Chroniques

Autrement : Afrique noire, Afrique blanche

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Le nouvel Etat a été proclamé le 9 juillet, suite à un référendum qui s’est déroulé en janvier, à travers lequel presque 99 % des voix exprimées ont opté pour l’indépendance.  Cette indépendance du Soudan du Sud représente un cas de figure tout à fait singulier. C’est la première fois que se trouvent ainsi modifiées, en Afrique, les frontières héritées du colonialisme. Ancienne possession égyptienne (au début du XIX ème siècle ) puis britannique (à la fin du XIXème siècle), le Soudan, depuis son indépendance en 1956,  représentait le plus vaste Etat d’Afrique, devant l’Algérie et le Congo-Kinshasa. Avec la création du Soudan du Sud, la «République du Soudan» perd un quart de son territoire. Le processus qui a conduit à l’indépendance des provinces du Sud remonte, en fait, à la création de la République du Soudan en 1956. A cette époque, ceux qui avaient dirigé le combat pour l’indépendance refusèrent aux provinces du Sud l’Etat fédéral qu’ils avaient pourtant promis. Une première guerre de seize ans ( jusqu’à 1972 ) se déroula. On se mit à espérer dans un meilleur respect des populations du Sud par le Nord. Mais les espoirs furent vite déçus. La guerre reprit en 1983. Elle a cessé vingt-deux ans plus tard, en 2005, avec l’octroi d’une large autonomie aux provinces du Sud, et la promesse d’un référendum sur l’autodétermination en 2011. Des millions de personnes, au Sud principalement, sont mortes du fait de ce conflit. Il faut souhaiter que le nouvel Etat parviendra à se construire rapidement. Le Soudan du Sud bénéficie, pour cela, d’importantes réserves de pétrole, mais sa population est une des plus pauvres du monde, une des moins éduquées, des moins formées. L’idéal, bien entendu, serait que la République du Soudan et le Soudan du Sud parviennent désormais à tisser entre eux des liens de coopération fondés sur le respect et la justice. Mais cela est loin d’être gagné. La République du Soudan, dirigée par le général Omar el-Béchir, continue de s’enfoncer dans un autre conflit sanglant: celui du Darfour, qui a provoqué plus de trois cent mille morts depuis 2004. Les «deux Soudan» témoignent de la grande fracture qui marque tout le continent africain: celle qui sépare Afrique blanche et Afrique noire. Le nom du Soudan, « Bilad as-Sudaan», signifie «Pays des Noirs». Mais les Noirs ont été dominés par les Arabes et les Berbères. Dans toute l’Afrique, l’esclavage des Noirs a été largement pratiqué par les Arabes, bien avant que ne se développe la traite négrière européenne vers les Amériques. Au Sud-Soudan, les Noirs ont d’autant plus souffert qu’ils sont majoritairement soit chrétiens soit animistes, et que, de ce fait, ils ne pouvaient pas accepter l’islamisation totale de l’Etat soudanais qu’ont tentée ces dernières décennies les dirigeants de Khartoum. Mais d’autres pays, où Noirs et Blancs sont tous musulmans, connaissent, de manière plus ou moins tragique, cette déchirure à dimension raciale: Tchad, Mauritanie, Mali, Niger… L’Afrique a grandement besoin que soient révisées les relations entre les Arabes, les Berbères et les Noirs.

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