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Autrement : Une lamentable polémique

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Plusieurs milliers de personnes ont participé à ce rassemblement, dont quelque cinq cents ressortissants du Maroc. L’évènement a permis de mêler réflexion, actions et festivités. Un ambitieux colloque s’est ainsi déroulé sur sept jours, avec des intervenants venus des quatre coins du monde, pour traiter des grandes questions concernant l’avenir de la planète, la mondialisation, la communication, l’éducation et la spiritualité. Fondée il y a donc un siècle à Mostaganem par le cheikh Ahmad al-Alâwi, un mystique qui eut un rayonnement international dès les premières années du vingtième siècle, la tariqa alâwiyya a fait preuve, dès ses origines, d’une grande ouverture au monde. Son guide spirituel actuel, l’arrière petit-fils du fondateur cheikh Khaled Bentounes, de père algérien et de mère marocaine, est un homme totalement inscrit dans la modernité, qui porte le souci d’œuvrer à la fraternité universelle, en commençant par la réconciliation entre l’Algérie et le Maroc. Un homme d’ouverture. Un artisan de paix. Si ce rassemblement a été possible, c’est, évidemment, parce qu’il a reçu le soutien du président algérien Abdelaziz Bouteflika. Lié personnellement à une tariqa, celui-ci a entrepris, ces dernières années, de réhabiliter les confréries soufies que son prédécesseur Houari Boumediène avait persécutées au motif qu’elles représentaient un islam obscurantiste, anti-socialiste, et que certaines d’entre elles s’étaient par trop accomodées de la colonisation française. Mais les préventions contre le soufisme restent fortes en Algérie, tout particulièrement chez les gardiens de l’orthodoxie religieuse. Le rassemblement de Mostaganem ne plaisait pas à tout le monde. Ses adversaires ont ainsi trouvé un prétexte pour le dénigrer en lançant une campagne contre le livre sur l’histoire de la tariqa publié par le cheikh Bentounes. Ce gros ouvrage de facture luxueuse comporte de nombreuses illustrations. Parmi celles-ci, la reproduction de miniatures anciennes turques et persanes, dont quelques unes représentent des personnages prophétiques parmi lesquels le Prophète Sidna Mohammed. Les deux représentations du Prophète ne montrent cependant pas le visage de celui-ci, qui reste caché par un voile. Pour la presse arabophone et pour les ouléma algériens, c’en était cependant trop. Le livre devait être interdit! Le public algérien, ainsi, n’a eu pour écho de ce colloque qu’une lamentable polémique. Or, comme l’a souligné le cheikh Bentounes, ces miniatures appartiennent au patrimoine     artistique et spirituel de l’Islam, et à celui de toute l’humanité. Lorsqu’elles furent réalisées au bénéfice des califes des siècles passés, elles ne furent pas jugées contraires à l’orthodoxie. Triste temps que le nôtre, où les savants religieux peuvent croire que c’est en se recroquevillant sur un islam étriqué et intolérant qu’ils défendent le mieux le message prophétique! Ils oublient que les grandes heures de l’Islam ont été celles où l’Islam a produit de l’art en abondance. Et il n’y a pas d’art sans liberté.

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