Chroniques

Génération digitale : Le piège technologique

© D.R

Certains parents rivalisent entre eux pour faire de leurs enfants des addicts aux écrans dans une absence totale de conscience de la gravité de telles pratiques.

Cela dépasse l’entendement, à plus d’un égard. Cela va au-delà de l’irresponsabilité et du je m’en-foutisme le plus basique. C’est inouï. La scène est choquante: un gamin de cinq ans. Il porte encore des couches, mais on lui a déjà mis un engin entre les mains. Il manie déjà le iPhone, le iPad, l’ordi de sa mère et se permet de corriger sa sœur de deux ans son aînée, pour avoir mal su cadrer pour prendre une photo à partir d’un smartphone. Il lui prend le téléphone des mains en rouspétant montrant des signes d’énervement et d’irritabilité manifeste pour un bébé de son âge.
Parce qu’à cinq ans, on n’est pas censé hurler et taper des pieds pour parler à sa sœur ou à sa mère. Pourtant, les parents rigolent face à cette scène, comme si de rien n’était!

J’ai assisté ébahie à une telle démonstration de technicité, moi qui suis encore à balbutier devant un engin aussi sophistiqué. Sa maman, mon amie, m’a expliqué que c’était top que son fils sache manier tout cet attirail, parce que, dit-elle : «L’avenir est dans la machine». Et elle se lance dans un discours qui donne froid dans le dos prônant l’importance d’habituer les enfants dès le bas âge à utiliser la nouvelle technologie, pour devenir plus « intelligents», précise-t-elle. Le père, de son côté, dit regretter ne pas avoir eu la chance de bénéficier de tels gadgets quand il était petit. J’avoue que je ne voudrais pas être là pour voir ce temps, pas si lointain que cela, où les machines vont nous supplanter comme des propres à rien, surtout avec des parents aussi obnubilés par la technologie, par toutes les nouveautés high-tech qui sortent sur le marché. J’avoue également que c’est bien d’être de son époque, de ne pas vivre et mourir bête, mais de là à encourager son fiston à devenir une bête de foire, qui arbore toute sa panoplie électronique en maniant les claviers et autres touches invisibles avec autant de dextérité, il y a un pas que certains parents veulent bien franchir. D’ailleurs, certains parents rivalisent entre eux pour faire de leurs enfants des addicts aux écrans dans une absence totale de conscience de la gravité de telles pratiques. Le hic est que ces enfants n’ont plus d’autre vie que celle liée à l’électronique. Téléphones, tablettes, consoles de jeu… Et puis un gamin de quatre ans avec une profil sur les réseaux sociaux, là je dis que je suis franchement arriérée. Je réalise que j’appartiens véritablement à un autre monde. Imaginez que l’enfant a déjà ses contacts, ses amis, ses «j’aime » et il est déjà contrarié quand on n’a pas commenté une de ses photos. Ce gosse n’est pas un cas unique. Loin s’en faut. Dans de nombreuses familles, on se vante de ce type de dérives et on s’auto-congratule devant de telles acrobaties technologiques les érigeant en preuve ultime d’intelligence. Alors que c’est là tout le contraire qui se joue. L’enfant avance dans la vie, sans contact réel avec le vrai monde, coupé des réalités, piégé dans des univers virtuels aux conséquences néfastes sur sa santé physique et mentale. Des comme ce petit sont légion et souffrent déjà de plusieurs troubles du comportement. Ils sont colériques. Ils mangent mal. Ils dorment mal. Ils sont constamment dans une surexcitation alarmante. Sans oublier le fait qu’ils ne peuvent plus se passer des gadgets qu’on leur a mis entre les mains. Ils ne connaissent aucun autre jeu ou jouet. Ils n’ont aucune relation avec des enfants de leur âge. Ils sont déjà dans une forme d’isolement social. Mais les parents refusent de le voir. Pire, cela les arrange que leur enfant les laisse tranquilles en jouant à son smartphone! Cette forme de démission des parents se répand de plus en plus dans une société marocaine qui a du mal à gérer son rapport aux outils informatiques et high-tech.
Face à cela, je me demande sérieusement ce que sera ce môme dans dix ans. Comment va-t-il évoluer? Quels seront ses centres d’intérêt? Sera-t-il épanoui? Heureux? Équilibré? J’espère pour lui qu’il aura une vie réelle, loin du virtuel.

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