«Le rapprochement (de l’Espagne) vers la France est aussi un rapprochement pour esquisser conjointement une stratégie à l’égard de l’Afrique du Nord, et que le message reçu à Alger, Rabat et Tunis soit le même, qu’il vienne de Madrid ou Paris», affirme le chef de la diplomatie espagnole.
De la part de l’Espagne, « il y aura dans les mois et les années à venir un pari stratégique fort pour tenter d’impulser un projet de modernité de l’autre côté de la Méditerranée », assure en outre M. Moratinos. Toutefois, estime-t-il, « pour que l’unité du Maghreb se fasse, il faut résoudre la problème du Sahara » occidental, ancienne colonie espagnole annexée par le Maroc et revendiquée par le front polisario, soutenu par l’Algérie. « En ce moment, un referendum sans solution politique pourraient nous mener à une crise généralisée en Afrique du Nord », juge-t-il.
Selon M. Moratinos, la conséquence immédiate serait: « on ne saurait pas comment répondrait la monarchie marocaine. Et les forces armées marocaines accepteraient-elles la défaite lors d’un referendum ? Deuxième option: le Maroc gagne le référendum et alors ? ».
Le chef du gouvernement José Luis Rodriguez Zapatero, qui s’est rendu au Maroc en avril dernier, ira le 14 juillet à Alger où il s’entretiendra avec le président Abdelaziz Bouteflika. Une visite prochaine à Tunis est également prévue, selon M. Moratinos. Le gouvernement socialiste espagnol élu en mars dernier, juste après les attentats islamistes de Madrid qui ont tué 191 personnes, a réitéré à plusieurs reprises que le monde arabe et les pays méditerranéens constituaient une des priorités de sa politique extérieure.
Le chef de la diplomatie espagnole annonce également dans son interview qu’il a l’intention de s’entretenir lundi à Bruxelles avec le ministre britannique des Affaires étrangères Jack Straw pour « essayer de récupérer le dialogue » sur Gibraltar, colonie britannique revendiquée par Madrid. La récente visite d’Anne d’Angleterre à Gibraltar, puis l’arrivée controversée au Rocher du sous-marin nucléaire britannique Tireless, malgré les requêtes d’annulation de cette visite formulées par Madrid, ont contribué à tendre l’atmosphère entre les deux capitales européennes.