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Favoritisme, copinage, corruption… y a-t-il place à la méritocratie ?

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Quand le critère de sélection ne s’appuie pas essentiellement sur le principe du mérite, cela compromet l’efficacité de toutes prestations de services publics, affaiblit la confiance des citoyens et peut même porter préjudice à l’image du pays.

À l’heure où un nombre croissant de responsables politiques font l’objet de critiques intenses, d’enquêtes et d’examens approfondis, sans pour autant rendre possible une quelconque interrogation sur les raisons profondes des malaises, on se demande s’il n’y a pas moyen d’éviter de se retrouver confrontés à des situations aussi embarrassantes. Certes, il faut bien dénoncer et condamner sévèrement les auteurs et complices impliqués dans des affaires de corruption, dans des activités criminelles et en lien avec toutes pratiques malhonnêtes commises dans l’administration publique (législatif, exécutif et judiciaire). Toutefois, pour éviter d’en arriver là, il faudrait peut-être, avant tout, identifier l’origine du mal. Pour y remédier le plus rapidement possible, la logique est très simple: revoir de fond en comble le système actuel de recrutement dans certaines hautes fonctions gouvernementales, politiques et publiques. Les personnes à retenir doivent, avant tout, répondre à des exigences minimales (honorabilité, patriotisme, sagesse…), conjuguées à leurs talents et compétences.

Au fait, à la source du problème, on retrouve parfois, pour ne pas dire souvent, de sérieuses allégations de copinage, de favoritisme, de népotisme, de tribalisme ou de corruption, sous différentes formes dans l’embauche à des postes de haut rang. Quand le critère de sélection ne s’appuie pas essentiellement sur le principe du mérite, cela compromet l’efficacité de toutes prestations de services publics, affaiblit la confiance des citoyens et peut même porter préjudice à l’image du pays. Allons droit au but: que peut-on et que devrait-on faire pour permettre à notre pays d’aller encore plus vers l’avant, d’éviter tous scandales à l’avenir et de poursuivre son développement au cours des prochaines décennies? En réalité, il n’y a absolument rien de sorcier là-dedans: tout simplement, nous préoccuper de la fiabilité du système actuel de gratification, de promotion ou de nomination à des postes importants. Il est inconcevable que l’on tolère le fait que des personnes incompétentes et non éthiques puissent accéder aux postes les plus élevés. En prenant conscience de cette réalité et en faisant les bons choix, cela réglerait dans une large mesure une bonne partie des problèmes liés à la bonne gouvernance et à l’ordre public.

Le recrutement au mérite pour une bonne gouvernance
Dans la majeure partie des pays, le mérite n’a jamais été évoqué par des textes légaux ou réglementaires. Pourtant, cette notion dans le monde du travail insinue l’existence d’une adéquation de la compétence du candidat avec la fonction qu’il occupe, surtout quand il s’agit de postes de rang élevé et de fonctions hautement spécialisées. Il est maintenant temps de bâtir un système de nomination aux postes de rang supérieur qui se fonde, principalement, sur le mérite. L’on entend souvent dire que lorsque l’on recrute une personne incompétente, cette dernière se sentirait redevable envers l’Administration et serait plus susceptible d’être loyale, malgré la médiocrité de ses rendus. Cela est totalement faux, on le sait bien, du moins à moyen ou long termes. Prenons un exemple concret comme celui d’un malade – pas n’importe lequel – celui qui choisit, en toute conscience, liberté et connaissance de cause, son médecin. S’il a le choix : aura-t-il recours à un praticien hautement qualifié pour se faire soigner ou bien se contentera-t-il d’un docteur docile, plus ou moins incompétent, qui lui fasse ressortir un diagnostic biaisé, relatant à la lettre ce qu’il aimerait bien entendre, au détriment de sa santé. Il s’agit là d’une question essentielle liée à la vie humaine. Un tel raisonnement devrait être appliqué à la lettre quand il s’agit du choix de fonctionnaires de haut rang.
Cela peut concerner tous les domaines stratégiques, allant, essentiellement, de l’économie aux finances, en passant par la sécurité, la défense, la diplomatie, la politique, le religieux, les hydrocarbures, les énergies, le tourisme, le commerce, le sport et le développement.

Quelle déontologie pour les hautes fonctions ?
Tout dirigeant ou responsable de haut niveau doit être retenu sur la base de son honorabilité, sa grande compétence et sa maîtrise de la politique publique. Appelé à se déplacer constamment dans un milieu véritablement international, divers et dynamique, il représente le miroir de son pays, censé jouir de qualités éthiques élevées, de grandes capacités de diplomate, d’une brillante élocution, d’une force de persuasion et de valeurs de citoyenneté et de patriotisme inégalées. Il est aussi supposé connaître l’abécédaire de la discipline dont il est en charge. Il est sous les radars de l’opinion publique nationale et internationale. A la moindre erreur, il alimente de vives tensions dans un monde en proie aux demi-vérités, à la désinformation et aux complots de tous genres, pouvant nuire, consciemment ou non, à la bonne réputation du pays. Ce n’est donc pas une histoire de tendance si de plus en plus d’Etats recourent à des codes de déontologie pour s’assurer que les hauts fonctionnaires gouvernementaux, politiques et publics respectent les normes les plus élevées de probité. Le mois dernier (17 janvier 2024), Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que dieu l’assiste, a émis Ses Hautes instructions pour « moraliser la vie parlementaire par l’adoption d’un code de déontologie juridiquement contraignant pour les deux Chambres de l’institution législative». Cela est plus que rassurant car ça veut dire qu’il y a une véritable prise de conscience au plus haut sommet du pouvoir. Ainsi et dans le sillage de cette importante préoccupation royale, il est probablement certain, que après la Chambre des représentants et celle des Conseillers, viendra le tour à d’autres institutions stratégiques pour intégrer et répandre, en long et en large, la dimension éthique au sein de leurs organisations, en agissant prioritairement sur leurs systèmes et outils de management. Finalement, ce sont les priorités nationales et les objectifs de développement du pays qui doivent toujours primer, jamais les intérêts d’ordre personnel de tel ou tel haut responsable ou les programmes de tel ou tel organisme. En étant convaincu qu’il faut s’inscrire dans ce cadre-là et en présence de lignes de conduite déontologiques bien précises et de régimes pénaux sévères, tout grand commis de l’Etat saura honorer en tous points ses engagements en matière de responsabilité, de transparence et d’éthique. Puis, pour ceux qui n’y croient pas, la déontologie n’est pas une simple mode, ça devient aujourd’hui une nécessité de plus en plus pressante.

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