La C.I.J a eu à connaître de tous ces documents et elle n’a pas manqué de retenir que «les éléments et renseignements portés à la connaissance de la Cour montrent l’existence, au moment de la colonisation espagnole, de liens juridiques d’allégeance entre le Sultan du Maroc et certaines tribus vivant sur les territoires du Sahara occidental» (§ 162 de l’avis de 1975).
Ces fondements historiques permettent de mieux appréhender les bases juridiques sur lesquelles repose le parachèvement de l’intégrité territoriale intervenue en 1975. Bases juridiques du parachèvement de l’intégrité territoriale : c’est par la déclaration commune du 7 avril 1956 que l’Espagne devait mettre fin à sa présence dans la partie Nord du Royaume du Maroc. Cette déclaration mentionne en particulier, en son paragraphe 2, que l’Espagne «réaffirme sa volonté de respecter l’unité territoriale de l’Empire que garantissent les traités internationaux. En fait, la colonisation espagnole devait se poursuivre dans plusieurs parties du territoire marocain qui ne seront rétrocédées que par étapes : Tarfaya (1958, Ifni (1969) et Sahara Occidental (1975). Les présides du Nord (Sebta et Mellilia) sont toujours l’objet du contentieux territorial maroco-espagnol.
S’agissant du Sahara, la demande marocaine de rétrocession a été permanente, depuis 1956. Parmi les manifestations de la volonté du Maroc de récupérer ses provinces du Sud dès le lendemain de son indépendance, on retiendra le discours historique fait par Feu Sa Majesté Mohammed V à M’hamid El Ghizlane en 1958. S’adressant aux Marocains du Sahara, il leur avait rappelé la perpétuelle allégeance que leurs ancêtres avaient présentée à Moulay Hassan 1er et leur avait promis une mobilisation permanente et totale du Maroc, jusqu’à la réintégration de tout le Sahara.
Dans le même sens, et dès son intronisation, Sa Majesté Hassan II avait réitéré cette position. Ainsi, lors de la première conférence au Sommet des Non-Alignés (Belgrade, septembre 1961). Il avait déclaré: «…Cette atteinte à l’intégrité territoriale de pays indépendants et membres des Nations unies crée un climat d’irritation et de provocation et constitue de la part des pays colonialistes une menace permanente pour la sécurité et la paix. Au Maroc, par exemple, l’Espagne continue d’occuper des régions entières au Sud de notre territoire : Saquia El Hamra, Ifni et Rio de Oro…». Au moment de son adhésion à la Charte de l’OUA, en 1963 le Maroc a réaffirmé sa position en formulant des réserves dans les termes suivants : «s’agissant de la réalisation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du Maroc dans le cadre de ses frontières authentiques, il est important que l’on sache que cette signature de la Charte de l’OUA ne saurait aucunement être interprétée comme une reconnaissance explicite ou implicite des faits accomplis jusqu’ici, refusés comme tels par le Maroc, ni comme une renonciation à la poursuite de la réalisation de nos droits par les moyens légitimes à notre disposition». Dans cette affaire, conformément à sa pratique, le Maroc a toujours cherché à aboutir à un règlement pacifique du différend en demandant à l’Espagne d’engager des négociations appropriées, et en saisissant les différentes Organisations internationales de ce dossier.
Répondant à cet appel, l’Assemblée générale des Nations unies, dans sa Résolution 2072 (XX) du 16 Décembre 1965, devait demander à l’Espagne en tant que puissance administrante «de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour la libération de la domination coloniale des territoires d’Ifni et du Sahara occidental et d’engager à cette fin des négociations sur les problèmes relatifs à la souveraineté que posent ces deux territoires». Il faut relever ici le fait pour l’Assemblée Générale de lier les deux questions concernant l’intégrité territoriale du Maroc. Les manœuvres dilatoires de l’Espagne allaient conduire l’Assemblée générale des Nations unies, à l’instigation du Maroc, à demander un avis consultatif à la C.I.J (résolution 3292 (XXIX) du 13/12/1974) sur la situation juridique du territoire à la veille de la colonisation espagnole, et en particulier ses liens juridiques avec le Maroc et la Mauritanie.
• D’après «Les documents du Sahara»