison en division d’honneur française (6e division) ? Six tacles, dont quatre réussis, en trois matches du Mondial, 75% de passes abouties (61 sur 81), 10 centres, quatre fautes commises… et des dizaines d’autres chiffres, disponibles sur le site de la Fifa réservé à la presse.
La précision des statistiques, par joueur, par match, par équipe, n’a plus de limites. Elle est rendue possible par les progrès de l’informatique, et par le déploiement de moyens humains : des dizaines d’observateurs à chaque match pour classer chaque touche de balle, chaque action, dans une catégorie bien définie : passe, tacle, coup de pied arrêté, tir cadré, tir non cadré, etc. Le logiciel fait le reste. Les sites Internet et les chaînes de télévision apprécient particulièrement ces données. Cette passion des chiffres vient des sports américains. Du basket, du base-ball, du football américain. Là, les joueurs, les entraîneurs et le public passent leur temps à comparer le nombre de gestes réussis ou manqués par chaque joueur. En basket, par exemple, le tableau de statistiques permet immédiatement de comprendre qui a gagné, et surtout pourquoi. Mais la comparaison avec le football est difficile. Car le foot, où le nombre de buts est limité et où chaque but, au plus haut niveau, procède d’une erreur de défense ou d’un exploit de l’attaque, ne se laisse pas réduire aux chiffres.