Lundi, Nicolas Sarkozy était chez moi, à Strasbourg. Il a fait salle comble avant d’aller le lendemain inaugurer le Tram de Marseille. Quelle énergie! Quel talent ! Quelle voracité. On parle même d’hyperprésidence comme on a parlé, pour les USA, d’hyperpuissance.
Insatiable Sarkozy ! Il a mis à genoux son camp en soumettant les meilleurs gladiateurs de la droite. Il a remporté une nette et large victoire sur sa rivale aux présidentielles, très méritée soit dit en passant. Il a poussé l’exploitation du filon de la diversité comme jamais personne de ses prédécesseurs n’a osé le faire. Et lundi soir, il a promis d’aller encore plus loin dans «l’ouverture dans les semaines et les mois qui viennent». Il entend exploser les lignes de clivage et réussir le rassemblement le plus large qu’il veut «au service des réformes les plus profondes». Il continue donc le boulot. Objectif : une gauche cannibalisée.
Rien n’est trop beau pour ça. Quitte à dévorer de l’éléphant. Bernard Kouchner, c’était facile tant celui-ci avait souffert d’être sous-utilisé au PS. Jean-Pierre Jouyet, initiateur du texte des Graques qui prônait l’alliance entre PS et le centre, est du beau gibier. Ne serait-ce que parce qu’il était l’ami intime du couple Hollande- Ségolène. Jean-Marie Bockel, sénateur-maire, nourrissait tant de frustrations à cause de son blairisme rejeté par ses camardes qu’il reste une cueillette facile. Il doit, d’ailleurs, une fière chandelle à Eric Orsenna qui avait refusé la proposition. Même l’erreur de casting qu’est Fadela Amara reste de la petite facture alors qu’elle concentre, à elle seule, féminité, diversité et traitrise, Ces trophées paraissent insuffisants pour rassasier Nicolas Sarkozy. Il lui faut du steak de dinosaure. Du coup, la saison des débauchages est loin d’être close. Et la chasse des scalps reste ouverte.
Ainsi, le nouveau président a confié lundi à Hubert Védrine une mission de réflexion et de prospective sur la place de la France et de l’Europe dans le monde. L’ancien ministre des Affaires étrangères de Lionel Jospin avait été fortement pressenti au poste de chef de la diplomatie mi-mai qu’il avait décliné en l’absence de garanties sur ses prérogatives. Le bruit est très assourdissant sur un Jack Lang qui aurait accepté de prendre la tête d’une commission chargée de préparer la modernisation de la Ve République. Balladur et Mazeau, ancien président du Conseil constitutionnel en feraient également partie.
Conséquence, la réaction la plus fashion, comme dit ma fille, c’est de prétendre avoir été approché par l’entourage présidentiel. Malek Boutih s’en vante. Manuel Valls s’en sent honoré. Même Julien Dray aurait été accosté pour l’Intérieur. C’est Claude Guéant qui est chargé de fouiner du côté de la gauche, de humer les proies, de déterrer la traitrise et d’attiser les vocations chez les socialo-sarko-compatibles. Avec cette logique, pourquoi pas Strauss-Kahn comme Premier ministre. Ça pourrait avoir de la gueule, non !
Cette course à l’échalote n’est du goût de tout le monde. Elle donne de la saveur à la soupe aux grimaces. Surtout au PS.