Chroniques

Label marocanité : Los indignados

© D.R

C’est un peu cocasse. L’Espagne, depuis le 15 mai, a sa place Tahrir: Puerta del sol en hispanique. C’est le monde à l’envers. Ce sont maintenant les Ibériques qui prennent comme référence le printemps arabe. Et si chez ces derniers, les masses exhortaient leurs dirigeants à «dégager», les Ibères préfèrent plutôt une posture d’indignation. Dans une société où le chômage est de 21% mais qui atteint 43%  chez les jeunes, Les «los indignados» dénoncent la corruption des élus et la dictature de la logique du marché qui les insupporte autant que la dictature tout court. Ils dénoncent enfin le bipartisme, l’alternance fatale depuis la mort de Franco entre PSOE et le  Parti populaire, et surtout la vacuité du discours  politique face à une crise violente, brutale. Les élections de dimanche dernier ont constitué non seulement une bérézina pour les socialistes au profit du Parti populaire, mais comme élections intermédiaires, elles constituent en quelque sorte un tour de chauffe pour les élections générales qui se tiendront dans moins d’un an.  Il est loin donc le temps où la movida espagnole illuminait la transition démocratique par tant de talent, de virtuosité artistique et le panache de Pedro Almodovar et l’audace de Victoria Abril. La crise a enfoncé ses griffes acérées dans l’épiderme de la société espagnole. Les baisses drastiques des dépenses publiques, les sévères diminutions du nombre de fonctionnaires, le manque d’emploi, la baisse du pouvoir d’achat constituent un cocktail volcanique qui alimente le profond malaise et le mécontentement. Ce malaise risque de sévèrement éclabousser les Marocains d’Espagne si ce n’est déjà le cas. L’extrême droite qui prospère un peu partout en Europe a jusque-là été relativement endiguée en Espagne. Le Parti populaire avait réussi à servir de lessiveuse et a opéré une ingestion de certaines factions phalangistes et franquistes. Or durant cette campagne municipale, des slogans anti-immigrés ont servi d’arguments pour désigner l’étranger comme l’un ders maux de la société. Or à la différence des Pays-Bas où Geert Wilders cible les Marocains comme éléments qui contrarient  l’intégration et menacent le modèle hollandais, de la France où Marine Le Pen, en liftant le vieux fonds de commerce paternel qui faisait du racisme un puissant viatique pour lui substituer la lutte contre l’islamisme qui menace la République et la laïcité, avec l’Espagne où l’étranger est d’abord marocain, ce n’est pas de racisme anti-marocain qu’il faut parler. C’est de quelque chose de plus vigoureuse qu’il s’agit : De la Maurophobie, c’est-à-dire la haine historique du Maure. Cette haine et ce ressentiment, qui ne demandent qu’à se réveiller, puisent leurs profondeurs dans les 5 siècles qui nous séparent de 1492.

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