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Un réseau des compétences marocaines, une priorité, un choix stratégique et royal…

© D.R

Entretien avec Karim Medrek, ambassadeur du Maroc en Suède

Karim Medrek, ambassadeur du Maroc en Suède, vient de créer le réseau des compétences marocaines pour répondre à la volonté royale de valoriser les Marocains du Monde et les fédérer autour d’un point commun; celui de véhiculer une image positive du Maroc. En Suède, ils sont quelque 35.000.

Et ils ont investi pour la plupart des secteurs de pointe grâce à leur niveau avancé d’études supérieures.
C’est dans ce contexte précis que le représentant de la diplomatie marocaine les a réunis pour d’abord échanger, apprendre à se connaître entre eux et surtout accompagner la politique liée au Label Maroc à l’extérieur des frontières. Il existe, par ailleurs, une réelle volonté entre le Maroc et la Suède d’amorcer de nouveaux projets de coopération, qui prendront forme prochainement, notamment sur les questions liées au climat, au genre et au développement durable. En voici les propos…

ALM : Vous venez de créer le premier réseau des compétences marocaines en Suède. Pourriez-vous nous en dire davantage quant à la démarche déjà ?

Karim Medrek : Cette démarche s’inscrit dans le cadre de la très Haute sollicitude qu’accorde SM le Roi aux Marocains du Monde. Plusieurs discours royaux ont consacré des chapitres entiers à cette importante frange de la population. Il est donc impératif que ma mission, en tant qu’ambassadeur en Suède, inclue la promotion du capital humain marocain résidant dans le Royaume scandinave. Dès mes prises de fonction en janvier dernier, je me suis investi à rentrer en contact avec les Marocains résidant en Suède, toutes catégories sociales confondue, indépendamment de leur profil social ou académique.
Cette initiative de prise de contact s’est vite concrétisée, à travers des rencontres individuelles et collectives sous différentes formes et les retours ont été très positifs. En effet, les Marocains rencontrés ont très bien accueilli et ont beaucoup apprécié nos échanges francs, sincères et inclusifs qui ont permis par la suite de préparer le terrain au lancement de ce réseau des compétences. Je voudrais rendre un vibrant hommage à tous mes compatriotes qui résident en Suède pour qui l’amour inné et l’attachement indéfectible à la patrie et à ses symboles sont une constante immuable. Je saisis également cette occasion pour vous faire une confidence : j’ai été ému de savoir que plusieurs compétences avaient pris l’avion pour un vol aller-retour le même jour, rien que pour assister à la réunion de lancement, une preuve inébranlable de leur fort engagement.

Combien de Marocains vivent-ils en Suède ? Et dans quels domaines évoluent-ils ?
Il est difficile de prédire le nombre exact des Marocains résidant au Royaume scandinave. Nos services consulaires, cela dit, estiment, en se basant sur plusieurs paramètres, comme le nombre des enregistrés au consulat, les passeports, cartes d’identité et autres prestations, le nombre des Marocains à 35.000, dont 20.000 à Stockholm et 15.000 dans d’autres villes, notamment Göteborg et Malmö.
Le lancement du réseau des compétences a permis de constater que les profils des Marocains résidant en Suède sont très divers… Leurs domaines d’expertise varient beaucoup partant de la médecine, l’intelligence artificielle, la nanotechnologie, le management, les nouvelles technologies, la recherche et développement, le commerce équitable, l’économie verte jusqu’aux milieux de la mode et des sports. Aujourd’hui, les Marocains, qui ont choisi la Suède pour y résider ou qui y sont nés, occupent des emplois hautement qualifiés dans des secteurs de pointe, qui exigent un niveau avancé d’études supérieures. De par mes différents contacts avec les autorités suédoises et avec plusieurs acteurs économiques, j’ai réalisé à quel point mes compatriotes sont une fierté pour le Royaume. Ils sont respectés et perçus comme étant des citoyens qui contribuent au développement économique et social de leur pays d’accueil.

Comment l’idée de créer un tel réseau en Suède vous est-elle venue ?

Comme je vous l’ai précédemment indiqué, la création du réseau des compétences marocaines en Suède a toujours figuré parmi mes priorités.
Cette idée a été encore plus renforcée lorsque j’ai pu constater de visu à quel point nos concitoyens marocains sont intégrés au sein de la société suédoise et occupent des positions qui font honneur au Royaume. Il était donc temps de voir naître, comme c’est le cas ailleurs, un réseau de ces compétences qui met en lumière leur richesse ainsi que leurs atouts et qui leur permet d’avoir une plate-forme pour contribuer, à leur tour, au rayonnement et au développement de leur pays.
Comment cette mobilisation peut-elle représenter un effet accélérateur sur les investissements des Marocains en Suède au Maroc ?

Ce réseau va servir, entre autres, de plate-forme d’informations sur les différentes opportunités et facilités qu’offre notre pays à ses citoyens résidant à l’étranger. Cette plate-forme interactive permettra de simplifier la compréhension des processus administratifs marocains pour les encourager à concrétiser des projets au Maroc. Cependant cette mobilisation exige des préalables relatifs à la révision du mode de gouvernance. Il me semble essentiel que la mobilisation de notre diaspora soit concentrée sur le développement des activités de la recherche scientifique, de R&D et d’innovation. Par ailleurs, et comme recommandé par le rapport de la Commission spéciale sur le nouveau modèle de développement, les Marocains du Monde pourront aider à lever des capitaux et développer de nouveaux partenariats en étant des relais. Les compétences marocaines à l’étranger représentent un fort capital humain et constituent un élément primordial pour toute entreprise. Le Maroc a aujourd’hui, plus que jamais, besoin de toutes ces énergies, leur savoir, leur savoir-faire, leur expertise ainsi que les valeurs nobles qu’ils véhiculent avec les autres membres de leurs familles.

Quels sont les moyens envisagés pour que les actions prévues dans ce sens soient efficaces ?

Il me semble que les meilleurs outils à mettre en place pour la réussite de toute action sont l’intelligence émotionnelle et rationnelle ainsi que la communication. Le premier s’avère nécessaire à ce genre d’exercice puisque nous n’avons pas à gérer ni à encadrer ces compétences composées de profils hautement qualifiés, débordantes de talents et patriotiques. Il serait donc plus adéquat de leur offrir un accompagnement avec les moyens législatifs et réglementaires.
Le deuxième, qui est tout autant important, renvoie à la communication, notamment moderne, ciblée et utile. Ce dernier jouera un rôle crucial dans cette opération qui fait partie d’une vision globale et d’une stratégie à moyen et à long termes. Comme vous le savez, après le discours royal, une réflexion qui se veut inclusive sur une réforme du cadre institutionnel est en cours. En outre, le projet de la loi-cadre formant la charte d’investissement consacre aux membres de la communauté marocaine établie à l’étranger des facilités pour les encourager à investir au Maroc.

Sur un tout autre registre, pourriez-vous nous parler des relations bilatérales entre la Suède et le Maroc ?

Les relations entre le Maroc et la Suède sont marquées par la profondeur des liens historiques et séculaires et par une volonté commune de travailler ensemble pour le renforcement de la coopération dans plusieurs domaines, notamment les énergies renouvelables, où notre pays se positionne comme un leader. Le Maroc et la Suède se trouvent sur la même longueur d’onde sur plusieurs questions globales, en l’occurrence le climat, la question du genre ainsi que le développement durable. Il existe donc une réelle volonté de part et d’autre d’amorcer de nouveaux projets de coopération, qui prendront forme, prochainement. Aujourd’hui, les responsables suédois sont conscients du rôle que joue le Maroc, grâce à la clairvoyance de son leadership et à la crédibilité des actions du Royaume sur la scène internationale. Dans le contexte de ce monde tant globalisé, je pense que nous avons besoin d’avoir une bonne connaissance mutuelle. Il s’agit, en pratique, d’avoir une conscience des opportunités offertes des deux côtés, et ce pour le bien de nos populations.

Quels seraient les différents domaines où le Maroc pourrait gagner en transfert de savoir-faire?

Comme je l’ai précisé auparavant, la recherche et développement, l’intelligence artificielle et son usage dans la médecine, l’innovation et l’éducation, le développement durable et la culture de la protection de l’environnement représentent des domaines, à titre indicatif, où le Maroc pourrait bénéficier de l’expertise suédoise.

Selon vous, comment un tel réseau de compétences pourrait-il accompagner dans ce sens ?

Un tel réseau sera, d’abord et avant tout, dédié aux compétences marocaines. Il servira d’espace de dialogue et d’échange où elles auront la latitude de le gérer, sur la base de la communication, du partage d’information et de la solidarité, et en fonction de leurs besoins et priorités.
L’écoute attentive des besoins et idées de cette élite à double culture est donc un préalable nécessaire. Ce sont des cadres hautement qualifiés qui sont conscients de leurs capacités scientifiques, intellectuelles et qui assument parfaitement leur double appartenance. Cette double appartenance que le Maroc a toujours défendue constitue aujourd’hui un levier pour que ces compétences complétement intégrées contribuent au développement de leur pays d’origine tout en continuant à travailler dans et pour le pays d’accueil. Ce réseau, une fois mûri et bien structuré, débouchera sur l’organisation d’activités et la mise en place de projets à convenir en fonction des objectifs fixés et du potentiel disponible. La feuille de route que se fixera une telle plate-forme concernera, sans doute, des initiatives ici en Suède mais également au profit du Royaume.
Parmi les objectifs de ce réseau se trouvent la constitution d’un vivier de compétences maroco-suédoises, la contribution à l’échange, au transfert et au développement de compétences entre la Suède et le Maroc ainsi que le soutien de toute action citoyenne qui consolide le mieux vivre-ensemble. De ce fait, l’accompagnement pourrait prendre plusieurs formes, allant de l’organisation de mission de consulting, de modules de formation en présentielle ou à distance, de contribution de création de partenariat en matière de recherche scientifique, à la création de joint-ventures, etc.

Quels mécanismes avez-vous prévus justement pour pouvoir mesurer les impacts d’un tel réseau ?

Comme je l’ai précisé, il s’agirait surtout d’un accompagnement, une fois les structures du réseau seront mises en place par les compétences elles-mêmes, je pense qu’elles auront suffisamment de maturité pour prévoir des indicateurs de «performance». C’est pourquoi l’appropriation de ce réseau par ses membres est fondamentale. Ensuite quantifier l’impact sera facile dans la mesure où le travail qui sera accompli fera l’objet d’une évaluation périodique.

Le mot de la fin peut-être….

Les compétences marocaines en Suède ont affiché clairement leur volonté de mettre leur savoir-faire et leur expertise au service de leur pays. Il est donc de notre devoir, à notre tour, de mettre en place une action forte et régulière de communication pour expliciter en premier lieu le cadre réglementaire et procédural et fournir des informations utiles à la fois sur les opportunités d’investissement et les structures de recherche scientifiques. Il s’agira ensuite de poursuivre les efforts de consolidation et de renforcement des liens culturels et immatériels avec cette part importante de la population marocaine. Cela nécessitera une révision de l’offre culturelle tout en consolidant et en fédérant les principaux acteurs institutionnels. Je reste pleinement confiant que ce réseau apportera sa contribution aux efforts des autres réseaux déjà en place et réussira à créer une synergie nécessaire et impérative pour aboutir à développer des pratiques collaboratives et d’intelligence collective.

 

 

 

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