Chroniques

Label marocanité : Banlieue, un plan de plus

Elle court, elle court la banlieue. Et elle semble irrattrapable. Dix- sept plans en trente ans. Trois décades de lifting, de chirurgie urbaine et de morphine sociale. Elle en est devenue toxicomane de dispositifs et son corps est comme picoté par tous ces sigles de la désespérance que distribuent les «dealers» gouvernementaux : TUC, ZEP, ZUP, RMI, DSQ…. Et la cité autrefois radieuse en devenue cafardeuse et pleureuse.
La Fadela est allée avant-hier à Vaulx-en-Velin. Là où en 1990, au lendemain de nuits d’émeutes, Mitterrand annonça la création d’un ministère de la Ville dont la mission devait «changer le quartier pour les gens cessent de changer de quartier». Fadela devait être âgée de 26 ans puisqu’il en a 43 aujourd’hui. Ancienne socialiste, elle doit mesurer le sens de l’impuissance. Une chose que de déplacer un Président de la République pour la banlieue. C’en est une autre que de mobiliser une secrétaire d’Etat flanquée de sa ministre de tutelle Christine Boutin.
Fadela et Boutin, c’est un peu Laurel et Hardy au féminin. Je ne suis même pas sûr que Sarkozy les prenne au sérieux. Il manque même de politesse à leurs égards. A la vielle de l’annonce du plan Fadela, il s’est déplacé lui-même, sans urgence aucune, dans un commissariat d’une autre banlieue célèbre pour ses difficultés. Il y a là comme un message sublimable : Fadela ! Qu’elle s’enfonce dans la galère. Moi Sarko, je m’occupe de la galerie. Qu’elle fasse du soft. Je m’occupe du hard. Elle, c’est le social. Moi, c’est l’ordre. Elle gère la glandouille. Moi je gère avec les couilles. Et si même j’avais promis un énième plan Marshall, il vous faudra, pour l’instant, vous contenter d’un plan de shérif. Fadela, elle pourra toujours vous promettre des fadaises, vous éblouir par le débit rapide de ses incontinences verbales, vous distribuer des sourires niais et des bises démagogiques.
Sarko, lui sait que la banlieue, c’est du sérieux. La banlieue, avec ses paupérisations profondes, ses échecs scolaires massifs, sa violence polymorphe, ses ethnicisations multiples, ses enclavements suffocants, ses architectures estropiées, sa misère copieuse et son chômage têtu, est un dossier lourd techniquement, intellectuellement et financièrement. Mais plus que tout autre sujet, c’est une matière inflammable. C’est de la nitroglycérine. La parole ne suffit plus. Le saupoudrage subventionnel non plus. Alors Fadela n’a plus qu’un message à porter. Celui  de dire «je suis comme vous» ou «je suis de chez vous» ce qui est en soi une démarche peu républicaine puisqu’elle suggère un chouia de communautarisme.  Et c’est là ou le bât blesse.  La banlieue n’a pas tant besoin qu’on parle comme elle. Elle a besoin qu’on parle pour elle. Elle ne veut pas qu’on la kiffe. Elle veut qu’on la coiffe et qu’on la chapeaute. Elle ne veut même plus de l’écoute. Elle attend une vision.
Charrier les symboles de la banlieue a des limites. Dati, pour des besoins électoralistes va maintenant à la messe tout en faisant le Ramadan. Rahma, l’Africaine lave plus blanc et Fadela, pour rester elle-même parle comme bougnoule. Elle n’est belle la diversité ?

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