Chroniques

Cadrage : L’USFP autrement

Bien calé dans son fauteuil de Premier secrétaire de l’USFP qu’il a arraché non sans difficulté, Mohamed Elyazghi ne sera plus ce leader classique, le zaïm qui gère tout seul les affaires du parti. Son élection à la tête de l’USFP s’est faite d’ailleurs sur la base d’un contrat qui le lie aux membres du Bureau politique. Pas de chèque en blanc. Un contrat contenant des conditions et des objectifs globalement en rapport avec la réorganisation des instances de l’USFP et de la révision de son mode de fonctionnement en privilégiant le principe de concertation et l’obligation de résultats. En cela, l’USFP a innové en faisant de son nouveau patron une sorte de président du conseil d’administration d’une entreprise privée dont les membres peuvent à tout moment remettre en cause son leadership au cas où les clauses du contrat qu’il a signé ne seraient pas respectées. Autrement dit, M. Elyazghi est condamné à réussir dans un domaine complexe où deux plus deux ne font pas forcément quatre. C’est dire la difficulté de la tâche de l’intéressé qui a besoin de déployer tous ses talents pour rencontrer les attentes et les exigences de ses grands électeurs. Cette belle unanimité reconstruite qui a présidé à son adoubement après une longue période de divisions internes risque d’être fissuré à la moindre incartade et les querelles de personnes mises en sourdine de ressurgir à la première salve tirée par tel ou tel clan. Chassez le naturel, il revient au galop… C’est connu, les vieux réflexes ont la vie dure. Il ne suffit pas de décréter leur fin pour qu’ils disparaissent en laissant la place à une nouvelle culture politique. Politique chevronné, Mohamed Elyazghi aura fort à faire pour réconcilier les différentes composantes de l’USFP, lui, qui a été longtemps accusé par ses adversaires du parti d’être un sectaire qui a assis la mainmise de son clan (de Rabat) sur l’appareil du parti au détriment d’autres groupes comme celui de Casablanca. Un homme ainsi décrit peut-il bénéficier de la confiance totale de son équipe ? En fait, Mohamed Elyazghi doit prendre le parti de la réforme et de l’audace. Le principal défi auquel il doit s’atteler pour faire de l’USFP une formation moderne et dynamique c’est de favoriser l’émergence de courants d’idées dont les chefs de file et les adhérents initient un débat contradictoire au sein du parti sur les sujets qui agitent la société et les problèmes qui intéressent le pays. En un mot, Mohamed Elyazghi et l’USFP ne doivent pas se complaire dans l’unanimisme et le consensus au risque de provoquer la léthargie et tuer l’esprit critique nécessaire à toute réflexion dynamique. L’USFP doit envisager son avenir politique autrement, loin de toute démagogie et langue de bois. Abderrahamne Youssoufi avait bénéficié de la légitimité politique et de la prééminence de l’âge. N’en déplaise à ses détracteurs, l’ex-Premier ministre a contribué grandement à la mue du parti qu’il a sorti du ghetto oppositionnel. Mohamed Elyazghi, son successeur, doit mobiliser les siens pour les années à venir autour d’un projet novateur qui reste à inventer.

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