Chroniques

Autrement : l’obstination d’une institution

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 Depuis, l’Union Soviétique s’est écroulée, et la papauté demeure une institution d’importance. Cette «direction suprême» des catholiques du monde entier ( un peu plus d’un milliard de personnes) présente la particularité d’être, à la fois, une puissance spirituelle et une réalité étatique qui entretient des relations avec tous les Etats de la planète et participe à la vie des institutions internationales. Le pape a une autorité morale qui influe sur la vie du monde ( on sait le rôle essentiel qu’a joué le pape Jean-Paul II dans le processus d’effondrement de l’empire soviétique, en soutenant les résistants au système communiste ), et qui offre une certaine protection aux catholiques qui, dans divers pays, peuvent connaître des situations d’oppression. D’autres groupes de croyants dans le monde, chez les chrétiens orthodoxes comme chez les bouddhistes et même les musulmans, envient parfois cette institution qui permet à une religion de bénéficier d’un statut d’Etat symbolique qui lui garantit une vraie indépendance et une réelle possibilité d’action.
Des papes très différents peuvent se succéder. Mais la force de l’institution réside notamment dans le fait que chaque nouveau pape tient à affirmer sa solidarité avec le précédent, au nom d’une même mission tenue de Dieu. Parmi les outils disponibles au service de sa propre consolidation, la papauté dispose d’un moyen qui paraît tout à fait étrange aux yeux de ceux qui ne sont pas catholiques: le fait de décréter, au terme d’un procès, que certains parmi les souverains pontifes ont particulièrement mérité de Dieu et des hommes, et qu’ils peuvent être reconnus comme «saints». C’est dans cette voie que s’étaient engagés les papes Paul VI et Jean-Paul II par rapport à leurs prédécesseurs Pie XII et Jean XXIII. C’est le même chemin que vient d’emprunter le pape Benoît XVI, en reprenant le procès pour la « sanctification » de Pie XII, et en ouvrant celui de Jean-Paul II. Or la mise en valeur des mérites de Pie XII, qui fut pape presque vingt ans en pleine période du nazisme, pose question. Car même si ce pontife n’avait aucune sympathie pour le régime hitlérien et protégea personnellement des Juifs menacés, il ne s’engagea pas ouvertement dans la dénonciation de la machine d’extermination des Juifs, sans doute parce qu’il craignait encore plus le stalinisme que l’hitlérisme et qu’il voulut préserver l’Eglise allemande. Evidemment, les Juifs sont furieux contre cette nouvelle prise de position de Benoît XVI, qui vient s’ajouter à d’autres gestes perçus comme inamicaux. Mais beaucoup de catholiques sont, eux aussi, déconcertés par cette volonté de mettre sur le devant de la scène un pape qui incarne davantage un passé qu’ils considèrent surannés, plutôt qu’une attitude fondatrice d’avenir. On peut avoir l’impression, ici, que l’institution pontificale a choisi l’obstination, quitte à se discréditer aux yeux d’une partie du monde et d’une partie des siens. Un nouveau «faux pas» de Benoît XVI?

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