ébranlé par les remous du scandale Rubygate, critiqué même par le Vatican, le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi reste combatif et décidé à se maintenir au pouvoir, confiant dans le soutien inébranlable de son allié de la Ligue du nord, Umberto Bossi. Les avocats du milliardaire ont déposé vendredi un mémo pour contester au parquet de Milan toute compétence dans l’enquête qu’il mène sur M. Berlusconi et justifier son absence à un interrogatoire ce week-end. Le Cavaliere, 74 ans, est soupçonné d’avoir payé les services d’une prostituée mineure, Ruby, un délit en Italie, et d’abus de fonction pour l’avoir faite libérer après son interpellation à Milan en mai pour vol présumé. Le parquet a dit disposer d’«éléments probants» sur le versement par M. Berlusconi de sommes d’argent et la mise à disposition gratuite de logements à des dizaines de starlettes, en échange de prestations sexuelles. Après plusieurs jours de silence, le Vatican a eu pour la première fois des mots durs pour le magnat. Son numéro deux, le cardinal Tarcisio Bertone, a réclamé jeudi «une moralité plus affirmée» aux responsables politiques et vendredi, en recevant le personnel de la préfecture de Rome, le pape Benoît XVI a appelé société et institutions à «retrouver leurs racines morales». La prise de distance du Saint-Siège, réticent à s’exprimer sur des questions intérieures italiennes, est venue s’ajouter à la réprobation de diverses personnalités influentes comme le président Giorgio Napolitano. Mais Umberto Bossi, le chef du parti populiste de la Ligue du nord, a volé au secours de son partenaire de centre-droit. «Berlusconi est président du Conseil, ce n’est pas un mafieux ! Il a été tenu sous pression, contrôlé de tous côtés» sur ordre des magistrats, a-t-il argué. Pour Stefano Folli, éditorialiste du journal Sole 24 Ore, «Bossi continue d’être aux côtés de Berlusconi» et c’est la Ligue qui «possède les clefs (de la tenue) du gouvernement». L’opposition au Cavaliere reste désunie entre une gauche fragmentée et une alliance de centristes pilotée par trois chefs rivaux entre eux. Ces opposants n’ont d’ailleurs pas réussi à faire tomber le Cavaliere lors d’un vote de confiance que M. Berlusconi a remporté de justesse le 14 décembre. De son côté, le magnat contre-attaque sur tous les fronts même s’il se montre peu en public et ne s’est pas rendu vendredi aux obsèques à Rome d’un soldat tué en Afghanistan. Il dénonce sans relâche dans des messages vidéo un complot des juges de Milan, qu’il accuse d’instrumentaliser politiquement le Rubygate et de violer sa vie privée en mettant sur écoutes les téléphones de ses invitées. Malgré une avalanche de confidences de celles-ci à leurs frères, sœurs, pères, mères ou amis, parlant ouvertement de strip-teases, de parties fines dans la résidence du magnat à Arcore, près de Milan, décrite comme «un bordel», M. Berlusconi maintient sa ligne consistant à tout nier. Même stratégie pour la belle Ruby, Karima El Mahroug, 18 ans depuis novembre, qui a donné une longue interview à une chaîne privée du milliardaire où elle a nié être une prostituée et avoir eu des relations sexuelles avec lui. L’actrice Sabina Began, 36 ans, qui fréquente ces soirées, a laissé entendre sur un autre canal qu’elle serait la «relation stable» évoquée par le Cavaliere. «Bunga bunga, c’est moi», a-t-elle dit à propos d’un code que lui aurait attribué M. Berlusconi. Bunga Bunga serait aussi le surnom d’une pièce d’Arcore où «sont consommés les rapports avec Berlusconi», selon Nadia Macri, une call-girl qui a déclaré jeudi à la télé publique avoir reçu deux fois 5.000 euros pour se prostituer avec M. Berlusconi et avoir côtoyé Ruby à Arcore quand elle était mineure.
Françoise Kadri (AFP)
