Dans la nature des choses, seuls les pays prêts à livrer bataille peuvent espérer prospérer. Cela s’annonce encore plus compliqué dans un monde prestement fragmenté où la compétition entre nations, caractérisée par des défis de plus en plus complexes et interconnectés, n’a jamais été aussi rude.
Nous vivons une Troisième Guerre mondiale, à forte connotation économique. Il s’agit d’une période de grands défis et d’évolutions historiques exceptionnelles.
Face à un système financier international en faillite, dans lequel les inégalités systémiques amplifient les inégalités sociétales, les puissances émergentes du 21e siècle – à l’instar de l’Inde en Asie, du Brésil en Amérique, du Maroc en Afrique et d’autres encore – semblent affaiblir le système multilatéral au profit de nouveaux accords bilatéraux ou d’arrangements régionaux et inter-régionaux.
Nous parlons de puissances régionales et il ne fait aucun doute, qu’en temps voulu, elles deviendront plus que cela. Un phénomène qui inquiète considérablement une minorité d’Etats qui refusent de croire à l’inévitable réalité concernant la nouvelle répartition des rapports de force sur l’échiquier des relations internationales contemporaines. En évitant de s’y plier, ils risquent – au-delà de leur perte du monopole de la gestion du pouvoir en Afrique – d’être les vaincus de la nouvelle économie.
Vivons-nous une période de déclin progressif de l’Union européenne ?
Tous les Etats passent par une période extrêmement difficile, suite à une crise économique mondiale d’une ampleur et d’une complexité sans précédent.
Malgré cela, le Maroc, bien que durement touché, y résiste et fait de son mieux, grâce à sa haute capacité à intervenir et maîtriser toutes sortes de tensions. Un atout qu’il continue de renforcer grâce à un resserrement qualitatif de ses partenariats, mais aussi à travers une interopérabilité et une coopération accrues en vue d’une croissance économique plus forte et d’un développement durable. En aspirant à être un partenaire qui traite d’égal à égal et avoir une relation d’amitié, mais surtout d’égalité et de réciprocité, le Maroc attise les frustrations de certains Etats qui échappent à la raison, en continuant à fonder leurs relations sur des pratiques anciennes, héritées de l’époque coloniale. Sans la moindre surprise, le Maroc est parfaitement conscient que ses réussites à l’international ne seront pas forcément applaudies.
D’ailleurs, il n’a pas trop fallu attendre puisque certains pays – surtout ceux en déperdition – ont vite dépêché leurs services secrets pour se livrer, au quotidien, en tout lieu et en toute occasion avec tous les moyens, licites ou non, à des manœuvres sordides, sous couverture de l’Union européenne (UE), pour porter atteinte à la réputation du Maroc.
Au lieu de se consacrer aux questions de fond et à des sujets véritablement critiques (détournements importants de fonds structurels au sein de l’UE, crise énergétique, crise sociale, crise climatique, crise alimentaire, …), l’Union européenne, instrumentalisée maladroitement, se perd dans des banalités au détriment de ses intérêts stratégiques majeurs.
A cela s’ajoute le fait que bon nombre de ses pays membres qui étaient – il y a quelque temps – les plus en avance ne sont plus forcément ceux qui bénéficient du plus grand dynamisme en termes d’évolution. Une situation qui s’est drastiquement aggravée suite au Brexit, au conflit ukraino-russe ou encore à la naissance de nouveaux paradigmes du XXIe siècle qui gagnent rapidement du terrain. Je ne crois pas qu’il soit utile de se voiler la face : nous assistons au déclin progressif de certaines grandes nations européennes qui ne semblent pas vouloir croire que la démocratie entre Etats est aussi importante que la démocratie au sein des Etats. Ce qui, par contre-coup, occasionne des dysfonctionnements insidieux et cumulatifs au sein des principales institutions de l’Union européenne.
La compétition entre nations requiert un renseignement extérieur ultra- performant
Dans un contexte géopolitique en plein bouleversement et en l’absence d’une superpuissance capable de punir les nations ignorant les droits d’autres nations ou de protéger les nations des empiétements d’autres, les Etats éclairés dépêchent leurs services de renseignement extérieur en vue de les aider à mieux anticiper et gérer les changements à venir, mais aussi à résoudre les problèmes et les défis – actuels et futurs – avant qu’ils ne s’amplifient.
Il est aussi important de souligner que la compétition entre nations repose de plus en plus sur le renseignement extérieur, lequel est censé faire preuve d’une vigilance permanente pour déjouer tous éventuels complots adverses.
A cet égard, beaucoup de pays ont très vite recensé les lacunes potentielles auxquelles il fallait remédier et les mesures imminentes à prendre, en apportant d’importants changements institutionnels, structurels et managériaux aux différentes composantes de la mosaïque du renseignement extérieur. Il n’y a là rien d’étonnant, d’ailleurs, puisque cela permet de devancer les manigances d’arrière-scène et de faire entendre les voix de la vérité à une opinion publique internationale mal informée ou souvent désinformée. Sans doute le temps est-il venu pour une mise en œuvre optimale des missions confiées par la Constitution de 2011 (article 54) au Conseil supérieur de sécurité.
Ce qui contribuerait grandement à mettre au point une stratégie nationale de sécurité extérieure fixant, notamment, les priorités majeures et les modalités d’action – en temps normal et en situation de crise – pour le renseignement étranger.
Par Lahrach Yassir
Docteur en droit/Expert en Intelligence économique
Analyste en stratégie internationale/Auteur du concept d’intelligence diplomatique