Chroniques

Label marocanité : L’intimidation intellectuelle

© D.R

Un courrier adressé à Aujourd’hui le Maroc a été renié, aussitôt publié, pour la simple raison que la manœuvre était destinée à débusquer la servilité crasse d’un journal prétendument indépendant. Utilisant le cas Lmrabet, la correspondance transpire un nationalisme enflammé, commettant, par-ci par là, des propos outranciers. Sa publication est aussitôt dénoncée comme un aveuglement déontologique. Elle atteste l’abjection du journal. Elle prouve sa complaisance et son manque d’indépendance. Hormis que le découpage entre presse dépendante et indépendante valide une escroquerie intellectuelle sans nom. Car il est plus juste de parler, au Maroc, de presse partisane et de presse privée, avec des lignes éditoriales diverses, s’assumant chacune de son côté. Le courrier en question et le procédé qui le sous-tend doivent être l’œuvre d’un esprit dérangé. La facétie aurait été banale si il n’y avait la qualité de son auteur : militant des droits de l’Homme, responsable associatif et vivant en France.
Les névroses sont comme les trains, l’une peut cacher l’autre. Et ici, c’est le cas. Le courrier et son reniement (sur le web) sont les deux facettes d’une même pièce. Ils sont l’attestation même du drame marocain : Le manichéisme ambiant qu’endure la pensée dans le pays, depuis 1999.
La rhétorique nationaliste du courrier n’a d’égale que la faconde démagogique du reniement. Dans les deux cas, on est dans le simplisme le plus funeste. Le propre du simplisme étant de dénaturer la réalité. Personne n’a jamais prétendu que le Maroc était le meilleur du monde possible. Serait-ce une raison pour en faire la géhenne terrestre et ultime ? Et si beaucoup de choses changent, il reste que les défis qui attendent la société marocaine demeurent phénoménaux. Ils dépassant de loin les frasques d’Ali, les états d’âme de Ménard et l’anticonformisme nigaud des récalcitrants insatiables.
Une certaine pensée révolutionnaire a fait son dépôt de bilan, depuis belle lurette. Certains en sont restés orphelins. Rentiers d’un raisonnement thésaurisé et boutiquier d’une doctrine statufiée, ils vivent mal les bouleversements qui se produisent sans eux.
Guérillero du pilonnage systématique, ils vivotent dans l’entretien de la seule philosophie qui vaille : celle du soupçon. En ces temps du triomphe de la pensée unique, ils survivent, eux, grâce à la pensée unilatérale.
Ils n’ont jamais de proposition positive, jamais de théorie alternative, jamais d’idée constructive. Et s’ils sont à peine audibles, c’est par la grâce du web qui leur sert de grand dispensateur de tracts à l’encre indolore.
Le web n’est pas déontologique. On peut en user et en abuser pour distribuer l’anathème. Et l’anathème peut fonder une certaine puissance. L’injure peut facilement et ingénument  glisser; comme un serpent, de mail en mail, de site en site. On trouve dans cette brocante d’anciens communistes en mal de repentance. Des guevaristes fonctionnarisés, des maoïstes qu’indispose la Chine d’aujourd’hui, des trotskistes inassouvis. Tous maquisards de l’intimidation intellectuelle.

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