«Ba Azizi» : «Je suis très content d’avoir eu enfin la carte d’artiste»

ALM : Que représente pour vous le mois de Ramadan ?
Oujoud Boujemaa : Pour tout croyant Ramadan est un mois qui abonde d’infini et d’innombrables  bienfaits. Veuille Dieu que ce mois sacré soit pour  tout le monde, un mois plein de joie et de paix. C’est le mois de la miséricorde divine, où les coeurs s’unifient, et où les proches et les familles se rendent visite et se rencontrent.

Quels sont vos habitudes pendant ce mois ?
La première chose que je fais le matin, c’est le marché. Après les prières du Dohr et de l’Asr, j’écoute un peu de Coran.  Je romps mon jeûne, accomplis la prière du soir, puis je fais un petit tour à pied. Je pars rejoindre les anciens acteurs et camarades de théâtre qui se réunissent dans les cafés des artistes de l’ancienne médina de Casablanca notamment les cafés «Paris d’or» ou «Princière». Et puis je reviens chez moi. Mais jadis, pendant ce mois, je n’avais même pas le temps de voir ma famille tellement j’étais convié à diverses manifestations et événements.   

Comment se célébrait Ramadan quand vous étiez jeune ?
A une époque, avant l’arrivée de ce mois, tout un programme de soirées et de célébrations a été préparé. On accueillait ce mois avec un menu culturel et une ambiance plus conviviale que ce qui s’effectue actuellement. Durant les nuits, après que les mosquées se soient remplies pour la prière du soir, c’était au tour des  salles de cinéma et de théâtre de drainer du monde. Dans une même soirée, ces salles proposaient chacune en plus de la projection d’un film, un sketch ainsi que le spectacle d’un orchestre. Les gens sortaient jubilés après des soirées de la sorte.

Et actuellement comment trouvez-vous l’ambiance culturelle pendant ce mois ?
Actuellement après la prière, on a le choix entre cafés remplis de fumeurs qui s’acharnent sur leurs cigarettes, et avenues où on déambule à tort et à travers. Et de  plus en plus de gens préfèrent rester chez eux. Pour se divertir, ils n’ont de choix que de se complaire à regarder des programmes télévisés qui ne les satisfont aucunement. Où sont l’hilarité et la bonne humeur ?! les gens ont besoin de rire, non de savoir que le prix des denrées alimentaires ont augmenté. Mais où sont ceux qui font tordre de rire le spectateur. Quand on parle aux acteurs et réalisateurs de la nouvelle génération d’autres moyens et approches d’amuser le spectateur, ils disent que les acteurs comme moi viennent d’une autre ère et qu’ils sont dépassés. Mais alors, pourquoi ces nouveaux artistes ne font-ils pas rire les gens ?

Tous les Marocains connaissent Ba Azizi quand il le voit dans la rue. Comment vous vivez votre vie publique au quotidien ?
Dans la rue, tout le monde m’interpelle me félicitant, plaisantant avec moi, me demandant de mes nouvelles, comment je vais, pourquoi on ne me voit plus… et moi je partage cet engouement, badine avec tout le monde et explique les raisons de mon absence de la scène artistique. J’aime beaucoup cela. Et je réserve mon temps à chacun et c’est ce qui fait que je tarde pour faire mes courses et cela devient difficile à gérer pour ma femme quand elle attend les provisions (rire).

Pourquoi on ne vous voit plus ces derniers temps ? Etes-vous en train de préparer un projet?
Apparemment le temps des artistes de ma génération semble être révolu malgré nous.  Il faut que ces nouveaux réalisateurs profitent de l’expérience et de l’aura des anciens acteurs. Je ne comprends pas pourquoi ils passent à côté d’eux. Et puis pour les rôles de vieillards dans leurs films, ils devraient prendre de vraies personnes âgées, au lieu de maquiller les jeunes acteurs. Concernant mes prochains travaux pour l’instant, il n’y en a aucun pour le compte de la télévision ou du cinéma. Et puis pour trouver un rôle dans le cinéma par exemple dans les studios de Ouarzazate, il faut user de méthodes que je qualifie de «business», dans le sens cruel du terme et que je ne connaissais pas à mon époque. Ainsi actuellement, je me contente des fêtes et cérémonies dans lesquelles je travaille comme réceptionniste ou major d’homme. Et Dieu en soit loué, je vis bien ma vie et je l’ai bien vécu. Il eût un temps où Feu Hassan II nous faisait faire la moitié du tour du monde avec la troupe de Bouchaib El Bidaoui et d’autres artistes. Et puis je suis aussi très content d’avoir eu enfin la carte d’artiste. Même si j’attends toujours de bénéficier de ces avantages.