La grève qui a paralysé, la semaine dernière, les établissements scolaires algériens n’a guère servi à grand-chose. Le gouvernement algérien continue à jouer le sourd-muet face aux revendications de certains syndicats autonomes. La grève ayant été considérée officiellement illégale, le gouvernement refuse toute négociation.
En défiant la décision de la justice algérienne, les syndicats avaient espéré que leur voix ferait un grand écho pour qu’ils puissent enfin trouver un terrain d’entente avec le gouvernement. Mais, ils ne s’attendaient pas à ce que le président algérien Abdelaziz Bouteflika refroidisse leur espoir en écartant clairement toute augmentation de salaires. Lors d’un discours prononcé jeudi dernier au Palais des nations et face à un parterre de syndicalistes et représentants des travailleurs, Abdelaziz Bouteflika a estimé que «la conjoncture économique, fortement adossée à la rente pétrolière, ne permet pas de hausse des salaires, bien au contraire dit-il, une hausse des salaires peut être préjudiciable».
Le président algérien a ajouté que si «la centrale syndicale n’arrache pas une majoration des salaires lors de la tripartite, elle n’a qu’à disparaître». (La tripartite est formée par les représentants du patronat, du gouvernement et des syndicats des travailleurs. Les déclarations d’Abdelaziz Bouteflika, au sujet de l’augmentation des salaires ont eu un véritable effet de choc pour certaines organisations syndicales autonomes, dont notamment le Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (SNPSSP) et le Conseil national de l’enseignement supérieur (CNES).
Tous les efforts déployés pour mobiliser le maximum d’enseignants ont été voués à l’échec. D’après le CNES, la grève a connu un taux de suivi de 90%. Les deux syndicats, le SNPSSP et CNES, considèrent que la décision du président encourage de manière indirecte les travailleurs à organiser des grèves. Le discours du président algérien n’a pas découragé ces deux syndicats qui ont réitéré leur attachement à l’aboutissement de leurs revendications portant sur l’augmentation des salaires, l’obtention d’un statut particulier de l’enseignant, la démocratisation de la gestion de l’université et le règlement du problème du logement. Ils avaient qualifié d’anti-constitutionnelle la décision du ministère de l’Enseignement supérieur de recourir à la justice pour interdire ce mouvement de protestation.
La chambre administrative du tribunal d’Alger, statuant en référé, sur plainte du ministère concerné, a rendu, la semaine dernière, un arrêt prononçant l’illégalité de cette grève. Les cadres syndicaux ont aussitôt dénoncé l’insensibilisation de la justice comme réponse aux conflits sociaux. Le pouvoir algérien, lui, ne semble pas se soucier du malaise dont souffrent des milliers d’enseignants algériens. Dans ce pays riche en ressources pétrolières et dont les recettes d’exportations enregistrent des chiffres hallucinants (45.6 milliards de dollars d’exportations d’hydrocarbures en 2005), la situation des enseignants frôle la misère. La rémunération moyenne d’un enseignant algérien oscille entre 18.000 et 24.000 Dinars algériens (entre 200 et 266 euros).Pourtant, lorsqu’il s’agit d’acheter de l’armement lourd, le gouvernement algérien ne semble pas avoir des problèmes à passer à la caisse.