Chroniques

Les gens du livre

© D.R

C’est même en train de partir, ou plutôt en train de fermer. Dans quelques heures, on va dire à tout le monde qui est passé au Salon : maintenant, vous pouvez regagner vos salles à manger, vos cuisines ; circulez, il n’y a plus rien à lire. Et oui : quand le SIEL ferme ses portes, on ramasse ses bouquins, ceux qu’on n’a pas pu liquider parce que trop nouveaux, hors de prix, trop lourds, pas chers du tout, ou parfois et même souvent, trop anciens.

Et puis, plus rien ! Ni ici à Casa, ni nulle part ailleurs. Comment ? Pourquoi ne pas organiser des mini-salons du livre dans d’autres villes ou d’autres villages ? Vous plaisantez ou quoi ? Pour nos responsables, un événement comme ça, ce n’est pas le souk hebdomadaire. Un SIEL, ça ne s’organise pas comme ça, en un claquement de doigts.

Il faut plusieurs réunions, plusieurs commissions, plusieurs études, plusieurs budgets , et ça ne finit jamais… D’ailleurs, tous les ans, le Salon est inauguré alors que dans une bonne partie des stands, on n’a pas encore fini d’ouvrir les cartons et de brancher les caisses. Et c’est à chaque fois, comme ça. On organise, on inaugure, on parlote, on promet, et on clôture. Le Salon est terminé, vivement le Salon prochain!

Mais tout ça n’est pas grave. Comme rien ne se perd et qu’il n’y a pas non plus grand-chose qui se crée, tout cela sera mis quelque part dans les coins des causes pas toujours perdues, comme les dépôts, les caves, les greniers et autres hangars.

Oui, je sais que je raconte n’importe quoi, que je suis excessif, caricatural, bref, que je délire, mais que voulez-vous ? J’aime les livres, j’adore la lecture, et je rêve de passer tout le temps qui me reste à vivre, à lire. Non, je ne suis pas un fou de la lecture, je suis un amoureux des mots et des lettres, un passionné des accords et de la coordination, des locutions et de la ponctuation. Ce ne sont pas des tares, ça, ce sont des cadeaux qui m’ont été légués, à moi seulement, et à toute une partie de ma génération.

Oui, je le répèterai toujours : nous avons été des gens privilégiés, du moins sur ce rayon-là. Nous n’avions certainement pas le confort qu’ont par exemple nos enfants aujourd’hui sur le plan des conditions d’études, de technologie etc., mais nous avions eu la chance d’avoir non pas des hauts responsables de l’enseignement et de bonnes politiques de l’éducation, mais plutôt des enseignants qui étaient  eux-mêmes des amoureux fous – et des amoureuses folles – des livres et de la lecture.

Ce sont eux et elles qui nous ont inoculé cette grande envie de lire et qui nous ont permis, et nous permettent jusqu’à ce jour, d’en tirer un immense plaisir. Il est très possible que ceux qui se sont alternés sur l’avenir institutionnel de notre enseignement et donc sur l’avenir des méninges de nos enfants n’ont pas accordé toute l’importance qu’il faut à la lecture et au livre, mais je suis également persuadé que nos instituteurs et nos professeurs ont failli à leur mission première et essentielle, à savoir de donner l’envie de savoir.

Or, à mon humble avis de presque vieux et toujours élève, on ne peut pas vraiment savoir sans lire, et sans aimer lire. Quand la lecture est perçue par l’enfant comme une contrainte, et par le parent comme une obligation, je crois qu’on peut dire adieu aux livres et tout ce qui lui ressemble. A ce propos, certains pourraient me rétorquer qu’avec l’ordinateur et Internet, le concept du livre doit être repensé. 

Ça, c’est un argument de quelqu’un qui n’a jamais lu et qui ne lira peut-être jamais. Moi qui vous parle, j’ai téléchargé des centaines de bouquins sur ma tablette, mais rien ne me procure autant de plaisir qu’un vrai livre en papier, fût-il le plus vieux ou le plus ringard.
En attendant que  nos responsables veuillent bien un jour se pencher sur le grand problème de la lecture et de la culture dans notre pays, je  souhaite à tous les amoureux et à toutes les amoureuses du livre un très bon week-end. Quant aux autres…

Un dernier mot sous forme de devinette pour rigoler un peu : pourquoi certains hommes politiques attendent que des personnes ne soient plus de ce monde pour en dire du mal ?

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