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Autrement : Ramadan, la liberté ou la contrainte

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L’affaire s’est déroulée le troisième jour du mois de Ramadan, en fin d’après-midi, au sein d’un quartier très populaire de la ville de Lyon, deuxième ou troisième ville de France. Un homme de 45 ans, d’origine africaine, buvait tranquillement un café avec quelques amis à la terrasse d’un débit de boissons. Il est alors interpellé agressivement par un autre homme de 25 à 30 ans, apparemment d’origine maghrébine, qui lui reproche de ne pas observer le jeûne rituel. Le consommateur, qui se trouve être, de fait, d’origine musulmane (il aurait pu ne pas l’être) répond qu’il vit sa religion comme il l’entend. Son agresseur appelle alors des amis. L’Africain noir est roué de coups jusqu’à sombrer dans le coma. Il s’y trouvait encore deux semaines après les faits. Toujours dans la région lyonnaise, à Fontaine-sur-Saône, c’est un garçon de 13 ans, de famille européenne et chrétienne, qui a été blessé par une pierre lancée à son visage par deux adolescents qui l’avaient croisé. Ceux-ci lui reprochaient de tenir une sucette à la bouche en pleine journée de Ramadan! Suite à ces deux évènements, le recteur de la Grande Mosquée de Lyon et le président du Conseil régional du culte musulman ont dû prendre la parole pour dénoncer l’intolérance et l’usage de la violence. En France comme ailleurs dans le monde, le mois de Ramadan est vécu par l’immense majorité des musulmans comme un temps où l’on s’efforce de faire la paix à l’intérieur et autour de soi. Le jeûne a pour vocation d’apaiser les tensions, les émotions, et d’ouvrir à des démarches de pardon et de réconciliation. Les faits évoqués ci-dessus sont, heureusement, une goutte d’eau  (fut-elle de trop) dans l’océan des attitudes positives et fraternelles que suscite le mois de Ramadan. Néanmoins, ces incidents marginaux ont le mérite de nous interroger sur la liberté que les gens ont, ou n’ont pas, d’observer ou de ne pas observer le jeûne de Ramadan dans les sociétés musulmanes comme dans les pays d’immigration. Ces dernières années, au Maghreb, des groupes ont demandé que la liberté de ne pas jeûner soit officiellement reconnue. «Quelle valeur a un jeûne observé sous la contrainte sociale, et non pas par adhésion profonde de l’individu», interrogent-ils? Selon des enquêtes conduites ces dernières années par l’institut de sondage IFOP,  20% des personnes qui, en France, sont considérées comme musulmanes, n’observeraient pas réellement le jeûne. Combien sont-ils, dans nos pays du Maghreb, à ne pas jeûner, ouvertement ou en faisant semblant? Aucune enquête sérieuse n’existe. Le Coran appelle fortement les musulmans à l’observance du jeûne annuel du mois de Ramadan. En même temps, si on lit avec attention le texte, on s’aperçoit qu’il est dit que «ceux qui pourraient jeûner et qui s’en dispensent, devront, en compensation, nourrir un pauvre» (Sourate 2, 184). Avec le temps, la Tradition est devenue plus exigeante!

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