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Le cheikh qui murmurait à l’oreille des takfiristes

© D.R

Abou Hafs, ou Mohamed Abdelouahab Rafiki, est un salafiste wahhabite pur jus. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard qu’il s’appelle comme l’un des inspirateurs et fondateurs du wahhabisme saoudien, socle de la monarchie en Arabie d’avant la révolution pétrolière.
Un concours de circonstances a forgé le parcours hors pair de ce jeune cheikh à qui on confierait le bon Dieu. Le papa, le célèbre Ahmed Rafiki, aide soignant et « ancêtre » des Afghans marocains, fait partie des premières fournées d’islamistes marocains qui ont choisi de rallier le pays de Hamid Karzai pour lutter contre les troupes rouges de l’ex-Union Soviétique. Avant d’atteindre la majorité, Abou Hafs savait ce qu’était la guerre contre les « mécréants » dans un bourbier comme l’Afghanistan avec les moyens du bord et une foi à toute épreuve.
De retour au Maroc, comme le reste de la famille (et des hordes de désormais ex-moujahidine qui s’ennuient à mort) il s’attache à parfaire ses connaissances en théologie selon la ligne radicale qui lui a été inculquée dès son jeune âge.
L’étoile de Mohamed Abdelouahab Rafiki commence à « scintiller » de tout son éclat à la fin des années 1990 quand il commencera à faire le plein de fidèles (futurs adeptes, entre autres) dans plusieurs mosquées de Fès. Ses prêches dérangent, mais rassemblent. Il ne s’écarte pas d’une certaine ligne « éditoriale » faite essentiellement de la stigmatisation des Etats-Unis, des régimes arabes « traîtres » et de longues tirades qui frisent (un euphémisme) la pire des formes de l’antisémitisme, celui dont il abreuve ceux qui affluent des quatre coins de la capitale spirituelle, mais aussi des autres villes, pour écouter ses prêches du vendredi.
Finalement, le jeune prédicateur jette son dévolu sur la mosquée « El Berkani », celle qu’avaient accaparée, presque de force, les intégristes radicaux de Fès. C’est depuis le minbar de cette mosquée qu’il appelait les régimes arabes « traîtres » à ouvrir les frontières aux moujahidine désireux de se rendre en Palestine, en Tchétchénie et, en général, là où il y a des « frères musulmans » à soutenir.
Les dérives, accumulation des « succès » oblige, ne tardent pas à avoir lieu. Mohamed Abdelouahab Rafiki appelle à l’application de la Chari’a, seule loi valable selon lui. Ses paroles, la manière tétanisant les foules aidant, ne tombent pas dans des oreilles sourdes. Ses adeptes organisent, à cette époque-là, des raids nocturnes, sortes d’expéditions punitives (Taâzir), contre les foyers de la dépravation. Avec des dégâts et surtout des victimes. L’un de ces « soldats », lors du procès de Pierre-Robert et son groupe, détaillait le sort fait à ceux qui étaient « pris» dans un coin isolé de la ville en train de boire de l’alcool, d’accompagner une femme hors des liens du mariage ou de « voler un peu de plaisir ». Les victimes étaient en plus dépouillées de leurs avoirs, le cas échéant. Les autorités ne tarderont pas à s’apercevoir du danger que le jeune prédicateur et ses troupes représentaient pour l’ordre public en général. La mosquée « El Berkani » est prise d’assaut, des confrontations avec les adeptes de Mohamed Abdelouahab Rafiki ont même eu lieu.
Abou Hafs est arrêté une première fois en mars 2002, soit après plusieurs mois passés à cracher des opprobres sur une Amérique blessée qui s’était permise de s’en prendre à l’Afghanistan des Mollahs pour dénicher Ben Laden, l’incarnation, pour Abou Hafs, du musulman exemplaire.
Début de la deuxième semaine de mai 2002, Mohamed Abdelouahab Rafiki est condamné à six mois de prison ferme dont il ne purgera même pas la moitié. Gracié, il reprend sa croisade de plus belle contre les autorités et les « mécréants ». Il se prend surtout au jeu d’une sur-médiatisation orchestrée notamment par une presse espagnole qui a choisi de « délocaliser » à Fès. Rien ne trouve de grâce aux yeux de Mohamed Abdelouahab Rafiki : les lois modernistes adoptées par le Maroc sont une inspiration satanique susurrée dans l’oreille du «Makhzen» par l’administration américaine et financée par des fonds «sionistes». Même les autres mouvements islamistes n’échappent pas à ses sarcasmes. Le PJD est un parti d’islamistes domestiqués, voire vendus, qui ont préféré le confort des privilèges à la véritable voie de Dieu, disait un Mohamed Abdelouahab Rafiki intarissable.
Suite aux attentats de Casablanca, il est traduit devant la justice qui l’accuse d’être l’un des théoriciens (avec la clique des Fizazi et Kettani). Il en récolte pour vingt ans de prison ferme. Auparavant, et même après, il continue à déclarer que la haine aveugle qui a endeuillé Casablanca était l’œuvre de la DGST (Direction générale de la surveillance du territoire). Propos qui rappellent ces cinglés de la CIA et du FBI qui auraient orchestré les attentats du 11 septembre 2001 pour faire des milliers de victimes après avoir déconseillé aux « juifs » (quelque 400 !) de se rendre sur place…

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