Evidemment, nous ne parlons pas du Jean-Marie le Pen français, qui aime afficher son antisémitisme, mais de son «clone» israélien, Avigdor Lieberman, chef du parti ultranationaliste «Israël Beitenou», qui est arrivé en troisième position aux dernières élections législatives israéliennes le 10 février dernier. La question doit être posée aux Juifs de France comme à ceux d’Israël ou des Etats-Unis, car la réponse qu’ils pourront donner sera déterminante quant à l’avenir du processus de paix.
Yvet Avigdor Lieberman est né en 1958 dans l’actuelle Moldavie, alors sous domination soviétique. Il fait donc partie de cette très importante tranche de la population israélienne actuelle qui est originaire de l’ex-Union Soviétique: 1 200 000 personnes, soit environ 18 % de la population. Des Juifs – ou assimilés – qui ont émigré par centaines de milliers dans les années 1970 puis dans les années 1990, venant de Russie, d’Ukraine ou de Biélorussie. Des Israéliens récents qui ne connaissent rien de l’histoire et de la culture du Proche-Orient, qui n’ont aucun lien avec le monde arabe avec lequel ils ne se sentent aucune affinité, et qui sont enclins à donner leur vote aux formations politiques les plus hostiles aux Arabes.
Arrivé à vingt ans en Israël, le Russophone Avigdor Lieberman a appartenu durant plusieurs années à un parti raciste, le Kach, qui multipliait les provocations contre les Arabes d’Israël et qui a fini par être interdit. Pour lui, les Arabes de nationalité israélienne (ceux qui n’ont pas été expulsés de leurs terres en 1948, et qui, avec 1.300.000 âmes, composent presque 20% de la population israélienne) constituent une «troisième colonne» qui doit être dépossédée de la nationalité israélienne et transférée dans les territoires palestiniens. Or malgré (grâce à?) ce racisme anti-arabe revendiqué, Lieberman s’est retrouvé, en 1996, directeur de cabinet de Benyamin Netanyahou quand celui-ci a été Premier ministre pour la première fois. A deux reprises, le leader d’extrême-droite a eu en charge un ministère sous le gouvernement d’Ariel Sharon. Et depuis les élections du 10 février, il fait l’objet de toutes les sollicitations de la part des deux personnalités politiques susceptibles de former un nouveau gouvernement (Benyamin Netanyahou et Tzipi Livni).
Le mode électoral israélien, qui repose sur un système de proportionnelle intégrale, favorise la multiplication des partis, et implique que toute «majorité» gouvernementale est le résultat d’alliances surprenantes. Dans un pays où la plupart des habitants se déclarent non-croyants, les petits partis religieux ultra-orthodoxes peuvent néanmoins imposer leur loi. Et un Avigdor Lieberman empêcher les avancées vers une paix juste.
On aimerait voir se développer, en Israël, un mouvement comme « S.O.S. Racime», où des centaines de milliers de jeunes Israéliens seraient capables de dire, en parlant de leurs compatriotes arabes: «Touche pas à mon pôte»! Rêve inaccessible?