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Sahara : Du mandat figé à la mutation politique/ De la Minurso à la Mansaso, un demi-siècle après la Marche Verte

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Sahara marocain
Chaque année, le Conseil de sécurité se contente de renouveler un mandat qui entretient une fiction juridique, sans jamais ouvrir de voie de sortie. La résolution 2756, adoptée en octobre 2024, a une nouvelle fois prolongé le mandat jusqu’à octobre 2025.

À quelques semaines du cinquantenaire de la Marche Verte, le dossier du Sahara s’apprête peut-être à connaître l’un de ses tournants les plus décisifs. Depuis plusieurs mois, les signaux convergent à New York, Washington, Paris et Londres : le statu quo entretenu par la Minurso n’est plus tenable. L’idée d’une mission onusienne recentrée sur l’essentiel, la négociation de l’autonomie, circule désormais sous le nom de «Mansaso» – Mission d’Assistance des Nations Unies à la négociation d’un statut d’autonomie au Sahara Occidental. Derrière cet acronyme se cache l’ambition d’un basculement historique : passer d’un mandat d’observation limité à un mandat politique actif.
La Minurso, créée en 1991, avait pour mission première de surveiller le cessez-le-feu et de préparer un référendum d’autodétermination. Plus de trente ans plus tard, force est de constater que cet objectif est devenu irréaliste, inapplicable et source d’immobilisme.
Chaque année, le Conseil de sécurité se contente de renouveler un mandat qui entretient une fiction juridique, sans jamais ouvrir de voie de sortie. La résolution 2756, adoptée en octobre 2024, a une nouvelle fois prolongé le mandat jusqu’à octobre 2025. Mais cette fois, la date est perçue comme une véritable ligne de crête.

Côté marocain, la séquence est lue comme la consécration d’un patient travail diplomatique entamé depuis près de deux décennies. En 2007, le Royaume a présenté son initiative d’autonomie, qui a reçu un accueil favorable et a été qualifiée de «sérieuse et crédible» par le Conseil de sécurité. Depuis, plus de la moitié des États membres de l’ONU soutiennent cette option ou ont ouvert des consulats dans les provinces du Sud. Les grandes puissances occidentales – États-Unis, France, Royaume-Uni – convergent sur la même ligne. La perspective d’une «Mansaso» viendrait traduire dans l’architecture onusienne ce consensus international.
Pour Alger et le Polisario, le changement serait radical. Il signifierait un abandon explicite de l’option référendaire, leur dernier levier rhétorique au niveau international. D’où une résistance farouche, relayée par une bataille de langage autour de l’«autodétermination». Mais leur isolement s’accroît, tandis que les évolutions géopolitiques – de la sécurité énergétique à la stabilité sahélienne – renforcent le poids du Maroc comme acteur régional incontournable.

Le secrétaire général de l’ONU lui-même a récemment sonné l’alarme, appelant à «changer de cap sans délai» et dénonçant l’enlisement actuel. Rarement un rapport du SG n’avait employé une telle urgence de ton. À la veille du cinquantenaire de la Marche Verte, symbole de souveraineté et d’unité nationale, cette coïncidence n’est pas anodine. Elle donne au Maroc une légitimité renforcée pour pousser à la mutation du mandat. À l’horizon d’octobre 2025, trois scénarios se dessinent. Le premier serait la reconduction inchangée de la Minurso, au prix d’un statu quo mortifère. Le deuxième, une réforme partielle, consistant à élargir son mandat vers plus de politique sans aller jusqu’au changement de nom. Le troisième, le plus audacieux et le plus cohérent, serait l’adoption de la «Mansaso» et la transformation de la mission en véritable instrument de facilitation d’un accord d’autonomie.

Pour Rabat, seule cette dernière option correspond aux attentes et à la réalité du terrain. Il ne s’agit pas d’une question de sigle, mais de substance. L’enjeu est de savoir si l’ONU choisira enfin d’aligner sa méthode sur la légitimité et la réalité historique. Cinquante ans après la Marche Verte, le Maroc n’a cessé de démontrer sa constance, son engagement et sa capacité à développer ses provinces du Sud comme espace d’intégration régionale et de prospérité.
La «Mansaso», si elle se concrétise, serait le signal qu’après des décennies d’attente, la communauté internationale accepte de reconnaître l’évidence et de contribuer à une solution définitive, durable et bénéfique pour toute la région.