La France, fille aînée de l’église, est décidément bonne fille. Déjà qu’elle doit composer avec près de cinq millions de musulmans qui veulent leur viande halal, leur Ramadan, leur foulard dans les écoles, leurs mariages dans des salles séparées, leur menthe dans les marchés très bien achalandés …voilà maintenant qu’elle assiste à une pièce guignolesque qui se déroule dans le Conseil français du culte musulman.
La fusée à plusieurs étages installée, à la va-vite faut-il le rappeler, par l’homme pressé Nicolas Sarkozy, prend la tangente. Elle est en train d’exploser en vol. Son fuselage, alliage fragile et composite, aura du mal à résister aux secousses.
Comprenons-nous bien. Il est déjà très difficile pour un Français moyen de comprendre les ruelles compliquées qui mènent aux différentes écoles de l’Islam : sunnite, chiite, malékite, hanafite… sans parler des hypocrites. Voilà qu’on lui inflige, à ce français moyen, les dissensions nationalistes des différents protagonistes de l’Islam de France : marocain, algérien, turc, mais aussi tunisien, malien, sénégalais…Ce sont les Balkans.
La prise d’otage des journalistes français en Irak mixée avec la loi sur les signes religieux ont été l’occasion pour le CFCM de monter une certaine utilité dans le cadre d’une diplomatie du turban ou de la babouche. Cela, ce sont les responsables politiques français qui l’ont cru. Ils ont eu raison de n’exclure aucun moyen pour récupérer les deux journalistes et leur chauffeur. In fine, l’escapade moyen-orientale des pieds nickelés musulmans s’est avérée aussi inefficace que l’équipée barbouzarde du député Julia. Et pour cause, les otages français sont encore retenus en Irak. La diplomatie du chéquier des Italiens, s’agissant des deux religieuses, a été bien plus payante.
Mais l’épisode a provoqué beaucoup de dégâts dans la structure sakozyste. Les flashs des photographes et les sunlights médiatiques ont inoculé une zizanie entre les leaders de l’Islam de France. Passe encore que Mohamed Bechari et Fouad Alaoui, tous deux Marocains d’origine, puissent fanfaronner à Bagdad sous les lumières des caméras du monde. Mais en allant embrasser la tête d’Abassi Madani l’algérien, Bechari le Marocain à fait tourner, de manière vertigineuse, le sang de Dalil Boubakeur, son président dont personne n’ignore la sensible fibre algérienne. Du coup la Mosquée de Paris annonce qu’elle ne se présentera pas aux prochaines élections tant que le mode de scrutin n’est pas modifié. Car celui-ci condamne cette mosquée à demeurer minoritaire dans le dispositif. La semaine dernière, le recteur de la Mosquée de Lyon, lui aussi d’origine algérienne, a claqué la porte et apparemment les instances du CFCM ne prennent même plus la peine de se réunir.
Bref, tout démontre que la gestion de l’Islam en France ou de France n’est pas encore mature. Mais je me hasarde, sans trop de risque, dans une hypothèse. Il est fort à parier que la structuration de l’Islam en France ne sera possible tant que demeure le conflit entre le Maroc et l’Algérie, par Sahara interposé.
Autant dire que ce n’est pas pour demain.