Chroniques

Élections européennes : Le printemps de l’extrême droite ?

Mustapha Tossa Journaliste éditorialiste

Il est vrai que cette vague de l’extrême droite ne touche pas équitablement l’ensemble des pays européens et que le miroir français peut avoir un effet déformant, voire trompeur. Mais le tournant radical pour l’Europe est là.

Il n’y a aucune exagération à affirmer que l’ensemble de l’Europe retient son souffle à la veille de ces élections européennes. La raison principale est que pour la première, ce que le président Emmanuel Macron avait appelé «des vents mauvais», soufflent violemment sur le Vieux Continent, le menaçant d’une vague brune d’une extrême dangerosité.
Si les prévisions des sondages se confirment, il s’agirait d’un vrai printemps de l’extrême droite qui voit ses thèses xénophobes et ses stratégies d’exclusion validées par les urnes, là où les plus optimistes ne voyaient qu’une poussée de fièvre temporaire tout juste apte à créer un frisson éphémère.
Il est vrai que cette vague de l’extrême droite ne touche pas équitablement l’ensemble des pays européens et que le miroir français peut avoir un effet déformant, voire trompeur. Mais le tournant radical pour l’Europe est là. Et toute la question est de savoir quel impact pour les relations du Vieux Continent avec son environnement… Une Europe moins ouverte et plus que recroquevillée sur elle-même ?
Certes, l’expérience française avec la victoire écrasante annoncée pour le Rassemblement national de Jordan Bardella et de Marine Le Pen est susceptible de jeter un grand rideau de fumée et de confusion sur ce scrutin. La performance française annoncée de l’extrême droite ne signifie nullement un changement structurel dans les forces qui géreront demain le Parlement européen et après demain les structures de l’Union européenne comme la Commission européenne.
Mais la France en tant que pays moteur de cette union subira, à n’en pas douter, un effet blast si cette extrême droite parvient à réaliser les pronostics de sondage. Enhardi par la promesse d’une telle victoire, le couple Bardella/Le Pen commence déjà à imposer ses diktats. Dissolution de l’Assemblée nationale et organisation de législatives anticipées. D’ailleurs à la veille de ces élections, lorsqu’il était question d’un débat au sommet entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron, pour donner le change à celui qui avait opposé Jordan Bardella au Premier ministre Gabriel Attal, la cheffe de l’extrême droite française a posé comme condition à la tenue de ce débat que le président de la république puisse s’engager à revenir aux urnes si son parti perd la bataille européenne.
En France, même si cette tendance de réussite de l’extrême droite se confirme, elle reste encore enrobée du mystère de savoir si elle le doit au triomphe de ses idées ou simplement à la personnalité charismatique de Jordan Bardella dont le jeunesse et le style adéquat avec la communication des réseaux sociaux ont fait des miracles.
D’ailleurs à ce sujet, cette victoire attendue de l’extrême droite et le fait qu’elle pourrait la devoir aux seules qualités de Jordan Bardella n’est pas sans provoquer des grincements de dents au sein du Rassemblement national. De nombreuses voix tentent de creuser un fossé entre le leadership du mouvement de l’extrême droite entre une candidate déjà déclarée à la prochaine présidentielle, Marine Le Pen avec toutes les tares qui la caractérisent, et le fait que le jeune Jordan Bardella pourrait être plus efficace dans cette course présidentielle.
Sur le plan international le plus proche de l’Europe, les différentes capitales du Maghreb suivent avec un intérêt certain l’évolution de ces élections européennes. Elles sont au cœur de deux grandes problématiques qui ont nourri cette campagne et mis en scène la possible victoire de l’extrême droite. La première est celle, effervescente, de l’immigration et des dangers supposés qu’elle représente sur les équilibres économiques et sociaux de ces pays européens. La second est l’obsession grandissante à l’égard des populations de confession musulmane perçues comme une menace sécuritaire grandissante.
Et si l’on rajoute les multiples partenariats économiques tissés entre l’Union européenne et ces pays du Maghreb, la moindre secousse ou la moindre remise en cause pourrait susciter craintes et raidissements des deux côtés de la Méditerranée.
Et puis réalité intangible, ces pays du Maghreb disposent d’importantes communautés installées dans les pays européens et qui, au vu de leur massive exportation de devises, participent efficacement à l’essor économique de ce pays du Maghreb. Le printemps de l’extrême droite, s’il se confirme, aura un impact majeur sur la qualité des relations que ces pays européens entretiennent avec la région du Maghreb.

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