Chroniques

Lettre de Marrakech : L’éditorialiste ami de Marrakech

Si Marrakech attire beaucoup de célébrités et dans tous les domaines, il y en a parmi eux qui lui sont fidèles, régulièrement ils viennent comme s’ils se déplaçaient vers un deuxième chez soi, car ils se considèrent non loin de Paris, dans un lieu de paix et de méditation qui leur permet de faire un break mais encore de faire le point sur leurs réflexions sur leurs travaux et sur leurs projets, et cela en se dorant dans la ville de Marrakech connue pour son climat continental, sans humidité, le soleil  radieux aidant. A 3 heures de l’Europe, c’est l’endroit idéal pour bon nombre de personnalités qui  viennent ici dans ce pays merveilleux, fief de la cohabitation, de la paix, de la tolérance et de l’hospitalité sincère. Dernièrement, et comme à l’accoutumée, j’ai rencontré Jean Daniel. Est-il vraiment besoin de présenter ce sphinx de la plume, cet écrivain et éditorialiste des plus célèbres de la France?
Certes pas, mais si j’en parle c’est pour mieux le faire connaître à l’intellect marocain ou tout simplement au lecteur intéressé de suivre dans cette lettre de Marrakech, les amis de notre belle cité. Jean Daniel est né à Blida en Algérie le 21 juillet 1920 où il a fait ses premiers pas, sans jeu de mots, au lendemain de cette ravageuse première guerre mondiale. Il effectue son parcours normal d’études pour les finir à la célèbre université du boulevard St Michel, La Sorbonne où il obtient son diplôme de philosophie. Ainsi la vie pratique va commencer pour Jean Daniel qui comme on le verra montera en flèche dans le domaine des médias et des écrivains jusqu’en 1945, au lendemain de la Seconde  Guerre mondiale, après l’avoir faite pour son pays, il est nommé comme attaché au cabinet du président du conseil. A ce moment, il fut décoré de la Croix de guerre 39/45.
Après avoir passé deux années à la présidence du conseil, il fonde en 1947 une revue culturelle ‘’Caliban’’ dont il sera le principal dirigeant et ce jusqu’en 1951.
Jean Daniel commença sa carrière d’écrivain à partir de cette période où il va sortir son premier livre intitulé «L’erreur», chez Gallimard en 1953, livre préfacé d’ailleurs par un certain Albert Camus. Le lecteur comprendra facilement que la notoriété de Jean Daniel ne se fera pas attendre puisqu’en 1954, il est nommé rédacteur en chef de l’hebdomadaire «L’express» et cela pendant dix ans. Comme chacun le sait, «L’express» a connu comme dirigeants des personnes célèbres comme Jean Jacques Servan Schreiber ou encore Françoise Giroud récemment décédée.
Pendant cette période, Jean Daniel se fera connaître non seulement par ses articles sur la scène française, mais surtout comme reporter international à travers le monde. C’est d’ailleurs le travail qu’effectue aujourd’hui sa fille qui est envoyée sur tous les points chauds du monde, le dernier étant la guerre de 2003 en Irak. Pendant tout ce temps, Jean Daniel fera les grandes couvertures internationales pour «l’Express».
On se rappellera de ses articles sur la guerre d’Algérie, son pays natal. Il en fera pleins d’autres et notamment des reportages restés très célèbres sur Fidel Castro, mission que lui avait confiée le Président des USA, J.F. Kennedy. Jean Daniel ne se limitera pas à son travail dans «l’Express» puisqu’en 1957, il devient aussi le correspondant du quotidien de Washington : «The new Republic». Pendant cinq ans, jusqu’en 1962, il assurera ce travail pour ce média américain. L’année où Jean quitta «l’Express», il deviendra un des collaborateurs du célèbre journal «Le Monde». Mais voilà qu’en cette même année 1964, il prendra une grande décision, c’est celle de créer un grand hebdomadaire, ce sera chose faite, avec la parution de la revue «Le nouvel observateur» dont il est le fondateur en 1964. Ce serait difficile dans un simple article comme «Lettre de Marrakech» de retracer le travail colossal effectué par Jean Daniel dans «Le Nouvel obs»,  comment on dit couramment pendant ces 40 ans. Il va sans dire que cet hebdomadaire a fait le beau temps dans tous les domaines, politique, guerre, crises économiques, international, reportages et encore… ce que l’on retiendra, ce sont les fameuses rencontres de J. Daniel au Maroc avec Feu SM Hassan II. Jean Daniel me disait d’ailleurs que la dernière interview de notre Feu Souverain regretté était faite par lui et une des premières aussi avec de SM le Roi MohammedVI. Aujourd’hui, ne l’oublions pas que Jean Daniel a 83 ans, mais c’est un homme humble, souriant, simple qui paraît d’une gentillesse extrême portant en lui un regard qui en dit long. Il a résumé, à ma question sur notre pays et Marrakech naturellement : «J’aime». Toujours actif au sein du Nouvel observateur, il en est aujourd’hui l’éditorialiste et, bien entendu, le directeur.
Durant sa carrière de journaliste, Jean Daniel s’est vu confier d’autres missions comme collaborateur du célèbre La Republica italienne et ce, à partir de 1989, aussi que la même fonction au sein d’El Pais espagnol. Au-delà de sa carrière journalistique, Jean Daniel a côtoyé le monde intellectuel et politique célèbre allant de Pierre Mendes France à Albert Camus, Maurice Clavel, Elio Vittorini ou Michel Foucault. C’est aussi un homme de position et de principe, prenant à chaque fois, part dans les grands débats du siècle et de son pays en tant qu’intellectuel. Ses positions les plus remarquées étaient sur l’utopie marxiste ou sur le rapport religieux entre tradition et modernité (en plein jour actuellement en France) ou encore sur l’avenir de la Méditerranée et les rapports Nord-Sud. Durant sa vie d’écrivain, Jean Daniel a produit un grand nombre de livres intéressants. Après «L’erreur» déjà cité, il publie beaucoup d’ouvrages traitant différents sujets allant de la politique à la société ou à l’autobiographie. Pour rappel, citons les œuvres célèbres de Jean Daniel :
En 1973, «Le temps qui reste» chez Stock, livre qui reçoit le prix de la presse, réédité en 1984 chez Gallimard
En 1977, «Le refuge et la source» chez Grasset et dont la préface est de Roland Barthes.
En 1979, «L’ère des ruptures», chez Grasset, préfacé par Rechel Foucault recevant le prix aujourd’hui.
En 1986, «De Gaulle et l’Algérie», chez seuil.
En 1988, «Les religions d’un président », chez Grasset
En 1989, «Cette grande lueur à l’est», œuvre faite en collaboration avec Youri Afannassiev, chez Mareen Sell.
En 1991, «Mendes France», avec Jean Lacouture, chez le Seuil.
En 1992, «La blessure», chez Grasset.
En 1994, «L’Ami Anglais», chez Grasset, prix Albert Camus.
En 1995, «Voyage au bout de la Nation», chez le Seuil.
En 1996, «Dieu est-il fanatique», chez Arlea.
En 1998, «avec le temps carnet 1970-1998», chez Grasset, qui reçoit le prix Méditéranée en 1999.
En 2000, «soleil d’hiver-carnet 1998-2000 chez Grasset.
En 2002, «œuvres antobiographiques», chez Grasset.
En 2002, «Lettres de France, après le 11 septembre» chez ST Simon.
La vie riche de cet illustré écrivain s’est accompagnée de plusieurs titres et décorations dont :
Membre successivement : du conseil d’administration de la bibliothèque nationale française ; du conseil supérieur de l’AFP (71-75) ; du conseil supérieur de la banque française (89-94); du conseil d’administration du grand Louvre (92-97); du comité consultatif national d’éthique (98-2002) et aujourd’hui, il est le président du comité des sages, à Bruxelles auprès de Ramano Prodi.
Par ailleurs, J Daniel a été décoré plusieurs fois notamment : officier de la Légion d’honneur ; commandeur dans l’ordre national du mérite ; commandeur dans l’ordre des arts et des lettres. Si on ajoute à tout cela que les œuvres de Jean Daniel ont été traduites en italien, en argentin en chilien, en japonais, en chinois, en brésilien, en grec, en coréen ou en roumain, c’est une preuve encore de l’importance donnée à cet homme célèbre que la ville de Marrakech intéresse par son charme et son calme qui vont bien à cet homme qui dégage les mêmes impressions. Nous lui souhaitons, plusieurs «come-back» encore dans cette ville qu’il est inutile de qualifier comme étant la sienne.  

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