Ce que le Parlement européen a décidé cette mi-décembre est en effet à mille lieues des déclarations diplomatiques des deux parties sur des relations bilatérales promises à un éternel et brillant avenir.
Au contraire de cette position, la Fédération nationale des pêcheurs et des aquaculteurs analyse la situation avec une certaine objectivité. Elle veut raison garder devant ce «coup de jarnac du Parlement européen, lequel, contre toute attente, a refusé d’entériner l’accord provisoire de pêche qui lie l’Union au Maroc». Dans une déclaration à la station de radio Aswat, le président de ce groupement a en effet affirmé que ce déni est plus préjudiciable à l’Europe qu’il ne nuit aux intérêts du Maroc. Selon ce responsable en effet, en permettant à la flottille européenne un niveau de capture de 250.000 tonnes en contrepartie d’une compensation financière de seulement 36 millions d’euros en vertu de cet accord, le Maroc cède son poisson à vil prix. D’autres voix relayent ces propos en expliquant que les produits de mer marocains sont vendus au prix de 144 euros la tonne, soit 0,144 euro le kilo. Or il s’agit souvent de poisson de choix, de qualité bien supérieure aux espèces communes ordinairement vendues sur le marché local au prix moyen de 25 dirhams le kilo. De plus, affirment ces professionnels, en estimant leurs prises à 52 millions d’euros –30 pour les métropolitains et 22 pour les Canariens- les pêcheurs espagnols ont établi, eux-mêmes, que contrairement à ce qu’avance le Parlement de Bruxelles, l’accord est plus que rentable pour l’Europe. Dans le cas d’espèce et pour une période de moins d’une année outre le manque à gagner, ce sont les milliers de postes de travail générés par la filière de l’exploitation des produits halieutiques qui sont condamnés à terme. Dans un contexte de crise économique et financière général, ce n’est pas ce qui arrive de mieux à l’Espagne. Ce que voyant, beaucoup d’analystes pensent qu’en refusant d’entériner l’accord, les députés européens ont donné un grand coup d’épée dans l’eau. D’autant plus que provisoire à la naissance, le document allait mourir de sa belle mort dans deux mois. Dans l’exposé des motifs énoncés pour justifier le rejet, les services de la Commission européenne rappellent clairement que «ce protocole à l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre l’UE et le Maroc» a été paraphé le 25 février 2011 et qu’«il devait couvrir une période d’un an, entre le 28 février 2011 et le 27 février 2012». Le «flou est tout aussi net» s’agissant des motivations du Parlement européen.
A l’énoncé qui en a été fait, il apparaît clairement que la raison économique a une moindre importance que celle prétendument politique qui veut que les députés européens se soient interdits de «légitimer» la situation actuelle au Sahara. Outre que les experts peuvent facilement éventer «le stratagème de la défense autoproclamée du droit des gens qui ne se soucie même pas de demander leur avis aux intéressés», le basique en matière de pratique et de droit internationaux veut que le pays qui a l’administration d’un territoire soit autorisé à prendre toute action pouvant contribuer au bien-être et au progrès de ses «administrés». Or, fait-on remarquer, le Maroc est chez lui au Sahara où il agit suivant la volonté librement exprimée par les populations qui se sont prononcées en masse pour le candidat et le parti de leur choix aux législatives anticipées du 25 novembre. C’est-à-dire à une date antérieure à la décision du Parlement européen qui donc ne pouvait avoir agi que dans l’intention de nuire et non pas dans l’intérêt des habitants.