Arrivé en avion à Bagdad en provenance de Londres, il tient à se recueillir immédiatement sur les tombes de ses ancêtres dans le cimetière royal d’Azamiyah, au centre de la capitale, dont l’entrée était interdite durant la dictature de Saddam Hussein. A sa descente de voiture, quelques deux cents personnes se pressent autour de lui, dont des hommes portant des banderoles où était écrit : «Nous accueillons le chérif Ali, espoir du nouvel Irak libre». Dans le jardin du cimetière, bien entretenu, un millier de personnes y compris des enfants arborant son portrait, qui ont eu la chance d’entrer, l’applaudissent.
Des femmes lancent des youyous de joie alors qu’un jeune homme lâche des colombes. Le chérif Hussein entre ensuite dans un mausolée en brique ocre surmonté d’un dôme en faïence bleue. A l’intérieur, il récite un verset du Coran et dépose des couronnes de fleurs sur les tombes en marbre blanc incrusté de lettres dorées, des trois souverains qui ont régné sur l’Irak durant 36 ans : Fayçal 1er (1922-1933), Ghazi 1er (1933-39) et Fayçal II (1939-1958). Puis sous un soleil de plomb, vêtu d’un costume bleu marine, le front dégarni et une moustache noire jais, le chérif Ali s’adresse au micro à ses partisans. «Grand peuple d’Irak, me voici de retour dans ma patrie après de longues années d’exil», lance, en arabe parfait, ce prince qui a quitté l’Irak à l’âge de deux ans à l’assassinat du Roi Fayçal II et de la quasi-totalité de la famille royale en 1958. «C’est un grand moment de joie». «Il est clair que la majorité du peuple irakien réclame le retour de la monarchie qui est la seule garante de l’unité du pays», ajoute-t-il lors d’une conférence de presse qui a suivi. «La royauté sera un dais pour tous les Irakiens et ne favorise pas une catégorie ou un culte», dit le chérif Ali qui est de confession sunnite, minoritaire en Irak. «Elle est la seule capable de protéger la Constitution et d’empêcher l’apparition de gouvernements autocrates et oppressifs». Il a proposé que «le peuple irakien choisisse le régime qu’il désire par la voie d’élections libres et directes» et s’est déclaré prêt à «servir le peuple irakien quelle que soit la fonction qui lui sera proposée».
Vivant en exil à Londres où il est banquier, Chérif Ali, 47 ans, est le fils de Badiaa, cousine germaine de Ghazi, deuxième roi d’Irak. Il dirige le Mouvement de la monarchie constitutionnelle d’Irak (MNCI). Un autre prétendant au trône d’Irak, Raad ben Zeid, âgé de 67 ans, cousin germain de Ghazi, vit en Jordanie et n’est pas encore revenu en Irak.
Interrogé sur cette rivalité, le chérif Ali répond: «Il n’y a pas d’autres prétendants sur la ligne de succession et il existe un consensus au sein de la famille pour me désigner comme prétendant au trône d’Irak». «J’ai refusé de revenir en Irak sur les chars américains ou britanniques», dit-il pour expliquer son retard à rentrer au pays, mais souligne qu’il «coopérera» avec la coalition pour favoriser leur départ «le plus vite possible. Soit nous les combattons, soit nous négocions avec eux. Pour ma part, je pense qu’il faut négocier». Il rappelle à son audience que les mains des membres de la famille royale irakienne n’ont jamais été «souillées par l’usage d’armes chimiques contre les gens», sans prononcer une seule fois le nom de Saddam Hussein.
• Par Lamia Radi (AFP)