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Le Polisario, une malédiction algérienne !

Mustapha Tossa Journaliste éditorialiste

Pari perdu
Pour Alger, continuer à entretenir ce mythe séparatiste équivaut à une lente tentative de suicide aussi bien pour le régime que pour la population algérienne qui paie actuellement le prix d’un manque de réalisme.

Le jour où les Algériens se demanderaient ce que leur pays est en train de perdre à cause de son soutien à l’aventure séparatiste du Polisario, ce jour-là une révolution politique et culturelle serait inévitable. Aujourd’hui un constat s’impose. Le régime algérien est en train de brûler toutes ses relations internationales pour servir les intérêts de milices armées dont l’objectif assumé est de porter atteinte à l’unité territoriale marocaine.

La crise actuelle avec la France qui prend des proportions inédites trouve sa genèse dans la décision d’Emmanuel Macron de reconnaître la marocanité du Sahara. Depuis juillet 2024, une série de comportements algériens, la conséquence directe de cette reconnaissance, a fini par miner cette relation au point de provoquer des tensions et des ruptures. Dernier épisode de cette crise, Paris a lancé un mandat international contre le numéro deux de l’ambassade algérienne accusé d’être impliqué dans une tentation d’enlèvement et de séquestration en relation avec une entreprise terroriste.

Cette série d’attitudes algériennes hostiles est encore dans les mémoires comme autant de niveaux d’escalades et de provocations. A commencer par l’arrestation arbitraire de l’écrivain Boualem Sansal et du journaliste Christophe Gleizes, en passant par un refus ostentatoire de donner des laissez-passer consulaires pour les expulsés algériens, jusqu’à à arriver à entretenir des influenceurs algériens pour semer la zizanie en France quand le régime n’a pas recours à son appareil diplomatique pour commettre des agressions et des enlèvements contre des opposants algériens installés en France.

Le Polisario était déjà à l’origine d’une grande crise politique et économique avec l’Espagne. Alger voulait faire payer au Premier ministre Pedro Sanchez le fait d’avoir reconnu la souveraineté du Maroc sur son Sahara. Résultat. Une tension très palpable avec Madrid et des pertes économiques très lourdes pour l’économie algérienne. Le retour à la normale dans les relations entre l’Espagne et l’Algérie s’est fait à un prix très pesant pour le régime algérien, sans toutefois parvenir à cette normalité désirée, la méfiance des Espagnols face à l’imprévisibilité des Algériens est de rigueur.

Avec le Monde arabe qui soutient dans sa presque totalité le Maroc, Alger a fait le choix de la crise et de la tension. De nombreux pays du Golfe ont tenté des médiations entre Algériens et Marocains, sans succès. Le régime algérien s’accroche à son fantasme séparatiste et refuse de faire la moindre concession dans son soutien armé et politique aux séparatistes du Polisario. Avec les pays africains, la tendance est au conflit avec Alger. Ceux, de plus en plus nombreux, qui retirent leur reconnaissance au Polisario deviennent inévitables des ennemis. L’influence algérienne en Afrique se réduit comme une peau de chagrin. La dernière crise avec les pays du Sahel est venue consolider cette fracture.

L’Algérie joue son présent et son avenir pour défendre le Polisario, met en danger ses relations internationales pour préserver cette mésaventure séparatiste et surprend le monde entier en affirmant aux Nations Unies qu’elle n’est pas partie prenante dans ce conflit pour éviter de participer aux tables rondes préconisées par l’organisation new-yorkaise pour trouver une solution consensuelle à cette crise régionale.
Et la question que doivent se poser les Algériens. Comment se fait-il que leur régime soit en situation de miser sur une aventure perdante, internationalement condamnée et dont il affirme ne pas être partie prenante et qui lui fait perdre autant d’alliés sur le plan international et régional. Le citoyen algérien va se rendre compte, si ce n’est déjà fait, que si son niveau de vie est en train de baisser, qu’il subit au quotidien toutes sortes de pénuries, que son pays est isolé et encerclé, vivant une vie de pestiféré, que les pays importants où il peut se déplacer sans visas se comptent sur les doigts de la main, il doit cette situation à un pari perdu du régime algérien sur le Polisario.

Un pari perdu doublé d’un entêtement politique à continuer dans cette voie qui mène vers une impasse. Tellement perdu que les milices armées du Polisario courent actuellement le risque d’être cataloguées comme une organisation terroriste aussi bien par Washington aujourd’hui et demain par les autorités de Bruxelles. Le Polisario est une vraie malédiction algérienne. Pour Alger, continuer à entretenir ce mythe séparatiste équivaut à une lente tentative de suicide aussi bien pour le régime que pour la population algérienne qui paie actuellement le prix d’un manque de réalisme et de pragmatisme de son élite dirigeante.