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Le pape dérape sur l’Islam

Benoît XVI s’est aventuré sur le terrain délicat des relations avec l’Islam lors de son voyage en Allemagne, livrant une réflexion teintée de méfiance sur une religion qui ne condamnerait pas assez nettement la violence au nom de la foi et où « la volonté de Dieu» serait selon lui déconnectée de la raison.
Le pape, qui n’a pas fait du dialogue interreligieux une des priorités de son pontificat, ne s’était jamais penché publiquement et de manière aussi claire sur la religion islamique. Mais au lendemain du cinquième anniversaire des attentats du 11 septembre, il n’a pas hésité mardi, devant des universitaires et des étudiants de Ratisbonne (sud), à condamner entre les lignes «le Djihad» (guerre sainte) et les «conversions passant par la violence».
S’appuyant sur les commentaires d’un professeur d’université, le «pape théologien» a surtout établi une distinction claire entre le christianisme et l’islam dans le domaine des rapports entre la raison et la foi.
«Pour la doctrine musulmane, Dieu est absolument transcendant. Sa volonté n’est liée à aucune de nos catégories, pas même celle de la raison», a-t-il déclaré, reprenant la phrase du Coran : «Aucune contrainte en religion».
A l’inverse, faut-il lire dans son raisonnement, la pensée chrétienne, emprunte de philosophie grecque, refuse de «ne pas agir selon la raison», ce qui est «contraire à la nature de Dieu».
«Montre-moi ce que Mahomet a apporté de nouveau, et tu ne trouveras que des choses méchantes et inhumaines, comme son ordre de diffuser par les moyens de l’épée la foi qu’il professait», a ajouté Benoît XVI, citant sans se l’approprier une phrase d’un dialogue du XIVe siècle dans lequel un empereur byzantin s’adresse à un «persan cultivé».
Le matin même, devant une foule de plus de 200.000 fidèles à Ratisbonne, il avait, sans viser aucune foi en particulier, exprimé l’importance de «dire avec clarté en quel Dieu nous croyons» face aux «pathologies» et aux «maladies mortelles de la religion et de la raison».
Même si Benoît XVI a pris soin de préciser au cours de son discours théologique qu’il empruntait ses mots à d’autres, sa réflexion suscitait de nombreux commentaires mercredi.
«Le pape a évoqué le concept de «guerre sainte» pour marquer la différence entre le christianisme et l’Islam», interprétait le Frankfurter Allgemeine Zeitung. Expert reconnu de l’Islam, Gilles Kepel pense, dans un entretien au journal italien La Repubblica, que Benoît XVI «a tenté d’entrer dans la logique du texte coranique». Mais, selon l’auteur de « Djihad», les conséquences sont « risquées, car le discours pourrait radicaliser une partie de la communauté musulmane ».
Plus affirmatif, le théologien contestataire Hans King, cité par l’agence DPA, estime que « ces déclarations ne seront sûrement pas bien accueillies chez les musulmans et nécessitent d’urgence une explication. «Mardi soir, le nouveau directeur de la salle du presse du Saint-Siège, le père Federico Lombardi, est intervenu auprès des journalistes pour expliquer que «le pape ne (voulait) pas donner une interprétation de l’Islam dans le sens violent».
Mais selon des vaticanistes, le pape a peut-être voulu poser des conditions à un dialogue avec les musulmans, à quelques semaines d’un voyage prévu du 28 au 30 novembre en Turquie.
L’ancien cardinal Joseph Ratzinger s’est toujours opposé à l’entrée de ce pays dans l’Union européenne.
Depuis qu’il est devenu pape, il s’est également distingué en envoyant au poste de représentant du Saint-Siège en Egypte et auprès de la Ligue arabe le président du Conseil pour le dialogue interreligieux, l’archevêque britannique Michaël Fitzgerald, 68 ans.
Cette décision avait été interprétée comme une mise à l’écart de Mgr Fitzgerald, qui conduisait le dialogue de l’Eglise catholique avec l’islam.

Andrea Bambino (AFP)

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