Chroniques

A dire vrai… Le chapelet de jours

© D.R

Une année s’achève, une autre s’annonce. Comme un leitmotiv, cette phrase revient, encore et encore, dans les écrits, dans les commentaires, à chaque passage d’une année à l’autre.

Et comme si elle souscrivait à un rituel, l’humanité célèbre ce passage avec force de feux d’artifices, de flots d’alcool, de montagnes de victuailles, et un foisonnement d’embrassades. Avec les nouvelles technologies, les sept milliards de terriens ont découvert l’expression instantanée de vœux. À l’approche du mythique nouvel an, ils se mettent à pianoter sur leurs téléphones portables et envoient des SMS à leurs proches, leurs amis, leurs connaissances, et même ceux qu’ils connaissent à peine qu’ils intègrent dans des envois en rafale, pour le plus grand bonheur des opérateurs de réseaux téléphoniques.

Et l’on se prend, pour certains, à voir partir une année pleine de souvenirs à jamais évanouis, en se demandant si la nouvelle apportera les mêmes joies. Ou bien, pour d’autres, on se sent soulagé à l’idée de ranger l’année écoulée dans les oubliettes, espérant de meilleurs moments avec celle qui se présente.
Curieuse frénésie que celle qui s’empare du monde, d’un bout de la planète à l’autre lorsque l’horloge sonne minuit le 31 décembre.

Pourtant… Qu’a donc de si particulier ce moment ? Et pourquoi l’homme éprouve-t-il ce besoin de découper le temps en tranches ? Car c’est bien de cela qu’il s’agit, n’est-ce pas ?
La notion d’année qui rythme nos vies date de l’époque où on croyait que la Terre occupait le centre de l’Univers, lorsque les hommes primitifs observaient le firmament soir après soir, prirent conscience de la Lune et voyaient ce croissant s’épaissir pour former un disque éclatant, puis redevenir de plus en plus mince pour disparaître, pour vite réapparaître dans le ciel et recommencer un nouveau cycle.

Il ne fut pas difficile pour nos ancêtres d’établir que ce cycle durait 28 ou 29 jours et de se mettre à mesurer le temps avec les phases de la Lune, inventant ainsi les premiers calendriers, les calendriers lunaires.
Depuis, pourquoi avons-nous eu recours à une année de 365 jours ? En astronomie, une année astronomique correspond à deux occurrences successives d’un événement lié à la révolution d’un astre autour d’un autre. S’agissant de la Terre et du Soleil, une année compte 365,24219879 jours, le quart de jour indiqué par les décimales est accumulé et constitue le jour supplémentaire de l’année bissextile.
Les Égyptiens furent les premiers à s’apercevoir, il y a 6.000 ans, que douze mois étalés sur une période de trente jours créaient un excellent calendrier des saisons. Ils ajoutèrent cinq  jours pour arriver aux 365 d’une année.  On l’appela alors l’«année du Nil».  

Pour leur part, les Romains utilisèrent un calendrier de 304 jours étalés sur 10 mois qui débutait à l’équinoxe de printemps et se terminait au solstice d’hiver.  Comme leur année était plus courte que l’année solaire, ils la firent coïncider avec le cours des saisons en faisant un cycle de 4 ans, au cours duquel fut ajouté, de 2 ans en 2 ans, un 13e mois (surnommé Mercedonius).

Reste à savoir qui a décidé du moment où la position de la terre dans le ciel marquerait le début du calendrier ! Jules César, conseillé par l’astronome égyptien Sosigènes, fut le premier à décider qu’une année serait réglée sur le cycle du Soleil et durerait 365 jours, moyennant l’ajout d’un jour chaque quatrième année, puisque la durée réelle est de 365 jours et quart, donnant lieu à l’année Bissextile.  

Plus tard, le moine Denys le Petit proposa à l’Église de compter les ans à partir du 1er janvier suivant la naissance de Jésus. Ainsi, le 1er janvier de l’an de Rome 754 devint le 1er janvier de l’ère chrétienne.
Mais l’on oublie que la frénésie du «nouvel an» ne concerne qu’une partie de la population mondiale. Musulmans, juifs, bouddhistes, et bien d’autres peuples, ont chacun leur propre calendrier ! Alors, où se termine l’année qui s’achève et où débute la nouvelle ? Si tant est qu’il y ait une fin et un début d’années, notion toute relative selon les lieux et les formations sociales.
Les hommes s’évertuent à voir dans le nouvel an, non le passage continu entre éléments d’un même ensemble comme en physique classique, mais une rupture entre années, chacune étant un quantum de temps, au début et à la fin délimités comme en physique quantique. Peut-être que parmi les raisons qui poussent les hommes à concevoir les années sous forme de quantas qui se succèdent comme les perles d’un chapelet, au lieu du continuum sans fin du temps qui s’écoule inexorablement, serait ce besoin de rompre avec une période de temps dite année que l’on se dépêche de ranger comme l’on rangerait un paquet, avec ses joies et ses épreuves, et de vite accueillir une nouvelle, espérant qu’elle sera meilleure, pleine de bonheur, de plaisir et de santé.

Les années ont beau se succéder, les mêmes problèmes accompagnent toujours les hommes : guerres, famines, destruction de l’environnement, pauvreté, malnutrition, économies cupides, injustices, racisme, maladies… dans un continuum que n’influent ni les vœux, ni les feux d’artifice, ni les fêtes exubérantes. Seule la volonté des hommes de vaincre ces fléaux changera le cours du continuum…, ou la nature des perles qui ornent le chapelet de jours.

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