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Récupération politique : les agriculteurs marocains lancent un appel à la raison

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Les professionnels fustigent l’instrumentalisation des défis du secteur dans des manœuvres politiciennes lors d’une conférence organisée par la Comader

Evénement: Les agriculteurs marocains sont mécontents et ils le font savoir face à la multiplication des tentatives visant à instrumentaliser l’agriculture marocaine à des fins de politique politicienne. Eclairages.

C’est un véritable coup de gueule que vient de lancer les professionnels de l’agriculture marocaine face à des manœuvres politiciennes de plus en plus récurrentes visant à instrumentaliser les défis du secteur. C’est ce qui ressort des interventions des professionnels à l’occasion d’une conférence tenue récemment à Salé à l’initiative de la Confédération marocaine de l’agriculture et de développement rural (Comader). Dans le détail, les grands défis du secteur agricole au Maroc ont été au centre d’une conférence tenue, jeudi à Salé, à l’initiative de la Confédération marocaine de l’agriculture et de développement rural (Comader). «Cette rencontre est d’une grande importance, car elle constitue l’occasion d’éclairer l’opinion publique sur les sacrifices consentis par l’agriculteur et le rôle essentiel joué par les organisations interprofessionnelles dans le développement et la réhabilitation des filières de production», a affirmé le président de la COMADER, Rachid Benali, ajoutant que dans ce contexte, les professionnels souhaitent souligner plusieurs points. «Assez de pression sur l’agriculteur. L’agriculteur marocain, en particulier les petits et moyens producteurs, porte un lourd fardeau en raison de la sécheresse, des prix élevés des intrants, de la volatilité des marchés et du poids de la dette résultant des prêts bancaires… Continuer à tenir l’agriculteur marocain pour responsable de déséquilibres indépendants de sa volonté, comme la multiplicité des intermédiaires et des spéculateurs, ne sert ni le secteur ni la sécurité alimentaire», a affirmé M. Benali. Et de poursuivre: «Assez de fournir de fausses analyses et données. Malheureusement, nous assistons à la promotion continue d’analyses inexactes ou partielles, qui imposent des responsabilités infondées au secteur agricole et ignorent les contextes complexes dans lesquels l’agriculteur travaille, sans s’appuyer sur des données scientifiques précises et des approches réalistes et équitables qui tiennent compte des complexités du système agricole».

Soutien public, le grand malentendu

La question du soutien financier public a été également abordée. «Un certain nombre de fausses données circulant sur des questions sensibles affectant l’image du secteur agricole et les efforts des agriculteurs doivent être corrigées, notamment la question du montant du soutien financier public. Il est nécessaire de préciser que ce soutien, malgré son importance, ne couvre qu’une partie limitée des coûts réels supportés par les agriculteurs, notamment au vu des crises successives, depuis les répercussions de la pandémie Covid-19, en passant par les répercussions des tensions géopolitiques internationales, jusqu’aux années successives de sécheresse.

Le soutien financier, malgré son importance, ne couvre qu’une partie limitée des coûts réels supportés par les agriculteurs.

La répartition de ces soutiens s’effectue selon des normes claires et est soumise au contrôle des institutions compétentes, et tous les acteurs en bénéficient en fonction de la nature de leurs activités et de l’ampleur de leurs investissements», a expliqué M. Benali faisant savoir qu’en France par exemple, considérée comme la première puissance agricole d’Europe, environ 390 000 agriculteurs bénéficient d’un soutien annuel estimé à l’équivalent de 100 milliards de dirhams. En revanche, le soutien public destiné à environ 1,6 million d’agriculteurs marocains ne dépasse pas 7 milliards de dirhams, ce qui constitue un soutien exceptionnel ces dernières années.

«Par conséquent, présenter une image inexacte ou fragmentée du système de soutien reviendrait à mal comprendre l’opinion publique et entraînerait une perte de confiance dans les efforts déployés par l’État et les professionnels. Ce type de surenchères, qui vise à diaboliser le secteur et les agriculteurs, n’est dans l’intérêt d’aucune partie», a t-il expliqué.

Stop aux surenchères politiques

Cette situation pousse les professionnels à rendre public leur mécontentement. «Il est temps d’arrêter d’utiliser l’agriculture pour des calculs ou des conflits politiques, car il s’agit d’un secteur stratégique qui transcende les différences circonstancielles et nécessite un engagement national responsable. La situation actuelle exige que nous tous, en tant qu’institutions, professionnels et partenaires, invoquions un sens de responsabilité nationale et nous engageons dans une approche participative», a affirmé le président de la Comader.

Par ailleurs, Rachid Benali a relevé que l’agriculture marocaine fait face à de multiples défis, dont le déficit hydrique qui s’est aggravé en raison du changement climatique et de la succession d’années de sécheresse, la hausse des prix des intrants et la volatilité des marchés. Ces contraintes constituent un obstacle réel à la continuité des activités agricoles, menacent les équilibres économiques et sociaux en milieu rural et affaiblissent la capacité des agriculteurs, notamment les petits et moyens exploitants, à prendre des décisions d’investissement basées sur une vision claire, a-t-il fait remarquer.

Le président de la Comader a salué les résultats significatifs réalisés par l’agriculture marocaine et les acquis des agriculteurs depuis le lancement du Plan Maroc Vert. (D.R)

Malgré tous ces défis, l’agriculteur marocain poursuit, avec professionnalisme et responsabilité, son rôle vital d’approvisionnement régulier des marchés nationaux en produits agricoles, a souligné M. Benali, saluant les mesures prises par le gouvernement pour atténuer les effets du déficit hydrique, à travers la mise en place de programmes visant à réduire l’impact du manque de précipitations et de la conjoncture mondiale sur l’activité agricole.
Et de noter que ces programmes, qui interviennent en exécution des Hautes Instructions Royales, ont pour objectif de mettre en œuvre le programme de soutien aux agriculteurs et de la protection du capital animal et végétal.

Plan Maroc Vert

Le président de la Comader a aussi salué les résultats significatifs réalisés par l’agriculture marocaine et les acquis des agriculteurs depuis le lancement du Plan Maroc Vert qui continue à se concrétiser à travers la mise en œuvre de la stratégie «Génération Green», lancée par Sa Majesté le Roi en février 2020. Par ailleurs, M. Benali, qui a rappelé que le Maroc a récemment connu des précipitations et chutes de neige importantes ayant contribué, de manière relative, à améliorer les réserves hydriques nationales, notamment au niveau des barrages et des nappes phréatiques, a souligné la nécessité urgente d’une vision claire sur l’eau d’irrigation.

Il a, à ce titre, fait part de son inquiétude quant à la diminution continue des volumes d’eau alloués à l’irrigation, malgré ces précipitations et chutes de neige récentes, alertant que la poursuite de cette situation, dans un contexte de succession de saisons sèches et de rareté de pluies, pourrait menacer les investissements agricoles et les moyens de subsistance de milliers de familles en milieu rural. Dans ce contexte, et en raison de l’importance de l’agriculture en tant que moteur économique et pilier de la sécurité alimentaire et de l’emploi au Maroc, ainsi que de la nécessité de mettre en œuvre les Hautes Orientations Royales relatives à l’exécution du Programme national d’approvisionnement en eau potable et d’irrigation 2020-2027, la Comader formule une série de recommandations, a fait savoir M. Benali (voir encadré).

C’est le titre de la boite

Quotas

Eau. . Pour le président de la Comader, il s’agit de garantir à l’agriculture, dans toutes les circonstances, au moins 80% des besoins en eau d’irrigation, tout en assurant la coordination et l’harmonisation entre la politique de l’eau et la politique agricole, et de revoir les quotas d’eau alloués à l’irrigation à partir des barrages pour les augmenter en fonction des besoins des zones menacées de perte totale de production. Il a également insisté sur l’importance de permettre aux agriculteurs, autant que possible, d’avoir une visibilité claire et anticipée sur le calendrier et le volume de la distribution des quotas d’eau, en particulier dans les périmètres irrigués, avant le début de la campagne agricole, afin de planifier efficacement les opérations agricoles, en plus d’associer les organisations professionnelles aux commissions régionales et provinciales en charge de la gestion de l’eau.

«Nous réaffirmons que la réalisation de la justice hydrique, la gestion intégrée et équitable des ressources en eau constituent aujourd’hui une nécessité impérieuse pour assurer l’approvisionnement du marché national en produits agricoles afin de contribuer à la sécurité alimentaire de notre pays, garantir la durabilité des investissements agricoles réalisés, préserver les acquis en matière d’emploi agricole et protéger les producteurs et les agriculteurs», a-t-il conclu.

Carte de visite

Organisation

La Comader regroupe les interprofessions agricoles qui sont régies par la loi 03.12 et liées à l’Etat par des contrats-programmes signés avec le gouvernement.

Missions

La Confédération œuvre pour la coopération mutuelle et la défense des intérêts des agriculteurs et des professionnels auprès des administrations et des institutions publiques.

Recommandations

Le conseil d’administration de la Comader avait pris une décision concernant l’opérationnalisation des recommandations issues de la 1ère Rencontre nationale de l’agriculture.

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