Chroniques

Un vendredi par moi

Burkina Faso est le nom depuis août 1984 de la Haute Volta. C’est un nom qui dit tout et exprime surtout le respect de la diversité ethnique et linguistique du pays. Il est formé de la combinaison des deux principales langues du pays ; le mooré et le bamanankan. Burkina qui vient de la première signifie "intègre" et Faso qui dérive de la seconde désigne la patrie. En tout, Burkina Faso désigne " la patrie des hommes intègres ". J’arrive à Ouagadougou, sa capitale, par vol de nuit au petit matin. A l’enregistrement, le réceptionniste de l’hôtel, pas plus réveillé que moi, m’invite à laisser un "déposit" que je verse de bonne grâce, pressé d’aller me jeter sous un drap. Alors que je m’y apprêtais, le téléphone sonne : «vous avez oublié, monsieur, l’enveloppe qui contient votre argent, qu’est-ce que j’en fais ?» Qu’est-ce qu’il en fait, il me l’envoie bien sûr ! Elle contenait tout l’argent de mon séjour. Je compte, tout y est. Il n’y a pas à dire, le Burkina est la patrie des hommes intègres.

Sur un site web que je ne citerai pas, circule un film montrant une actrice marocaine connue en compagnie d’amis dans une soirée privée. Rien de pornographique, mais ce film volé à l’intimité de l’actrice en fête réinstalle à l’ordre du jour la menace que font planer le multimédia, Internet et mobile avec caméra, sur la vie privée des gens. On a déjà eu un goût amer avec les collégiennes de Taounat, on en a aujourd’hui la triste illustration avec le film de l’actrice marocaine. Bientôt les hôtes d’une réception devraient installer un scanner à l’entrée de leurs maisons pour s’assurer que personne n’a sur lui de caméra cachée et veiller à ce que tout le monde laisse son portable à l’entrée. Chaque invité aussi sera en droit de procéder à la fouille corporelle de l’ensemble des autres invités. Et encore avec la miniaturisation rien n’est moins sûr. A moins que ce ne soit l’hôte lui-même qui ne soit dans le coup. L’interdiction d’Internet étant inconcevable, il n’y a donc qu’une solution, vivre en ermite, une vie terne qui ne déplairait pas à certaines revendications en cours.

Questions capitales : Doit- on réguler Internet? Peut-on réguler Internet ? La 4ème Conférence des Instances de régulation d’Afrique (CIRCAF), réunies du 1er au 4 juillet à Ouagadougou, s’y est intéressée sans arriver à une réponse tranchée.  Le WEB  est un outil merveilleux, il met les personnes en contact, regroupe les individualités en collectivité, permet le partage des idées, facilite la recherche, a réponse presque à tout, donne accès à des bibliothèques, propose un espace à la diversité, offre aux minorités et aux sans voix le moyen de s’exprimer face aux grands monopoles des pensées uniques, fait circuler le son, l’image, le texte… La liste n’est pas exhaustive. Malheureusement, il fait circuler tous les sons, tous les textes, toutes les images. Celles des coupeurs de têtes qui veulent horrifier le monde, des intégristes qui veulent faire exploser un quartier, les manipulateurs qui veulent déstabiliser un pays ou tout simplement porter un coup à son image, des prédateurs pédophiles, de la pornographie la plus sale ou encore d’un instant  d’intimité, comme celui de l’actrice marocaine, par jalousie, par rancune ou par stupidité. Car personne n’est à l’abri. D’où l’urgence d’une régulation et d’une législation, en national et en international. Mais l’objectif est politiquement délicat, techniquement compliqué. Néanmoins possible. Si les enquêteurs le désiraient, ils peuvent remonter à ceux qui ont mis les images de l’actrice sur le réseau.

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