Chroniques

Et la jeunesse devint souirie !

© D.R

Pourquoi a-t-on si peur de la jeunesse, pour quelles raisons obscures refuse-t-on de lui faire confiance, quel raisonnement nous pousse à ne voir notre jeunesse que sous un prisme négatif ?


Ceux qui ne conçoivent le lien à cette jeunesse qu’en termes de rapport de force, qui ne voient en elle qu’une «masse dangereuse» trouveront bien évidemment 10.000 réponses à mes questions, qui auront pour noms : délinquance, hooliganisme, drogue, violences urbaines…or ils ne feront là que confondre causes et conséquences. Loin de moi l’idée de nier tous ces maux, de transformer tout jeune en doux bisounours mais c’est lorsque l’on fait confiance à nos jeunes, lorsqu’on les met en situation de responsabilité et qu’on leur offre les espaces et les moyens de s’exprimer, de s’épanouir, en un mot «de vivre», que l’on voit alors à quel point cette jeunesse est capable du meilleur.

Je l’expérimente depuis très longtemps, au quotidien, dans le mouvement associatif mais je voudrais ici vous en donner un exemple à très grande échelle, que je viens de vivre. Il y a quelques jours se tenait la 20ème édition du festival Gnawas d’Essaouira : les conditions cette année étaient idéales, outre l’anniversaire, les dates correspondaient à la fin du mois de Ramadan et à la fin de la période des examens. Des milliers de jeunes ont ainsi convergé vers Essaouira, venus de tout le Maroc – bien sûr les adultes, les familles étaient également au rendez-vous- mais l’immense majorité des spectateurs était composée de jeunes, par centaines, par milliers.

Pendant 4 jours cette jeunesse s’est totalement approprié Essaouira, comprendre ici le verbe «approprier» dans le sens positif du terme «faire sien, avec respect et pour le meilleur». Bien sûr les scènes de spectacle ont chaque soir fait le plein de jeunes qui ont chanté, qui ont dansé, qui se sont défoulés, dans une belle mixité -et toutes origines confondues- mais il fallait aussi voir la ville de jour : toutes les rues, les places, les ruelles, les terrasses de café, les petites gargotes de msemens, la plage…se transformaient en agoras, en scènes musicales, en espaces de jam, en lieux de rencontres, en aires de jeux…partout la jeunesse était chez elle ! Il est vrai que c’est l’un des miracles d’Essaouira que faire en sorte que tout un chacun s’y sente chez soi, tant son passé -devenu aussi son présent- fait de métissage, de convivance, de diversité respire le vivre ensemble.

Ce qui fait la force de ma démonstration, c’est que alors que des milliers de jeunes étaient concentrés dans une seule ville, aucun débordement grave, aucune agression violente, aucun incident majeur n’a été à déplorer, aucune dégradation n’a été constatée. La ville, ses habitants, les festivaliers, «l’Autre» ont été respectés, en se sentant pleinement libres, en ressentant l’esprit qui régnait, les jeunes se sont approprié la ville tout en la «protégeant» et les inévitables altercations, accrochages, coups de sang se sont «auto-réglés» sans dégénérer.

D’ailleurs tout(e) Marocain(e) soucieux de nos jeunes, curieux de sa société, concerné par l’avenir de notre pays avait alors la possibilité de voir toute notre jeunesse représentée en un seul lieu : tous les looks, toutes les coupes de cheveux, tous les dialectes, toutes les expressions typiques et spécifiques de toutes les régions de notre pays ici en osmose !
Essaouira nous a offert -une fois de plus- le visage du Maroc qu’il nous faut privilégier, qu’il nous faut construire encore et toujours, la ville nous a dit que «oui, c’était possible»: être populaire sans être populiste, permettre à tous les Marocains de se mélanger sans le côté horripilant du bling-bling, laisser l’expression libre sans donneur de leçons, respecter la jeunesse et lui donner la possibilité et l’envie de respecter elle aussi, marier harmonieusement droits et devoirs.
Que ne nous inspirons nous de cet exemple pour en faire un «modèle» de ce qu’il est possible -et souhaitable- de faire en matière de citoyenneté, de culture, d’accès aux loisirs, de respect et de comportement par, pour et avec nos jeunes…
En fait durant ces 4 jours Essaouira -digne de son patrimoine du vivre ensemble culturel, cultuel, humain, a été un parfait laboratoire du vivre ensemble inter-générations.

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