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Chronique du psy : L’Afrique prend son destin en main

Divorce 
Paris, comme Madrid, comme Lisbonne, comme Londres, comme Bruxelles, a raté plusieurs bons virages dans sa politique africaine. Des ratages que le Maroc a exploités

Par Dr Imane Kendili
Psychiatre-addictologue

Malgré tous les indices clairs et évidents mis en exergue par les pays africains, les Français comme d’autres pays européens continuent de faire grand cas de cette phrase de François Mitterrand prononcée en 1986 : «Les colonies ne cessent pas d’être des colonies parce qu’elles sont indépendantes». C’est là une grave erreur de jugement doublée du déni des mutations connues par cette Afrique qui refuse la tutelle des anciens colons, et qui met en place, sous l’impulsion du Maroc et de la politique du Roi Mohammed VI, une véritable coopération Sud-Sud, décomplexée et surtout résolument tournée vers un avenir commun pour les Africains.

Et c’est là que la politique du Maroc dérange la France qui accuse Rabat de marcher sur ses plates-bandes. Une accusation vide de sens, puisque Paris, comme Madrid, comme Lisbonne, comme Londres, comme Bruxelles, a raté plusieurs bons virages dans sa politique africaine. Des ratages que le Maroc a exploités, négociant les bons virages et s’installant comme une grande puissance régionale et surtout comme l’unique pays d’Afrique du Nord à la fois stable et solide.

Car l’Algérie est au bord de l’implosion, la Tunisie, c’est fini, la Libye patauge dans le chaos, la Mauritanie tire la langue, le Mali a été presque décimé par la France et tout un Sahel, géré par Paris comme une mine à ciel ouvert pour l’uranium et autres terres rares. D’où toutes ces manœuvres de déstabilisation de la part de certains conglomérats européens, qui avaient entraîné dans leur sillage Madrid et Berlin, ces deux dernières capitales ayant depuis revu leurs positions et reconsidéré leurs relations avec Rabat, sur des bases plus saines et surtout plus claires. C’est à partir de ce prisme qu’il faut comprendre les déplacements d’Emmanuel Macron à Alger où il a été hué en affichant un grand sourire figé. C’est aussi à partir de cet angle qu’il faut comprendre le hara-kiri de Tunis et l’annonce d’une hypothétique visite du président français au Maroc, dans une ultime tentative de faire son mea culpa, après tant d’erreurs et de ratés.

Aujourd’hui, le climat général est le même d’une part à l’autre de cette immense Afrique. De Rabat à Djibouti, en passant par Niamey, Ouagadougou, Dakar, Bamako, N’Djamena, Yamoussoukro, Yaoundé, Libreville, Bangui, Antananarivo, Tripoli, en ajoutant, malgré les jeux de façade, Alger et Tunis, Paris perd la main sur une grande partie de l’Afrique. Avec l’année 2022 comme un point culminant dans ce divorce, désormais consommé, entre plusieurs pays africains, jadis amis et partenaires d’une Europe, qui a montré une grande fébrilité dans la gestion de ses relations bilatérales et continentales avec une Afrique, qui a changé de visage, qui a évolué, qui a décidé depuis au moins une bonne décennie de prendre son destin en main et de rejeter toute forme de tutelle quels que puissent en être l’origine, les tenants et les aboutissants.

Un changement de paradigmes si profond qui a échappé à l’acuité déclinante d’une diplomatie française vieillotte et sur le déclin. Ce qui a donné corps à des ruptures sans retour, comme c’est le cas avec le Mali qui a renvoyé l’ambassadeur français chez lui faisant suite au départ des derniers soldats français présents sur le sol du Centrafrique, avec, partout, de la mer Rouge, à l’Atlantique en passant par le versant Ouest de la Méditerranée, la multiplication de pancartes affichant toutes un message clair et sans appel: «France dégage !». En cause, et sans ambages, la politique agressive et inacceptable du président Emmanuel Macron à l’égard d’une partie de cette Afrique qui a aujourd’hui d’autres ambitions, qui voit le futur de ses populations en dehors du viseur français, en concluant des partenariats avec d’autres puissances, notamment la Chine et le Maroc, qui, depuis 23 ans, a fait de l’Afrique une priorité politique, sociale, culturelle et humaine nationale.

Cela se traduit par un rejet simple des modalités de fonctionnement de la politique à la Française avec ses « partenaires » africains, allant jusqu’à irriter au plus haut point un État si fidèle et si allié comme le Sénégal qui s’aligne sur le Mali, sur le Burkina Faso, sur la République Centrafrique, sur le Cameroun, sur la Côte d’Ivoire, sur le Niger, sur le Tchad, sur la Libye et même sur un pays comme le Djibouti, chasse-gardée de Paris, qui, lui aussi, revendique son indépendance, dans la foulée des mouvements de contestation et de rejet qui passe d’une région à l’autre comme une traînée contagieuse, assimilée à un réveil, à un éveil, que beaucoup considèrent comme tardif, tant la France a été injuste dans ses rapports avec ses anciennes colonies qu’elle entend toujours diriger au doigt et à l’œil en leur dictant leurs politiques, le climat des affaires favorable pour la France et sa vision des «droits de l’Homme», carte toujours brandie quand il s’agit de traiter avec ces «alliés» du Sud.

Le tout mâtiné de leçons surannées que les Africains ne veulent plus recevoir de personne, à plus forte raison d’une France enlisée dans des crises sans fin à la fois politiques et sociales, sans parler du profond et grave marasme économique qui la pousse à vouloir aller encore puiser dans le réservoir africain qui lui a servi de soupape de secours et de vache à traire pendant plus d’un siècle et demi.

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