Je n’ai pas pour habitude de commenter une décision de justice. Militant pour un Etat de droit, je m’impose le respect de l’appareil judiciaire même en critiquant ses imperfections. Cependant des débats annexes apparaissent et m’interpellent. Ainsi, plusieurs confrères se sentent choqués par l’utilisation de dispositions pénales dans un délit de presse. C’est encore un bêtise enveloppée dans un habit libertaire. Les codes de presse, partout dans le monde, offrent des garanties à l’exercice du métier de presse. Ils présupposent cependant la bonne foi. Donc, quand ils jugent une affaire, c’est la qualité du travail d’investigation du journaliste qu’ils jugent. Dès que le plaignant prouve que le média en question était de mauvaise foi, que son objectif était crapuleux par exemple, le procès balance en pénal et les juges ont souvent la main lourde dans ce cas. De la même manière qu’on ne peut imaginer un journaliste poursuivi pour conduite en état d’ivresse jugé és-qualité, on ne peut refuser l’application des dispositions pénales à l’encontre d’un journaliste qui, en toute mauvaise foi, a diffamé, publié une fausse information en étant convaincu qu’elle est fausse pour nuire à un tiers, ou qui publie un pamphlet calomnieux vis-à-vis d’une personne. Le pénal, quel que soit le code de presse établi, planera toujours au-dessus des journalistes, dès que la mauvaise foi est établie. Pour certains juges, celle-ci commence par un geste que tous les rédacteurs en chef font quotidiennement : envoyer un droit de réponse à la poubelle. Dans le cas Lmrabet, tout ceci est aggravé par la sacralité de la question du Sahara et le passé délictueux de l’individu.
Légaliste, je me suis intéressé aux suites juridiques de la décision du tribunal. Lmrabet n’est plus journaliste de par la loi.
Dès lors, chaque fois qu’il usera de cette qualité, il aura fait de l’usurpation de fonction. Ses amis qui vont l’interviewer, s’ils veulent rester dans la légalité, ne devraient pas le présenter comme tel, pour éviter l’accusation de recel et de complicité dans l’usurpation de fonction. Moi, je commencerai à l’appeler Oustad. Chaque fois qu’un présentateur-télé nous présente un Oustad, le spectacle est garanti: c’est une tête à claques, un zéro flapi, qui raconte des conneries et croit avoir en son quart d’heure de gloire grâce à une télé peu regardante.
Redevenons sérieux. La liberté de pensée non plus ne doit pas être servie comme un dogme transformé en cheval de Troie par les historiquement faillis. D’abord, certaines positions ne sont pas des opinions mais des délits. Il en est ainsi de l’incitation à la haine, au crime et de la trahison. Ensuite, et c’est là l’essence de mon propos, il y a une différence entre avoir une opinion et militer pour elle. Abdellah Zaâzaa a fait de la prison pour atteinte à la sûreté de l’Etat. Il se proclame toujours républicain, sans être inquiété. La différence, c’est qu’aujourd’hui, il ne fait pas dans le prosélytisme, ne cherche pas à mettre sur pied une organisation pour atteindre cet objectif. Qu’il y ait un,dix, ou mille Marocains convaincus des thèses du Polisario est acceptable, qu’ils se transforment en courant visant à ouvrir un front à l’intérieur du pays relève de la justice… martiale. C’est l’a-b-c du légalisme. Les avocaillons qui cherchent toujours l’incident de prétoire pour justifier les procès qu’ils perdent, devraient revoir leurs gammes et savoir que leur prétendu engagement ne justifie pas leur ignorance des textes.
Si Tamek pensait ce qu’il pensait dans son coin, personne n’irait l’inquiéter. Il serait dans la position de l’amateur de joints qui achète sa consommation personnelle. Là, il complote contre le Maroc, à visage découvert, sur papier glacé s’il vous plaît. Dès lors, il fait dans le grand trafic, fatalement toutes les finasseries seront balayées un jour et il devra en payer le prix devant la justice.Moi, j’ose faire du prosélytisme pour une drogue, shootez-vous sans modération à l’espoir, parce que malgré les difficultés, les erreurs, les résistances, le flot assourdissant des enflures, ce pays recèle des motifs d’espérance, une histoire, un horizon. Le reste est question de forces sociales en présence. Ce combat, là dépasse de loin les épiphénomènes et leur écume.