Editorial

Vive les Arabes !

© D.R

On ne peut pas voir ce qui se passe en Europe autour de l’Euro sans avoir un pincement au coeur. Un continent qui se met à jour en lançant sa monnaie unique. Une démarche unitaire radicale fondée sur des impératifs économiques incontournables. Une certaine idée des intérêts nationaux qui cèdent le pas à des intérêts collectifs bien compris. Et finalement des Européens qui ont choisi la seule voie qui peut garantir aujourd’hui leur avenir commun, celle de l’union.
De notre lieu, on reçoit tout cela comme une leçon. Voire comme une gifle. Sur les quatre facteurs qui fondent notre identité nous présentons des signes de décomposition manifeste. En tant que musulmans, arabes, africains et maghrébins nous n’avons rien, a priori, à offrir au monde. Ni un idéal transcendant, ni une démarche novatrice, ni un projet mobilisateur.
On regarde tous l’Euro à la télé avec des décodeurs de contrebande, avec des cartes trafiquées, un projet de société en panne, une région malade, une religion trustée par des voyous terroristes et une nation arabe verbeuse et humiliée. Ce n’est pas de l’auto-flagellation. C’est juste un constat honnête sur ce que nous pouvons représenter, aujourd’hui. Avancer l’idée d’une monnaie unique maghrébine ou arabe confinerait à la farce de mauvais goût. C’est justement parce que nous avons tous la même langue, la même culture et la même religion que l’union est impossible. On n’unit pas des gens que tout unit. C’est un paradoxe arabe. Rien ne nous sépare c’est pour cela que l’on ne fera rien ensemble. Il faut que l’on épuise notre stock commun de haine, de mépris de l’autre, de projection de puissance paranoïaque, de volonté de domination, de nationalisme primaire, pour pouvoir un jour envisager quelque chose de commun
Ce ne sont pas nos piètres manifestations unitaires formelles, souvent hypocrites et toujours stériles, qui risquent d’impressionner. Tout devient dérisoire devant un concept aussi fort et aussi radical que l’Euro. Nos petites monnaies, aussi nationales soient-elles, mondialement insignifiantes, navigant au gré des conjonctures et ballottées par les crises ne nous sont d’aucun secours.
On pourra toujours, pour justifier notre retard sur tout, opposer des arguments historiques, stigmatiser le colonialisme, vilipender l’impérialisme, baver sur la mondialisation, mais entre nous, on doit bien se reconnaître quelques torts. Plusieurs décennies après les indépendances nous sommes encore en train de chercher des choses élémentaires. Un mode de scrutin ! Un projet démocratique ! Une coexistence nationale ! Des élections transparentes ! Un statut pour la femme ! des parties politiques crédibles ! On cherchera encore.
Pour en finir, et pour se rattacher à un projet concret, réalisable et sérieux on peut poser cette question : Qu’est ce qui empêche objectivement l’union du Maghreb de se faire ? Rien et tout, à la fois. Nous en sommes là. Et pour longtemps encore à pédaler à contre-sens de l’Histoire. Un jour celle-ci nous présentera son addition. Elle sera amère.

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