Chroniques

La victoire c’est gourmand et ça donne faim !

© D.R

Une victoire sans effort et sans labeur n’en est pas réellement une. Elle n’en aurait pas la même saveur. Elle ne serait pas savourée de la même sorte.

Imaginez-vous assis dans un restaurant à la décoration scintillante et extrêmement accueillante, celle du genre qui vous met l’eau à la bouche, à vos bouches de gourmands car dans ce lieu seuls les gourmands se précipitent.
Je précise que les fins gourmets sont des gourmands également car aussi fins gourmets qu’ils soient à force de fines gourmandises ils en deviennent gourmands.
Imaginons-nous, car j’ai envie d’y être avec vous dans cet endroit à propositions friandes et avides. J’ai eu d’un coup, comme un sentiment de passage à côté de quelque chose d’incontournable et de «à ne pas rater». Je vous accompagne donc dans cette expérience «culinaire» inhabituelle.
Bien installés, avec nos babines salivantes, imprégnés de saveurs et d’odeurs imposantes délivrées des fourneaux de cet établissement imaginaire, et surtout impatients, très impatients d’en découvrir le menu.
Le voilà maintenant entre nos mains, ce menu révélateur de tant de colossales suggestions.
Découvrons-le sans plus tarder !
Passons les entrées et mises en bouche et attaquons la lecture des plats principaux directement. Ne nous embarrassons point de lots de consolations, souvent appelés «starters», et choisissons nos premiers prix mérités et bien mérités, c’est-à-dire le cœur du repas. Un bon repas ça se mérite !
Nous n’en avons que faire, nous gourmands que nous sommes, d’amuse bouches et d’«appetizer» , de toute cette minimalisation tellement tendance et présente de nos jours qu’elle n’a plus de minimaliste que le nom.
Lorsqu’on vous reçoit avec autant de vigueur et de grandeur, on doit en assumer la table. Un restaurant richement décoré en vaut une table copieusement garnie et nous le valons bien aussi gourmands que nous sommes là à renifler, voir, entendre et attendre. L’appétit ne vient pas seulement en mangeant, mais aussi en regardant, en sentant et en écoutant !
Trêve de suspens et de mises en situation !
Dans ledit menu on nous propose cinq conceptions, «Espoir», «À Boire», «Echappatoire», «Armoire» et «Victoire». Chacune sera accompagnée de garnitures, de sauces et de dérivés de sauces de nos choix. Un exemple : «Espoir» avec sauce «Croire». À nous de faire nos compositions. Une légère douceur offerte par la maison en fin dudit repas viendra sucrer nos esprits et faire digérer notre choix. Un petit soupçon de velouté de fraîcheur d’amour aux grains de folie, imperceptiblement petit, voilà la récompense. Si vous en voulez plus de ce velouté, il vous faudra faire preuve de patience et d’indulgence qui eux ne sont servis qu’en plat du jour les lundis uniquement. Une sage «alimentation» pour démarrer une prometteuse semaine.
Que choisissez-vous ? Vous !
Moi, je suis tentée par «Armoire» ! ça pourrait dissimuler quelque chose d’encore plus gourmand que toutes ces suggestions. Une espèce d’investigation, ça me plaît ! Et je n’aimerais surtout pas me faire avoir en mettant les pieds dans les mauvais plats.
Ou peut être «Espoir» ! L’espoir fait vivre, dit-on ! J’ai envie de vivre pour pouvoir boire, m’échapper, remplir mes armoires, et réaliser ainsi une tonne de victoires.
Pourquoi ne pas prendre «Victoire» directement au lieu de tout ce long chemin ?! C’est bien plus rusé. Un raccourci ! Mon choix est fait !
La victoire ! C’est trop bon ! C’est trop beau, trop bien ! Trop «tout» ! Rien ne vaut son goût, à la Victoire ! J’en veux encore et encore ! Seul, à deux, ou à plusieurs… C’est la consécration de la réussite, notre réussite dans toute sa splendeur !
Une fois qu’on y goûte, on ne peut plus s’en passer ! On y prend goût ! Et ceux à qui nous l’offrons aussi !
Quel excellent choix ! Je m’en félicite ! Me voilà, goinfrée de victoires. Le velouté offert n’a pas eu de place dans ma bedaine pleine de gains. Je m’en suis donc passée sans regret aucun ! Patience et indulgence devront attendre. Je me suis rassasiée de Victoire.
Rassasiée, est-il possible d’être rassasié de Victoires ?! JAMAIS !
Plus on en a et plus on en veut ! Il en devient carrément inacceptable, de consommer autre chose ! Totalement inenvisageable ! Ça serait avoir mauvais goût !
On nous la servirait même matin, midi et soir, qu’on en serait nullement gavés, assouvis, ou écœurés ! Qui peut la refuser !
Peut-être qu’on l’apprécierait un petit peu moins. Peut-être qu’on l’estimerait modérément moins et peut-être le vivrait-on légèrement moins.
Cela ne nous empêchera pas d’en redemander.
La Victoire a eu gain de cause, gain de moi, de nous.
La remplacer ?! Par quoi ?!
Par Effort ou par Labeur ?! Ils en font déjà partie ces deux. Ils ne pourraient donc la remplacer. C’est grâce à eux qu’elle se réalise.
C’est ce qu’on nomme la victoire méritée. D’ailleurs une victoire sans effort et sans labeur n’en est pas réellement une. Elle n’en aurait pas la même saveur. Elle ne serait pas savourée de la même sorte. Elle ne communiquerait pas le même bonheur, la même euphorie et les mêmes sentiments de succès. Elle ne mieux communiquerait pas et ne mieux vivrait pas avec celui ou ceux qui la rêvent, la désirent, l’espèrent, l’attendent et enfin la réalisent. Ceux à qui nous l’offrons, ceux-là s’y habituent autant voire plus que nous et nous le font bien savoir !
Une véritable victoire est concoctée par les chefs Risque, Travail, Engagement et Echec. Oui échec ! L’échec qui mène à la progression par l’évaluation et par les leçons tirées pour davantage d’apprentissage.
«La maîtresse cheffe» de cette bien-aimée VICTOIRE est la conquête !
La conquête de qui ?! La conquête de soi-même !
«La victoire sur soi est la plus grande des victoires.», disait Platon.

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