L’Ukraine, l’un des principaux producteurs mondiaux des céréales, rejoint la course pour l’utilisation des ports et infrastructures du Royaume
Négoce. Après la France, les États-Unis d’Amérique et la Russie, l’Ukraine est à son tour intéressée par une coopération avec le Maroc en vue de pénétrer les marchés émergents de l’Afrique. Eclairages.
Les possibilités offertes par le Maroc en tant que passage incontournable pour de nombreux marchés africains poussent les grands producteurs mondiaux de céréales à courtiser le Royaume. Plusieurs délégations étrangères ont fait le déplacement au cours des derniers mois pour explorer les pistes de coopération. Aujourd’hui, c’est le tour de l’Ukraine, l’un des grands producteurs mondiaux, de suivre le même chemin. Dans ce sens, Serhii Saienko, ambassadeur de l’Ukraine, accompagné de son proche collaborateur Oleksandr Varzatskyi, a récemment effectué un déplacement au siège de l’Agence nationale des ports (ANP) pour identifier les possibilités de coopération.
L’ambassadeur a tenu à remercier l’ANP d’avoir bien voulu accepter cette visite, et a fait part des spécificités du secteur portuaire de son pays et de sa volonté de consolider sa relation avec le Royaume du Maroc dans ce secteur, à travers différents leviers, notamment la réalisation de projets communs, le renforcement de la connectivité entre les ports marocains et d’autres domaines en rapport avec les ports.

Pour sa part, le directeur général de l’ANP a mis en exergue les relations exemplaires entre le Royaume du Maroc et la République d’Ukraine et a fait part des réalisations et performances enregistrées dans les ports marocains ainsi que des perspectives de leur développement dans une logique de complémentarité entre les ports, tenant compte des nouvelles donnes de l’écosystème, notamment les énergies renouvelables, la digitalisation et la préservation de l’environnement, véritables défis et challenges, aujourd’hui, des ports, et en lien avec les politiques publiques des différents secteurs économiques du pays.
Trafic céréalier
Le directeur général de l’ANP a souligné l’importance pour le Royaume du Maroc d’une co-émergence Sud-Sud, notamment africaine, qui place le Maroc et les ports marocains de par leur positionnement, en tant que maillon crucial dans le commerce international, continental et national pouvant rallier les connectivités de toute provenance et partant promouvoir les échanges maritimes entre les pays. Le directeur général de l’Agence a suggéré eu égard à ce positionnement des ports marocains, à leur capacité de traitement du trafic céréalier et aux atouts de la République d’Ukraine en tant qu’un des principaux pays producteurs et exportateurs des céréales au monde, l’examen de la possibilité de création d’un hub céréalier au Maroc qui pourrait servir ce dernier et en même temps, couvrir les besoins des autres pays d’Afrique ou autres clients de la République d’Ukraine.
Réagissant à ce sujet, l’ambassadeur a salué cette suggestion et a proposé de l’examiner avec l’autorité maritime et fluviale de son pays à l’occasion d’une entrevue à tenir incessamment pour en définir le cadre de coopération. Au terme de cette visite, le directeur général de l’ANP et l’ambassadeur de la République d’Ukraine ont convenu de garder le contact pour organiser ladite entrevue et formaliser un cadre de coopération fructueuse pour les deux pays.

Course internationale
Il faut dire que le Maroc est au cœur d’une véritable course internationale. Les derniers mois ont été marqués par les visites de délégations étrangères multipliant les rencontres BtoB. L’Hexagone reste l’un des principaux fournisseurs du Maroc et d’une bonne partie de l’Afrique. En octobre 2024, une rencontre franco-marocaine des céréales avait eu lieu à Casablanca, sous l’égide d’Intercéréales. Ce ne sont pas moins de 300 représentants de la filière marocaine, une cinquantaine d’opérateurs français et des acteurs des filières africaines en formation au Maroc qui ont participé à l’événement pour échanger sur la production française de céréales en 2024 ainsi que sur l’organisation des chaînes logistiques pour le transport des céréales.
Une délégation d’opérateurs céréaliers russes s’est également déplacée à Casablanca fin 2024. Les autorités russes ont sorti les gros moyens dans le cadre de cette véritable opération séduction avec une délégation conduite par Eduard Zernin, président de l’Union des producteurs et exportateurs céréaliers russes, plus connue sous la dénomination, « Rusgrain Union ». Le programme comprenait une intervention de Vladimir Baibakov, ambassadeur de Russie au Maroc, ainsi qu’une présentation de la filière céréalière russe, sans oublier des rencontres B2B entre les opérateurs russes et les acteurs marocains actifs dans le domaine de l’importation.
La Russie prévoyait de lancer une nouvelle route maritime reliant Saint-Petersbourg au Maroc via la mer Baltique puis l’océan Atlantique, loin de la tension au niveau de la route utilisant la mer Noire, jusqu’ici la principale route des exportations de céréales russes pour le marché de l’Afrique du Nord. Les États-Unis ne sont pas en reste. Fin 2024, des représentants de près de 50 entreprises agroalimentaires et groupes commerciaux américains et de 14 départements d’État de l’agriculture se sont rendus à Casablanca dans le cadre d’une mission commerciale du ministère américain de l’agriculture visant à accroître les exportations agricoles et alimentaires américaines vers le Maroc et d’autres marchés d’Afrique de l’Ouest.
« Cette mission offre une opportunité cruciale aux entreprises agroalimentaires américaines de pénétrer le marché dynamique du Maroc et de tirer parti de sa position stratégique pour un accès plus large à l’Afrique », avait alors déclaré Daniel Whitley, administrateur du Foreign Agricultural Service, qui dirigera la mission. « Nous nous engageons à faciliter ces connexions vitales et à accroître les exportations agricoles américaines ». Le Maroc est le deuxième plus grand marché d’exportation des produits agricoles américains en Afrique. Les ventes américaines de produits agricoles et alimentaires au Maroc ont atteint 619 millions de dollars l’an dernier, soit 16 % de la part de marché du continent.
Les exportations agricoles américaines vers le Maroc ont doublé depuis l’entrée en vigueur de l’accord de libre-échange entre les États-Unis et le Maroc en 2006. Tout au long de la mission, les représentants des entreprises américaines ont participé à des réunions interentreprises avec des acheteurs potentiels du Maroc et d’autres pays d’Afrique de l’Ouest, notamment la Côte d’Ivoire, la Gambie et le Sénégal.
Production mondiale
Blé. Selon les dernières prévisions de la FAO, la production mondiale de céréales devrait atteindre un niveau record de 2 925 millions de tonnes en 2025. Cette estimation représente une augmentation de 2,3 % par rapport à 2024 et est due, en partie, aux bonnes perspectives de rendement pour le maïs, le riz et le blé. L’augmentation résulte principalement de données officielles récentes de l’Inde et du Pakistan qui indiquent des rendements plus élevés que prévu, notamment en Inde où la production devrait atteidre un niveau record. La production mondiale de céréales secondaires a également été revue légèrement à la hausse ce mois-ci pour atteindre 1.262 millions de tonnes, soit 3,5% de plus que l’année dernière, et reste le principal moteur de la croissance de la production mondiale en 2025. La production estimée de céréales secondaires est dominée par le maïs et l’amélioration des perspectives au cours de ce mois s’explique par l’augmentation des rendements du maïs au Brésil et la révision à la hausse des perspectives de production de maïs en Inde, où l’on table sur la mise en culture de superficies supérieures aux prévisions initiales en raison de la vigueur de la demande intérieure de maïs destiné à l’alimentation animale et à l’industrie. Ces révisions à la hausse ont plus que compensé les baisses des prévisions concernant la production en Ukraine où, s’ajoutant aux effets du conflit, la sécheresse pèse sur les perspectives de rendement, ainsi que dans l’Union européenne, du fait d’une légère révision des superficies plantées.