«Hassan, Hassan, Hassan…». Le vieux routier du cinéma marocain, Hassan Skalli, avait du mal à se frayer un chemin vers la scène installée en plein air, au centre de Zagora. Les enfants sautaient de joie, l’entouraient de tous les côtés pour le saluer. Hassan Skalli, ému, se penchait pour embrasser ses fans qui s’accrochaient à lui et le suivaient en clamant son prénom. Pour ces enfants, c’est un rêve que de rencontrer une vedette de ce calibre. Un rêve commun, en fait, dans toute cette région où le cinéma manque énormément.
Les habitants sont venus très nombreux, ce soir du 13 juin, voir les stars du grand écran, en escale, à Zagora, tout au long de quatre jours. Des occasions comme celles-ci, seul le Festival du film transsaharien pouvait la leur offrir. Pas de paillettes ni de strass, l’événement, qui fête sa quatrième année, n’a pas la prétention d’attirer les projecteurs sur les podiums, mais sur la province en elle-même. Pas aussi simple que cela puisse paraître.
L’ouverture sur le 7e art représente tout un projet pour le Conseil provincial du tourisme (CPT) de Zagora qui tente, depuis trois ans déjà, de creuser un itinéraire vers son objectif. «C’est un défi qu’on a décidé de relever malgré toutes les difficultés qui peuvent le freiner», déclare Mohamed Ali El Hilali, président du CPT et du festival. Pour ce natif de Zagora, le choix est fait et la bataille contre le manque de moyens et des infrastructures s’impose en unique recours du désenclavement de la province. «Nous voulons que ce festival prenne l’image d’une protestation contre l’oubli de Zagora. Et c’est à travers cet événement que nous voulons créer des vecteurs de développement pour toute la région», explique M. El Hilali. Lorsqu’on l’interroge sur le budget, c’est avec un sourire qu’il répond : «Vous savez, la première édition, nous l’avions organisée à 30.000DH seulement. Certains ne nous croyaient même pas et pourtant, c’est la vérité ! Nous n’avons jamais prétendu décrocher les budgets faramineux qu’emploient d’autres événements culturels». Les professionnels du cinéma sont des partenaires indissociables du projet tout aussi que la population. Ils participent activement au festival à travers les nombreuses associations locales que compte l’ensemble de la région.
L’engouement des jeunes pour le cinéma laisse les intervenants épatés. L’intérêt pour le cinéma est bien là, reste à savoir si ce festival fera concrètement de Zagora «une terre de prédilection» pour le 7e art. «Un projet est en cours pour créer des zones touristiques sur la route menant à l’aéroport. C’est là où naîtront des studios de cinéma», assure le président du CPT. Une zone de 100 hectares a été délimitée dans ce but. L’ouverture de l’aéroport de Zagora, prévue dans quelques jours, devra accélérer la cadence. En attendant, le Festival du film transsaharien ne ménage aucun effort pour convaincre producteurs et réalisateurs de venir dans la région. «Nous comptons signer un partenariat avec Ciné-movie d’Italie pour un soutien logistique plus important à ce festival. Dans les années à venir, nous comptons inviter des vedettes du monde entier», ajoute M. El Hilali. Grâce au festival, Zagora a bougé : la Maison de la culture vient d’ouvrir ses portes et toute une association sera constituée pour se consacrer à l’événement. Beaucoup d’ambition, Zagora en donne la preuve.
• DNES à Zagora Leïla Hallaoui