Un projet en cours pour permettre aux épiciers des quartiers d’exercer des activités financières et postales ouvrant la voie devant l’arrivée des activités des néobanques au Maroc
Finances : Les consommateurs pourront dans un avenir très proche faire leurs emplettes du quotidien chez leurs épiciers mais également effectuer plusieurs services financiers offerts jusqu’ici quasi exclusivement par les établissements de paiements et banques. Éclairages.
C’est une révolution financière qui se profile à l’horizon dans les villes marocaines ou plutôt dans les quartiers. «Moul Hanoute», comprenez les épiceries et autres magasins de proximité dans les villes marocaines, seront autorisés à vendre des produits financiers. Certains de ces services financiers possibles jusqu’ici quasi exclusivement auprès des établissements de paiements et des agences bancaires seront disponibles chez «Moul Hanoute» à commencer par le transfert d’argent. Plus besoin de se déplacer dans une agence bancaire ou un autre établissement de paiement, votre épicier du coin pourra parfaitement vous aider à transférer ou recevoir des sommes d’argent ou bien déposer ou retirer un montant en cash.
Ce ne sont pas moins de 250.000 petits magasins qui sont répartis sur l’ensemble des villes.
Concrètement, il s’agit d’un projet mené par plusieurs institutions publiques afin d’autoriser les épiciers et autres magasins de proximité à exercer ce genre de service. Les responsables veulent ainsi permettre à «Moul Hnaoute» de diversifier ses rentrées d’argent et l’aider ainsi à mieux faire face à la concurrence de plus en plus féroce de la part des chaînes de «hard discout» et les grandes surfaces à travers le pays. Les responsables ont surtout été encouragés par le succès d’une première expérience lancée il y a quelques années auprès des commerces de proximité et qui se révèle être aujourd’hui, une véritable idée de génie. Il s’agit, bien évidemment, des recharges téléphoniques. Le succès a été tel que les recettes de la vente des recharges téléphoniques pour le grand public représentent, selon les statistiques officielles avancées par la tutelle, pas moins d’un tiers des revenus actuellement des épiciers des quartiers dans les villes marocaines. Il faut dire que les commerces de proximité exercent d’ores et déjà des facilités auprès de leurs clients. En décembre dernier, le ministre de l’industrie et du commerce, Ryad Mezzour, avait indiqué que le petit commerce domine toujours 80% du marché national du commerce de proximité. Dans sa réponse à une question orale à la Chambre des représentants sur les «programmes visant à soutenir les petits commerçants», le ministre avait souligné que le gouvernement travaillait à renforcer l’intégration des petits commerçants dans le réseau moderne de commerce, qui compte actuellement un millier d’unités contre 250.000 petits magasins. La même source avait souligné que le petit commerçant «est au cœur des préoccupations du gouvernement en raison de son rôle social fort, car il fournit des services financiers directs aux citoyens, puisqu’il prête en moyenne 840 dirhams à chaque famille marocaine», ajoutant qu’environ 30% de cette somme n’a rien à voir avec la marchandise vendue par le commerçant. Autrement, une fois autorisé à exercer des activités monétiques, «Moul Hanoute» disposera probablement du réseau bancaire le plus dense du pays. Mais ce n’est pas tout.
Consignation de colis
Le commerce de proximité ne se limitera pas aux services financiers mais proposera également des services postaux. Ainsi, le programme en cours de développement actuellement par les institutions du pays va permettre aux épiceries d’intégrer la chaîne de valeur du commerce électronique. Les responsables affirment qu’une bonne partie des clients n’est pas à domicile lorsque ses marchandises sont livrées par les enseignes de commerce électronique. Dans ce sens, le projet permet de livrer les colis en question directement chez des épiciers du coin pour que les clients puissent à la fin de leur journée de travail récupérer la marchandise auprès de «Moul Hanoute».
La consignation de colis devra constituer une source supplémentaire de revenus pour cette catégorie professionnelle. Celle-ci devra forcément travailler avec des banques mais également et surtout des opérateurs télécoms. C’est une véritable course contre la montre qui se profile à l’horizon entre les chaînes bancaires et les opérateurs de télécommunications sans oublier les établissements de paiement. Il faut préciser que l’un des opérateurs télécoms au pays se positionne déjà dans le domaine du transfert d’argent…
Le commerce de proximité ne se limitera pas aux services financiers mais proposera également des services postaux.
Le projet en cours va ainsi préparer le terrain devant l’arrivée au Maroc de service des néobanques. Selon la définition la plus répondue en ligne, «une néobanque, qui signifie stricto sensu « nouvelle banque», est un établissement de paiement dont les services sont accessibles principalement en ligne». Les néobanques sont généralement exclusivement accessibles depuis une application depuis un smartphone alors que d’autres utilisent des commerçants de proximité comme les buralistes. Elle se caractérise par son absence d’agences bancaires, comme la banque en ligne, mais s’en distingue par son absence de licence bancaire.
Leur nombre augmente avec la popularisation de l’usage du smartphone, notamment dans les pays émergents. Au Maroc, les services qui pourraient être commercialisés chez les détaillants sont, bien évidemment, le transfert d’argent, le paiement des factures d’eau, d’électricité et d’Internet. Dans une étape ultérieure, la piste des micro-prêts instantanés ou bien des avances sur salaires sera forcément étudiée. Ces derniers font fureur d’ailleurs dans des pays comme les Etats-Unis d’Amérique et plus proches de nous, en Afrique subsaharienne et de l’Ouest. Reste à savoir qui sortira renforcé dans cette nouvelle étape qui s’ouvre au Maroc: les banques qui sont déjà engagées dans un long processus de digitalisation ou bien les opérateurs de télécommunications qui disposent de plusieurs atouts et plus d’un tour dans leurs manches? Une chose est sûre, le paysage bancaire et financier au Royaume est à l’aube d’une nouvelle ère qui ne fera pas uniquement que des heureux…
Concurrence
Monétique
Il faut dire qu’un verrou a sauté lorsque le marché des TPE a été ouvert à la concurrence. Pour rappel et en date du 16 mai 2023, la société NAPS SA a saisi le Conseil de la concurrence concernant l’existence d’éventuelles pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre par la société Centre monétique interbancaire SA, dans le secteur des activités de paiement par Terminal de paiement électronique, «TPE» et de paiement en ligne via carte bancaire. Après examen des éléments de recevabilité prévus par l’article 26 de la loi 104-12 relative à la liberté des prix de la concurrence, le Conseil de la concurrence a déclaré par sa décision en date du 22/06/2023 que ladite saisine est recevable.
Après analyse de la structure du marché du paiement électronique, sa dynamique concurrentielle depuis la création du CMI, ainsi que les comportements des différents acteurs du marché, un rapport d’évaluation préliminaire a été établi par les services d’instruction du Conseil et a été notifié aux parties, ainsi qu’au commissaire du gouvernement. «Après discussions avec les parties en cause, ces dernières ont exprimé leur souhait de bénéficier de la procédure d’engagements précitée et ont soumis à ce titre au Conseil de la concurrence en date du 20 septembre 2024 une proposition d’engagements visant à améliorer le fonctionnement concurrentiel du marché du paiement électronique par carte. La mise en œuvre des engagements proposés aura pour effet direct le démantèlement du quasi-monopole que connaît actuellement le marché de l’acquisition par carte dominé par le CMI, qui accapare une part de marché de plus de 97%», avait annoncé le Conseil de la concurrence expliquant que, toutefois, le CMI continuera à opérer en tant que plateforme technique qui fournit ses services à tous les établissements de paiement (EDP) de la place dans des conditions tarifaires et non tarifaires équitables, transparentes et non discriminatoires.
Néo services
Prêt
Le petit commerçant est au cœur des préoccupations du gouvernement en raison de son rôle social fort, car il fournit des services financiers directs aux citoyens, puisqu’il prête en moyenne 840 dirhams à chaque famille marocaine.
Concurrence
Environ 30% de la somme prêtée par les détaillants et épiciers du quartier n’a rien à voir avec la marchandise vendue par ces derniers. C’est pour cette raison d’ailleurs que le petit commerce continue de résister aux grandes surfaces.
Factures
Les services qui pourraient être commercialisés chez les détaillants sont, bien évidemment, le transfert d’argent, le paiement des factures d’eau, d’électricité et d’Internet. Dans une étape ultérieure, la piste des micro-prêts instantanés ou bien des avances sur salaires sera forcément étudiée.