On a un peu vite oublié qu’un journal ultra conservateur avait prédit, pour le Maroc et pour Agadir plus précisément, un tsunami en guise de châtiment divin. L’auteur y voyait l’issue fatale de la dérive des mœurs qui, à ses yeux, sévissait dans ce temple du tourisme. Depuis l’auteur de cette prophétie a disparu des colonnes du journal. Et pour ce qui est du Tsunami, on attend toujours.
Cette ineptie me revient obsessionnellement à chaque fois que j’entends parler du raz-de-marée islamiste pour les prochaines élections. Cette idée est fermement ancrée depuis le fameux sondage dont l’origine américaine a suffi pour le doter d’une forte crédibilité. On verra dans six mois.
Mais en dehors du pronostic, qui sied mieux aux turfistes qu’à l’analyse politique, on ne peut qu’être alarmés par la puissance du poison du discrédit qui frappe le système partisan marocain et ses leaders. A juste titre.
Il y a beaucoup de facteurs qui alimentent cet état de fait, triste au demeurant. Dont en particulier des facteurs psychologiques, déterminants dans une élection. Il suffit, par exemple, de regarder le kaléidoscope des zouamas marocains. Il dégage l’impression de la visite d’une maison de retraite pour un pays qui a besoin de se présenter comme une salle de sport. De l’effort et de la sueur. Du dynamisme au lieu de l’impotence. Sans quoi, le PJD pourra toujours faire œuvre facile en incarnant du neuf avec des vieilleries.
Sans commettre l’injure de rappeler l’âge des maréchaux politiques, c’est ahurissant de se dire que nombreux sont ceux qui avaient déjà la trentaine et plus quand l’actuel Souverain naquit. Dans un pays où l’écrasante majorité est jeune, le contraste n’en devient que plus saisissant. Comment s’étonner alors que la population ne se sente plus représentée. Elle mesure intuitivement l’obsolescence des organes politiques de son pays par le truchement de ses vieux représentants. Cette fêlure serait supportable si elle ne mettait pas en danger la transition démocratique elle-même.
Il y a besoin de sang neuf. Les islamistes ne sont pas séduisants. Surtout pour un pays adepte du juste milieu avec une population aussi espiègle que la nôtre. C’est le paysage politique actuel qui constitue un repoussoir. Plus les responsables des partis politiques incarnent l’éternité et l’inamovibilité, plus le champ des possibles s’ouvre pour les démagogues. Sans parler de l’incapacité à résoudre les problèmes de l’éducation, de la santé, du chômage et de la corruption et dont ils sont, à tort ou à raison, tenus pour responsables. Le populisme, dans ces conditions, peut prendre le volant de l’alternance avec préjudice pour la modernisation politique.
Un pays qui a des problèmes considérables ne devrait pas souffrir du désenchantement de la chose politique. Au contraire, il devrait être possédé, au sens démoniaque du terme, par la passion, le défi et le volontarisme surtout avec un Souverain jeune, courageux et décidé, démocrate et social.
Il y a urgence. Le système partisan s’essouffle face aux mutations du monde et des idéologies. Il faut se ressaisir au lieu de s’épuiser dans les calculs politiciens pour quelques sièges ou des strapontins.