Chroniques

La France à l’heure des grands choix !

Mustapha Tossa Journaliste éditorialiste
A la croisée des chemins   La France est aujourd’hui, et à la vieille de ce premier tour de ces législatives anticipées, divisée en trois blocs distincts qui aspirent chacun à décrocher la confiance des Français pour pouvoir former un gouvernement.

 

C’est ce dimanche 30 juin que les électeurs français vont se diriger vers les urnes pour élire un nouveau parlement après la dissolution opérée, à la surprise générale, par le président Emmanuel Macron. Jamais sans doute, depuis des décennies, la gravité des enjeux n’a été au rendez-vous avec cette densité. La meilleure preuve, un taux de participation historique est annoncé pour ce scrutin pour une société habituée à bouder les urnes et à produire un taux d’abstention des plus hauts. Depuis le soir de ce fameux 9 juin, date de la Bérézina présidentielle aux élections européennes, la France vit un rythme politique effréné.

Une campagne courte et rapide, avec énormément de fulgurances et de clarifications. Le tout sur fond de restructurations politiques lourdes. La France est aujourd’hui, et à la vieille de ce premier tour de ces législatives anticipées, divisée en trois blocs distincts qui aspirent chacun à décrocher la confiance des Français pour pouvoir former un gouvernement.
Le premier est celui dont l’étoile brille au firmament le rassemblement national dirigé par le jeune Jordan Bardella. Non seulement le RN a réalisé une belle performance aux européennes, mais il a aussi réussi l’exploit d’attirer dans ses filets une partie des républicains sous la houlette d’Eric Ciotti. Ce qui non seulement consolide l’indice de sa respectabilité politique et sa dédiabolisation déjà opérée par Marine Le Pen mais aussi augmente ses chances de réaliser un nouvel exploit pendant ces législatives. Petit bémol qui pourrait freiner de nombreux enthousiasmes, la décision du RN d’abandonner un certain nombre de promesses électorales phares qui avaient fait sa fortune politique et élargi sa base électorale. Ce qui a poussé certains éditorialistes à moquer cette stratégie en le baptisant «Le Renoncement national» au lieu du Rassemblement national. Un des grands mystères de ce premier tour est d’évaluer l’impact de ces renoncements sur l’électorat du RN. Vont-il donner un coup de frein à cette frénésie autour de l’extrême droite?

Le second bloc qui a créé aussi la surprise est le Front populaire. Une sorte de conglomérat des gauches qui, malgré les luttes intestines, les compétitions égotistes et mortelles, a réussi à voir le jour et à donner espoir à de larges franges de la société qu’il peut y avoir une autre voie autre que celle de l’extrême droite ou la majorité présidentielle. Le véritable carburant de la création de ce bloc est ce sentiment d’urgence qui a saisi ces derniers jours les Français face à l’hypothèse fort probable de l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir.

Il est vrai que ce Front populaire éprouve quelques difficultés médiatiques à se dépêtrer des accusations d’antisémitisme que la guerre israélienne à Gaza et ses conséquences en France ont produites, il n’en demeure pas moins que ce Front populaire s’est imposé aujourd’hui comme le seul rempart contre le cauchemardesque scénario, pour beaucoup, de l’extrême droite au pouvoir. Et c’est cette mission que le troisième bloc incarné par la majorité présidentielle ambitionnait de réaliser. En prononçant la dissolution dans ce contexte, Emmanuel Macron avait provoqué une onde de choc qui ferait craindre la victoire du RN et qui obligerait, par un réflexe pavlovien, les Français à se rassembler autour de sa majorité pour rejouer les enjeux des présidentielles de 2017 et 2022.

L’erreur d’analyse d’Emmanuel Macron est d’avoir sous-estimer la capacité de la gauche à se réunir sous un même front et à ne pas avoir prévu les craquements et les grincements de dents au sein de sa propre majorité. Pour illustrer ces failles, il suffit de citer l’ancien Premier ministre d’Emmanuel Macron Édouard Philippe qui accuse le président d’avoir tué sa majorité et l’actuel Premier ministre chef de la majorité, Gabriel Attal, qui demande aux Français de le choisir. Une posture de quasi-rupture quand on sait qu’il doit au président Macron toute sa carrière politique.

À la vieille de ce premier tour des législatives anticipées, la France se trouve à la croisée des chemins. S’il est exclu que le président Macron puisse retrouver une majorité même relative, les choix qui s’offrent aux Français sont les suivants : ou une majorité absolue avec le RN, ce qui relève de l’exploit. Ou une majorité absolue avec le Front populaire, ce qui relève du miracle. Ou pas de majorité du tout pour aucun parti. Ce qui a de fortes chances de créer une véritable crise de régime.

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