La suspension des aides a provoqué des manifestations de colère dans la bande de Gaza, où 2.000 personnes ont protesté notamment devant les bureaux des Nations unies qui ont été bombardés avec des oeufs. Les agences des Nations unies ont de leur côté mis en garde contre une importante crise humanitaire. "Nous n’avons pas atteint la banqueroute d’un point de vue légal mais, pratiquement, nous n’avons pas de fonds", a affirmé Omar Abdelrazeq, le ministre des Finances. Il a souligné avoir seulement reçu 35 millions de dollars de l’Algérie, sur les 80 millions promis par les pays arabes, qui ont servi à payer des dépenses et des salaires du mois de février. Selon lui, les salaires du mois de mars des quelque 140.000 fonctionnaires, qui représentent une masse salariale de 118 millions de dollars, n’ont toujours pas été versés. Ces salaires font vivre près de 23% de la population palestinienne, selon la Banque mondiale. "Nous avons besoin de 120 millions de dollars immédiatement pour payer toutes les dépenses" urgentes, a souligné M. Abdelrazeq, qui a ajouté qu’en plus du besoin urgent de liquidités, l’Autorité palestinienne était fortement endettée. Le Premier ministre Ismaïl Haniyeh, qui a annoncé vendredi l’envoi de plusieurs ministres à l’étranger pour tenter d’obtenir des aides, a évalué le montant de ces dettes à 750 millions de dollars. L’Union européenne, le plus gros bailleur de fonds des Palestiniens avec 500 millions d’euros par an, et les Etats-Unis ont décidé vendredi de suspendre leur aides directes au gouvernement du Hamas. Les ministres européens des Affaires étrangères devaient se réunir lundi à Bruxelles pour entériner la suspension de l’aide directe.
"Nous resterons aux côtés du peuple palestinien, nous voulons les aider à faire face à leurs besoins fondamentaux: électricité, éducation, nourriture", a toutefois ajouté la commissaire européenne aux Relations extérieures, Benita Ferrero-Waldner. Washington et Bruxelles ont indiqué qu’ils allaient rediriger leurs aides vers les agences des Nations unies, telles l’agence des Nations unies pour le secours aux réfugiés de Palestine (UNRWA), ou encore le Programme alimentaire mondial (PAM). Mais des responsables de ces deux agences ont indiqué que les donateurs internationaux n’avaient pas encore répondu aux anciens appels de fonds destinés à l’aide humanitaire des Palestiniens. "Nous avons déjà lancé un appel d’urgence pour 2006 mais n’avons reçu que 14 millions de dollars sur les 95 millions nécessaires", a affirmé le responsable de l’UNRWA dans la bande de Gaza, John Ging.
"Notre budget n’a jamais été ressourcé à 100%, on tourne à 80%. Nous n’arrivons pas à cibler tous les bénéficiaires", a quant à lui indiqué le directeur du PAM pour les territoires palestiniens, Arnold Vercken. Ces responsables ont mis en garde contre l’apparition d’une crise humanitaire sévère, alors que l’importation des produits de première nécessité est toujours entravée par la fermeture intermittente du point de passage de Karni, proche de la ville Gaza. "Il faut espérer qu’au plan politique la situation ne devienne pas tragique au point de provoquer une crise humanitaire à grande échelle. Nous n’en sommes pas encore là, mais il y a des symptômes indiquant que la situation humanitaire des plus pauvres s’aggrave", a indiqué M. Vercken. "Les conséquences humanitaires (de la suspension des aides) doivent être clairement prises en compte. Des solutions doivent être trouvées afin que le peuple palestinien et, particulièrement, les réfugiés, ne soient pas privés des services de bases", a-t-il insisté. Par ailleurs, selon le site Internet du quotidien israélien Yediot Aharonot, Y-net, la compagnie israélienne privée Dor Allon qui a l’exclusivité du ravitaillement en essence de l’Autorité palestinienne, a cessé ses livraisons en raison d’importantes dettes impayées. Cette information n’a été confirmée par aucune autre source.